AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de elitiatopia


Cette longue nouvelle, historique car elle se déroule au temps de la troisième guerre de religion et s'achève en 1617, fait partie des études philosophiques, mais cela se sent peut-être moins, du fait de la nature quelque peu gothique de la nouvelle, genre assez surprenant chez Balzac.

Tout commence au moment de l'accouchement de la comtesse Jeanne d'Hérouville, un accouchement prématuré à sept mois de grossesse, qui la jette en butte à la brutalité de son mari, un soudard haineux et violent. La vie même de la comtesse est menacée, mais grâce à l'intervention du bon docteur Beauvouloir, savant médecin qu'on dit "rebouteur", elle est sauvée et son fils, Étienne, est épargné, moyennant qu'il vive dans une maisonnette sur la plage en contrebas du château et que le comte ne le revoie plus.

Ainsi, le jeune et toujours fragile Étienne vit caché de tous, mais parvient à profiter de la compagnie de sa mère. D'ailleurs, celle-ci a donné un autre fils au comte, fils en tout point semblable à ce dernier, fort et brutal. Assuré d'une descendance, le comte ne se soucie plus de son aîné et l'a complètement oublié. Ce sont des années heureuses pour Étienne qui, aussi faible et supra-sensible qu'il soit, a un don pour la musique et une âme splendide, capable d'occuper son extrême solitude sans jamais se lasser, avec la mer et la nature.

Mais à la mort de la comtesse, puis à celle de son second fils, il faut bien un héritier au vieux comte, qui retrouve alors son fils aîné et décide de le réhabiliter au château. Beauvouloir, qui a lui-même une fille très semblable au jeune homme, est chargé de trouver une issue heureuse à ce besoin de perpétuer la lignée D Hérouville. Il met tout en oeuvre pour rapprocher les deux jeunes gens, extrêmement candides et innocents - penser à la chose leur prendra cinq mois. Si le destin lui prête la main, les menées du comte D Hérouville et du baron d'Artagnon, viennent contrarier violemment ces amours débutantes.

J'ai apprécié la lecture de cette nouvelle, toutefois un peu longue dans ses développements et parfois confuse, comme si Balzac s'était décidé à suivre une piste narrative pour l'abandonner ensuite. La nouvelle se déroule sur un long temps, d'où sa longueur, sans réellement se décider pour des ellipses. J'ai eu l'impression que Balzac se livrait à un roman expérimental, pour voir jusqu'où pousser son présupposé : que se passerait-il si un jeune homme d'une grande science rencontrait une jeune fille totalement ignorante ? Quelle sorte d'amour parfait pourraient-ils connaître ? Et surtout, en quoi l'éloignement du monde favoriserait-il l'émergence de ces deux belles âmes ? Peut-on empêcher le destin, qui a uni leurs routes par toutes les similitudes de vie qu'ils ont eues, et si oui, avec quelles conséquences ?

Et puis, c'est Balzac, alors ne nous attendons pas à une brûlante romance ici, mais bien plutôt à un essai sur les correspondances entre le destin, la musique, la religion, l'amour, en un vaste et sublime fondu enchaîné, une réflexion toujours plus pointue sur les facultés insoupçonnées de l'âme. Quant au style, c'est encore Balzac, même s'il écrit ici en une veine subtilement baroque, toute d'antithèses entre douceur et violence, jour et nuit, bonheur et mélancolie, mais toujours avec de puissantes formules et ce sens maîtrisé du détail qui fait vie, de la peinture minutieuse et contrastée des émotions qui fait art.
Commenter  J’apprécie          173



Ont apprécié cette critique (17)voir plus




{* *}