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Critique de enjie77


Pour moi, c'est la grande surprise de l'année 2019, je suis impressionnée ! C'est le qualificatif qui me convient ! Je ne suis pas très familière de la littérature actuelle. J'ignorais totalement qu'Isabelle Autissier écrivait. Je ne connaissais que ses talents de navigatrice. Mais quelle découverte que je dois à vos commentaires élogieux, notamment « michfred et viou ». Un grand merci ! Et puis, il y a la Russie et ses étendues qui vont rêver !

Elle maîtrise le style Isabelle Autissier, elle nous choisit un sujet déjà maintes fois décrit, l'Union Soviétique, tout en brossant avec finesse la psychologie de ses personnages : l'histoire bouleversée et bouleversante d'une famille sur trois générations du temps de l'Union soviétique jusqu'à la Perestroïka.

Mourmansk, après la 2ème guerre mondiale, un port sinistré, détruit par les bombardements, mais très animé où il y fait très froid, des marins, des femmes de marin, des enfants et des scientifiques. Il y manque de tout dans cette grisaille où le froid règne en maître, beaucoup de résignation, de personnes sans abri, il y a les bons de nourriture, les bons pour le charbon! La misère suinte de partout, dans cette brume du port de Mourmansk, les crépis des façades des immeubles sont délabrés, la moisissure s'invite en traînée sous les rebords des fenêtres et pour oublier, il y a l'alcool ; mais l'Union Soviétique veille au bien-être de ses citoyens.

Iouri 46 ans, exilé aux Etats Unis depuis 1994, revient vingt-trois ans plus tard pour une dernière visite à son père, Rubin, atteint d'un cancer du foie en phase terminale. Ce dernier ne lui a jamais parlé de sa mère, la grand-mère de Iouri, disparue du paysage hormis qu'elle était une scientifique mais sur son lit d'hôpital Rubin lui avoue « qu'il faudrait savoir » et il se met à lui raconter ses parents, Anton, son père et Klara, sa mère. Et comme « il faudrait savoir », Iouri va de son côté tenter de comprendre ce qu'est devenue Klara. Et de recherches en recherches, sa ténacité paiera.

Isabelle Autissier remonte le temps habilement à travers le destin d'Anton, de Rubin et de Iouri, elle nous emmène dans une des périodes les plus sombres de l'histoire de la Russie, elle évoque les hommes en noir qui débarquent en pleine nuit dans les appartements, la délation, la trahison des proches, la peur, le goulag, les tortures. Elle dépeint parfaitement l'organisation de la vie sous Staline jusqu'à l'arrestation en pleine nuit, sous les yeux de son fils Rubin, de Klara.

De cette supposée infamie, Isabelle Autissier nous dessine l'impact que celle-ci aura sur la vie de ces trois hommes et c'est une histoire chargée émotionnellement, faite de violences, de douleurs, d'incompréhensions et de fuites mais que c'est réaliste !

Enfin, il y a les bateaux, « le 305 », l'énorme chalutier congélateur de Rubin qui pêche aux abords de l'ile aux Ours, du Spitzberg et jusqu'en Terre de François Joseph, des archipels aux confins septentrionaux de l'URSS, là, la plume d'Isabelle Autissier donne toute sa puissance même si elle sait très bien illustrer la personnalité de ses protagonistes, la passionnée de la mer prend la barre ! Si vous voulez revêtir votre ciré jaune, c'est le moment mais il faut avoir le pied marin, c'est grandiose ! Vous recevrez même des vagues en pleine figure tout en remontant à la force des bras le chalut ! C'est magique lorsqu'elle parle, écrit, navigation Isabelle !

Et puis il y a les oiseaux, elle connait bien les oiseaux, Isabelle Autissier : ornithologue sera la profession de Iouri. Quelle sensation de liberté ils procurent à les regarder s'envoler!

En supplément : vous partirez en terre inconnue sans Frédéric Lopez mais en compagnie d'Isabelle Autissier pour cette belle découverte des « Nénets », une très belle promenade en terre sauvage suscitée par la plume imagée de l'auteure.

Un très beau voyage !





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