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Critique de jovidalens


Ce n'est pas une préface qui ouvre cette bande dessinée, c'est un avant-propos où les deux auteurs expliquent leur démarche, leur rencontre, en résonance avec un précédent ouvrage. Ici, c'est Edmond Baudoin; qui n'a fait que "coller le personnage du père sur quelque chose qui était déjà dessiné." par Céline Wagner.
Ce quelque chose déjà dessiné c'est la banlieue d'une grande ville ou plutôt l'arrivée à ces villes passant par des centres commerciaux qui se ressemblent tous : les successions de panneaux publicitaires, les mêmes enseignes, les mêmes voies rectilignes et les mêmes mobiliers urbains. Et tout ce flot de voitures...
La bonne idée c'est que Céline Wagner dessinent des structures vides : les galeries commerçantes ne sont qu'enfilade de vitrines peuplées d'objets, d'affiches. A part un petit groupe de jeunes rigolards, ce sont des pantins qui poussent en foule des caddies. Les êtres humains sont curieusement absents, ou plutôt "on" ne les voit pas/plus. Etrange lieu peuplé d'animaux les vrais, les vivants comme ce vautour perché sur un panneau publicitaire, ou ces rats donnés en pâture au boa et les peluches, jouets de tissu dont on voit les coutures, enseignes représentants d'autres bêtes souriant presque aussi bêtement que ces femmes placardées.
C'est une petite fille qui va faire les courses avec son papa avant de rentrer à la maison. Et il n'y a que ces deux là de vivant pour de vrai dans cette histoire. C'est l'occasion de parler de la vie et de la mort, de la peinture et de ce besoin de créer , de peindre au coeur des humains depuis des milliers d'années. Et la petite se rebelle de voir le marchand donner un rat vivant à engloutir au boa mais pourtant, chacun doit se nourrir, vivre...et mourir. Son papa aussi et elle aussi sont l'un comme l'autre destinés à mourir mais il leur reste des dizaines d'années ; des années pour grandir avec des rêves plein la tête et elle s'imaginera chevauchant un dauphin, se demandant si...
Et le gorille dans tout ça ? Le gorille c'est aussi un grand singe, si semblable à l'homme. Un énorme gorille de plastique décore le centre commercial et le papa lui raconte une histoire d'un drôle de petit homme qui se logerait à l'intérieur. Vrai ? pas vrai ? Devenu grande elle ira vérifier. Vérifier ? La belle idée d'une présence intelligente habitant une énorme stature massive et scellée au sol, comme la flamme de la création au fond d'une caverne ?
Edmond Baudoin aime parler de cette douce relation entre un papa et sa petite fille, avec des mots légers, avec des dessins d'oiseaux et de grands espaces quant à Céline Wagner elle réussit à insuffler de la poésie dans ses dessins d'agglomérations périurbaines plus cité-dépensoirs que cité-dortoirs.
C'est un vrai bonheur de lecture cette bande dessinée, qui donne envie de revenir en arrière, en avant, pour détailler une planche, pour plonger dans le regard vide (vide ?) du grand singe, de ressentir et le piquant de la barbe de papa ou le soyeux lumineux des cheveux de l'enfant, ou le pelage épais d'un animal.
Décidément, ils se sont bien trouvé ces deux là !
Quand la Masse critique nous offre une plongée dans le rêve.
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