AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de mfrance


Figure intellectuelle incontournable du vingtième siècle et écrivain majeur (il n'y a qu'à lire "les mandarins" pour s'en convaincre), Deirdre Bair a consacré une biographie passionnante qui explore avec méticulosité la vie si riche de Simone de Beauvoir, faisant revivre la petite fille avide d'apprendre, l'adolescente curieuse de toutes les découvertes et enfin l'adulte se livrant tout entière à Sartre, qu'elle reconnaît comme supérieurement intelligent, éprouvant pour lui une admiration intellectuelle que rien ne viendra ternir !

Et il est vrai qu'une complicité intellectuelle profonde a formé le ciment de leur entente indéfectible. S'aidant mutuellement dans l'élaboration de leur oeuvre, acceptant les critiques l'un de l'autre et remaniant leurs textes en conséquence, voilà effectivement la base d'une complicité enrichissante !

Le concept "amour nécessaire" et "amours contingentes" prôné par le couple peut laisser dubitatif. C'est ainsi qu'ils ont décidé de baliser leur existence ! et ceci bien entendu se fera au détriment des autres. Deirdre Bair met le doigt sur ce problème, mettant principalement en évidence la tendre relation, enrichissante et douloureuse que Simone de Beauvoir entretiendra avec Nelson Algren.
Cette relation, si importante pour Simone de Beauvoir, Deirdre Bair la dépeint avec force détails mettant en avant la très forte complicité amoureuse qui les liera durant plusieurs années.

Mais il n'y a pas que cela dans cette biographie exigeante et bien d'autres se sont penchés sur les relations tumultueuses que Sartre et Beauvoir ont entretenues avec leur entourage, en ne les analysant pas forcément à leur avantage !

Quant à elle, Deirdre Bair a effectué un travail de fourmi, et interviewé nombre des proches de Simone de Beauvoir afin de cerner au plus près la personnalité du "Castor" et nous en donner une image précise, sinon définitive.

Pourquoi Castor ? Ce surnom lui a été donné par un étudiant ami, émerveillé par sa capacité de travail. Et il est vrai qu'on ne peut que demeurer ébloui et envieux devant son incroyable énergie intellectuelle, la facilité avec laquelle elle digérait les programmes ardus que ses études l'obligeaient à absorber et la maniaquerie dont elle faisait preuve dans ses recherches, afin de ne rien laisser de côté ! - pour preuve, la somme de documents étudiés pour rédiger "le deuxième sexe" et son essai sur "la vieillesse". Ce n'est plus de la recherche, c'est du ratissage !
Pour preuve également, sa glorieuse deuxième place à l'agrégation, réussie du premier coup à vingt et un ans tout juste, et ce pile derrière Sartre, qui lui, s'était fait rétamer l'année précédente ! en précisant que certains examinateurs ont estimé qu'elle aurait mérité d'être première, étant plus rigoureuse que lui dans la démarche intellectuelle, mais ayant le double défaut d'être une femme et de n'être pas normalienne !

Et en plus de tout cela, cette femme passionnée adorait la nature, explorait les paysages, rien ne devant échapper à son inlassable curiosité, parcourait fiévreusement les rues des villes, arpentait méticuleusement les allées des musées, se livrait à d'épuisantes balades en montagne, jamais rassasiée, jamais lassée .... un appétit de vivre absolument phénoménal, comme si elle avait voulu tout engranger de la vie !
J'avoue être restée pantoise devant un tel débordement d'énergie, un pareil appétit d'exister !

Bien entendu, privilégiant travail intellectuel, voyages et loisirs studieux, ses relations amicales et amoureuses ne pouvaient qu'en souffrir. Simone de Beauvoir avait l'habitude, non seulement d'écarter brutalement les importuns mais de manifester ses besoins de façon pas toujours très sympathique, c'est le moins que l'on puisse dire !

Simone de Beauvoir ? une femme qui dès sa jeunesse ne voyait pas de différence majeure entre elle et un mâle (étant écartée la dimension physiologique de la chose, bien entendu) et qui, constatant l'état de dépendance à l'homme auquel la plupart des femmes se soumettait a voulu creuser le phénomène pour comprendre un état qui lui a toujours été étranger, elle qui n'a jamais été dépendante. Cette réflexion est à l'origine du "deuxième sexe" et en cela, elle est la mère du féminisme actuel. Intelligente comme elle l'était, je n'ose imaginer ce qu'elle penserait des harpies glapissantes qui hantent l'espace médiatique ... ainsi que de cette magistrale connerie d'écriture inclusive, qui déchaînerait sans doute de sa part une hilarité féroce.

Mais, hors la personnalité de cette femme hors du commun, Deirdre Bair s'est livrée à une étude approfondie de son oeuvre, ce qui rend cette biographie absolument indispensable pour tous ceux qui veulent découvrir cette figure majeure de la littérature ou en approfondir la connaissance !

Commenter  J’apprécie          74



Ont apprécié cette critique (7)voir plus




{* *}