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Critique de afriqueah


L'introduction, avec le concert à Cologne de Keith Jarreth m'a tout d'abord intriguée et intéressée. Puis j'ai compris, ce que nous dit clairement le titre, que le fils Amine d'un père taiseux était devenu pianiste par frustration et une sorte de compensation : remplacer les mots absents par les sons.
Car Amine ne voit plus son père depuis vingt-deux ans, et c'est lorsque celui-ci meurt qu'il revient à Trappes :
« Ce deuil n'est pas le mien. Pour pleurer quelqu'un, il faut l'avoir aimé. »
Et s'il ne parlait pas, ce père, c'est qu'il n'avait rien à dire, pense-t-il.
Puis Amine trouve des cassettes cachées, dans lesquelles son père parle à son propre père. Paroles envoyées par courrier, ou gardées, comme lorsqu'on écrit une lettre en se gardant bien de l'envoyer.
le fait est que le fils et petit-fils découvre tout un monde, des relations basées sur l'obéissance, la volonté de cacher son mal-être, de la part du fils parti du Maroc pour travailler dans les mines de charbon du Nord de la France, et pétries de religion musulmane, comme l'interdiction de se marier avec une Française non musulmane de la part du père.

J'étais persuadée que les Polonais seuls s'étaient confrontés au grisou, à la silicose dans le bagne des Houillères  et avaient pour cela bénéficié d'une petite maison pour abriter les pauvres survivants. Ils sont considérés comme l'exemple même de l'intégration réussie d'immigrés, gardant leur langue à l'intérieur des maisons, priant dans leurs propres églises, et se considérant comme Français.
Intégration, pas assimilation.
Or, non, les Marocains ont été recrutés sans savoir qu'au départ ils seraient casseurs de grève, donc haïs de leurs camarades. Leur statut des Marocains commence mal : pas d'avantages sociaux comme en ont connu les Polonais.
Juste une douche chaude.
le père s'est tu pour que le fils pianiste ne vive pas dans cet enfer, qu'il ne ressente aucune amertume ni rancoeur.
Cela, Amine va le découvrir peu à peu, en parlant avec les anciens amis de son père après sa mort, qui tous ont un souvenir ému de leur camarade.
Amine découvre aussi une cassette de ce fameux concert à Cologne où Keith Jarrett improvisait sur un sale piano.
Stop.
Ce père aimé, adulé par ses camarades, s'est enfermé dans le mutisme lorsque son fils ainé est mort : pas de vagues, surtout. Il n'est pas intégré mais ne veut pas manifester, ce qui provoque la fureur d'Amine. Il accepte de ne pas se marier avec la femme qu'il aime, donc Amine apprend qu'il est l'enfant de ce refus, ou plutôt de « l'acceptation de mon père des ordres de son propre père. »
Ce père qui souffre de l'absence d'Amine, mais n'est pas capable de lui dire. Qui préfère ses potes, qui préfère Keith Jarett.
Si Rachid Benzine a écrit : « les silences des pères » pour montrer l'amour paternel, personnellement, je n'y crois pas une seconde.
Au risque d'aller complètement à l'encontre de presque toutes les chroniques très positives, pas une page ne m'a émue. Les personnages m'ont semblé ne dire que des banalités concernant le père.
Enfin aucun sentiment ni amical, ni paternel ne m'a fait vibrer.
Peut-être d'ailleurs que le propos de Rachid Benzine est de nous révéler l'immigration ratée de ce père marocain, resté au pays de son père et sous ses injonctions, gardant pour lui le malheur de ne pas pouvoir s'intégrer.
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