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Critique de Zippo


La campagne d'Egypte : une expédition entre conquête et connaissances. C'est la définition exacte de cette expédition. C'est d'ailleurs le nom donné à une exposition qui s'est tenue, au printemps 2000, au Museo Napoleonico de Rome.

Jacques-Olivier Boudon, président de l'Institut Napoléon, et dont j'ai eu la chance d'assister à plusieurs de ses conférences dans divers colloques napoléoniens, nous présente ici une oeuvre majeure. Il a le grand mérite de nous présenter une relation précise, solidement étayée, tant au niveau militaire, que scientifique et artistique. de plus un autre intérêt à ce livre : la présence constante de témoignages des participants de cette expédition (militaires, savants et artistes). Nous vivons, au plus près, la dureté du climat, l'âpreté des combats subies par les soldats, sous-officiers et officiers. Nous côtoyons des savants et des artistes qui découvrent l'Egypte en suivant les troupes et qui s'enthousiasment. du moins dans les premiers temps, car les souvenirs et correspondances, tant des militaires que des civils, font ressortir, après des mois en Egypte, une certaine lassitude et le fort de désir de revenir en France.


Cette campagne sera une étape décisive pour beaucoup de jeunes officiers qui connaîtront une carrière extraordinaire au cours de l'Epopée impériale.
Pour la fine fleur des sciences françaises de la fin du XVIIIème siècle (Monge, Berthollet, Geoffroy Saint-Hilaire…) ce sera l'occasion d'accomplir des recherches. Sans oublier les ingénieurs et les artistes.

L'expédition part de cinq ports en mai 1798 : Toulon, Marseille, Gênes, Civita Vecchia et Ajaccio. Malte est prise et une garnison y est installée.Malgré Nelson qui sillonne avec sa flotte la Méditerranée en tous sens, la flotte française arrive devant Alexandrie. Puis c'est la marche vers le Caire.

Après les guerres de Vendée et avant la guerre en Espagne, l'armée française est confrontée à une guerre qui n'est pas faite que de batailles rangées, mais aussi de nombreuses embuscades.

Au sujet des duretés de cette campagne, impossible de ne pas citer ce témoignage de Galland : "Un soldat vit succomber un de ses camarades ; inquiet il regardait autour de lui et épiait le moment où il ne serait vu de personne pour égorger son ami et se désaltérer de son sang."....finalement, il y renoncera.

Bien que ses soldats soient ceux d'une France révolutionnaire et déchristianisée, Bonaparte exige de ses troupes le respect absolu de l'Islam.
Lors de sa campagne précédente, en Italie, Bonaparte avait imposé à son armée le même respect pour les catholiques et les juifs.
Tout en respectant le Coran, Bonaparte insuffle un vent de modernité à la société égyptienne.

Le 1er août 1798, la flotte française est détruite par les Anglais dans la baie d'Aboukir.

La poursuite de Mourad Bey, chef mamelouk, est un des grands faits d'armes du général Desaix qui trouvera la mort à Marengo le 14 juin 1800. Au cours de cette poursuite, les soldats découvrent, émerveillés, Thèbes. Laissons le capitaine Desvernois nous relater cet enthousiasme : "A l'aspect de ces ruines gigantesques, de ces vastes et nombreux débris qui occupent une si grande place dans l'histoire de l'Antiquité, tous les rangs de la division retentirent d'applaudissements."

Bonaparte suit les traces de l'ancien canal reliant la mer Rouge à la mer Méditerranée, l'argent manquant, impossible de le reconstruire. C'est sous le Second Empire, en 1869, que le canal de Suez sera inauguré.

La campagne se poursuit en Syrie, où les Ottomans menacent les Français. Une force de 10.000 hommes, commandée par les généraux Kléber et Reynier, y est donc envoyée, avec une cavalerie de 1.000 hommes sous les ordres de Murat. Et c'est à nouveau les duretés d'une traversée du désert, avec et toujours le manque d'eau. le témoignage du lieutenant Laval : "J'ai vu dans cette marche des frères grenadiers dans le 32ème régiment, s'écarter de la colonne pour s'aller tuer eux-mêmes, disant : "Nous avons trop souffert"."

Puis c'est la prise d'El Arich et la marche vers Gaza. La peste à Jaffa : une moyenne de trente soldats meurent quotidiennement.

En mars 1799, Bonaparte assiège Saint-Jean d'Acre. Après plusieurs assauts infructueux et meurtriers, il lève le siège. le 19 avril 1799, c'est la victoire du Mont-Thabor. Et la victoire terrestre d'Aboukir, le 25 juillet 1799, où Murat et Lannes s'illustrent. Eugène de Beauharnais, tout jeune beau-fils de Bonaparte, est présent aux côtés de Lannes lors de cet affrontement.

Ayant reçu des nouvelles alarmantes de France, où les situations politique et militaire se dégradent, Bonaparte (accompagné de Murat, Berthier, Marmont, Lannes et Andreossy) quitte l'Egypte, le 18 août 1799, et arrive à Paris le 16 octobre. Il laisse le commandement à Kléber qui sera assassiné au Caire le 14 juin 1800. Ce général sera victorieux à la bataille d'Héliopolis le 20 mars 1800. Puis c'est le général Menou qui lui succède.

Face à l'importance des forces anglo-turques, c'est la fin de la campagne à l'été 1801. Les troupes françaises rembarquent dans différents ports d'Egypte.

Les Anglais confisquent aux savants français la pierre de Rosette (exposée depuis au British Museum) qui a été découverte par un soldat français le 15 juillet 1799. En 1822, Champollion parvint à en déchiffrer les hiéroglyphes.

Mais, l'influence de Bonaparte et des Français, au-delà, des résultats mitigés de cette campagne, perdurera à travers Méhémet Ali qui gouverne l'Egypte de 1804 à 1849 et la modernise en se servant des idées de Bonaparte...la modernisation de l'Egypte au XIXème siècle a donc été très influencée par Bonaparte.

C'est un livre dense : nous côtoyons la cruauté, l'âpreté des combats, des longues marches, mais nous entrevoyons également les aspects positifs de cette expédition.

Jacques-Olivier Boudon nous offre un livre très vivant qui nous fait vivre, charnellement et spirituellement, cette aventure.

Un ouvrage qui fera date sur le sujet.

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