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Critique de brigittelascombe


"Désormais tu vas devoir jouer tout seul Douglas".
Cette constatation concernant le cricket, que Douglas ne pratiquera plus avec son jumeau Mardsen tué accidentellement par leur père d'une balle de cricket, prend des allures de sentence, alors qu'ayant perdu son "âme d'ancrage", c'est le dur jeu de la vie qu' affrontera, cet adolescent, en solitaire.
Cette famille blanche aisée d'origine anglaise (aux "belles idées libérales") heureuse au Cap, en Afrique du sud, se retrouvera brisée du jour au lendemain. le père, journaliste, terrassé par le chagrin, les quitte et tel le vieil homme et la mer d'Ernest Hémingway, ira pêcher un hypothétique poisson et des bribes de roman, à moins qu'il ne se noie dans sa propre culpabilité. Plus de surf, mais la terre aride du Karoo "le bout du monde". Plus de mère enseignante et responsable, mais une peintre dépressive qui peint des nus noirs et se fait rabrouer par un austère révérend. Plus d'école libérale, mais des élèves aux cranes rasés qui insultent ("sale pédale": vu ses cheveux longs de surfer) ce "kaffirboetie" ("ami des Nègres"),lui jouent de mauvaises blagues et des professeurs aux coups de baguettes faciles. Plus d'humanisme mais le racisme des Afrikaners, l'apartheid et la violence au quotidien.
Heureusement,il y a l'esprit qui "vagabonde" de souvenirs heureux en lectures complices, il y a l'amitié d'un vieux pompiste noir sans papiers, ancien mineur grugé qui "vient du pays de Nelson Mandela" et leurs rêves d'évasion communs dans une "Volvo clocharde" retapée en "beach buggy". Heureusement il y a les premiers émois avec Marika "la fille aux pieds nus" qui surmonte sa peur de ces violeurs de "Nègres" (inculquée par son père ségrégationniste) et sa terreur de ce même père qu'elle hait .
Heureusement, ce "déjumelé" passera (non sans mal mais avec courage) les épreuves initiatiques du jeu cruel de la vie pour devenir un homme et....écrire un roman qui sait?
Karoo Boy, premier roman de Troy Blacklaws (qui a grandi au Cap et a enseigné la littérature à l'étranger) est une réussite. Cette tragédie, bourrée d'émotions,de superstitions,de préjugés à combattre, est captivante et émouvante. le lecteur a l'impression de se brancher sur les pensées de cet ado perdu et en manque de père et de frère.De plus la trame historique est intéressante car le lecteur s'aperçoit de la violence réciproque engendrée par l'apartheid de ces années fin 70 (époque où certains Blancs se croient encore au temps de l'esclavagisme et où le Noir, dit "foutu Nègre", toujours soumis mais révolté d'être tabassé,humilié ou harcelé appelle les Blancs "Maître" mais passe parfois sa violence à organiser des combats illégaux de chiens contre babouins).
Situé à une autre époque (deuxième guerre mondiale), les lecteurs intéressés par les problèmes d'apartheid et l'implantation des Afrikaners sur le sol africain,pourront lire: Mathilda de Valéry Giscard d'Estaing, un excellent roman qui se déroule en Namibie, alors que l'administration allemande avait attribué des terres aux colons allemands et que les Noirs étaient considérés comme des êtres inférieurs.
Bon, pour en revenir à Karoo Boy: c'est un cinq étoiles à la sensibilité palpable. On dirait du vécu!
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