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Critique de LaForceduTemps


Lorsqu'il laisse aller sa plume au fil des associations d'idées, peut aligner de brillantes réminiscences dans la tradition des «je me souviens» de Georges Perec

Une mémoire infaillible, donc, pour tout ce qui concerne les passions de l'auteur, et elles sont nombreuses: le sport, on l'a vu, mais aussi le cinéma, les spectacles et la littérature. Mais dès lors qu'il s'agit d'évoquer son père, Olivier Barrot se perd dans les brumes très modianesques de l'oubli et prend soin de préciser que ce qu'il raconte n'est qu'«un vague souvenir»…

Le père n'était pas bavard, mais n'allez pas imaginer qu'il n'avait rien à dire. le portrait qu'en brosse Olivier Barrot le fait entrer dans la catégorie des glorieux timides, ces premiers de la classe qui semblent encombrés par leurs médailles et leurs prix d'excellence. Cet homme, en effet, avait tout lu ; il avait gagné l'amitié d'éminentes personnalités du monde du cinéma et de la littérature ; il avait été un résistant actif pendant les années de guerre.

Bref, il n'avait rien à cacher, et avait même toutes les raisons d'être fier de son parcours. Et si son silence assourdissant était à rechercher dans les origines? C'est une piste que propose sans s'appesantir l'auteur, en notant que son père est né Bloch et qu'il choisit le porter le nom de Barrot, bien avant la guerre, pour des raisons inconnues…
Un lecteur talentueux

L'auteur multiplie les exemples de la réserve taciturne de son père.
Enfant, il a vu plusieurs fois le cinéaste Roberto Rossellini, venu en ami chez ses parents. Il se souvient avec précision des conversations qu'il a eues avec l'auteur de «Voyage en Italie», et cela, au lieu de le réjouir, l'attriste:

«Comment se fait-il que je me souvienne de conversations avec Rossellini et d'aucune avec mes parents?»

Olivier Barrot garde en revanche le souvenir ébloui de soirées prolongées aux cours desquelles son père lisait à toute la famille, en «mettant le ton», de belles pages de la littérature universelle, parmi lesquelles des extraits de la trilogie de Pagnol. Un père silencieux dans l'intimité, mais qui devient extraverti dès lors qu'il s'agit de jouer un rôle. L'écrivain l'affirme: son père avait un talent exceptionnel, très supérieur à celui de Raimu!

À l'issue de ce voyage intime et périlleux dans les souvenirs liés au père, l'auteur ne sera pas plus avancé dans sa connaissance de celui qui a emporté avec lui son mystère. le paternel est parti avec ses secrets ; mais en avait-il, des secrets? Rien n'est moins sûr… Reste l'évocation d'une vie, celle de l'auteur de ces pages. Olivier Barrot, en contrepoint de son enquête infructueuse, nous fait partager les moments forts de son activité de journaliste.

Une existence riche en voyages, lectures et rencontres. Nous croisons ainsi Jorge Semprun et Jean d'Ormesson, Pierre Tchernia et Jean-Pierre Vernant, d'autres encore, moins connus mais non moins attachants. Ces rencontres avec des hommes remarquables ponctuent agréablement le récit d'Olivier Barrot et montrent que le journalisme, lorsqu'il est pratiqué avec talent, peut devenir de la littérature.
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