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Critique de Enroute


Selon Bibo, les Etats qui se trouve à l'Est du Rhin éprouvent de très grandes difficultés, depuis que le phénomène s'est diffusé depuis les Etats centralisateurs de l'ouest, à maintenir des frontières historiques et à y instaurer respectivement une unité communautaire. Celles-ci sont systématiquement remises en causes par des frontières linguistiques et ethniques. Une nette perception de la nécessité pour cette partie de l'Europe à s'organiser sur des frontières linguistiques aurait évité les siècles de guerres et de déstabilisation politique que l'Europe centrale et orientale ont connus. Au contraire, le concert des nations, l'Empire des Habsbourg, les traités sur la Pologne, la demi-unité allemande de Bismarck, mais aussi l'aveuglement des trois grands Etats de l'est (Pologne, Hongrie et Bohême) ont imposé des frontières historiques qui ont composé un cadre de tensions et de déstabilisations perpétuelles. Les définitions arbitraires des frontières de ces Etats ont créé auprès de leur population un sentiment de créance vis-à-vis du reste de l'Europe, une grande instabilité intérieure et, en compensation, de fortes affirmations identitaires, à la fois en interne par la répression des minorités et en externe par des ambitions d'expansion territoriales chaque fois que l'occasion s'est présentée. En Allemagne, le partage des peuples allemands entre l'Allemagne et l'Autriche qui voulait rester allemande, a abouti, en cinq gouvernements-impasses, au même processus autoritaire et hystérique. L'hystérie se caractérisant par le refus de voir la réalité - ou l'incapacité de la voir - et la tentative de résolution de problème par des méthodes inadaptées. L'hystérie développe un ego surdimensionné, un refus de la démocratie qui est perçue comme déstabilisante puisque les autorités ont le sentiment de ne pas maîtriser les minorités (la peur qui tue la démocratie et instaure les régimes autoritaires), et crée des ambitions mégalomaniaques. Ne traitant pas le problème de fond qui est l'unité linguistique du "grand" peuple allemand et de chacun des peuples d'Europe orientale, la moitié orientale du continent s'est enfermée dans une impasse qui a retardé l'émergence de la démocratie, a abouti à la seconde guerre mondiale, et continue de poser d'innombrables incertitudes sur son avenir (les textes datent de la fin et de l'immédiate après-guerre).
Le point de vue est original et présente une variante de la thèse fréquemment soutenue du problème des "nationalismes" au XIXème siècle, sans que ce terme ne soit véritablement défini. Bibo donne, dans une réflexion d'ensemble, une interprétation intéressante de la manière dont ce "nationalisme" a pu être caractérisé à l'est, et de l'inanité des revendications politiques nationales qui ne sont que la subversion de revendications identitaires.
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