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Critique de Ahoi242


La start-up Koober - https://koober.com/fr/ - propose de « sélectionner les meilleurs livres » et « les livres les plus cools » (sic) du moment afin que ses « auteurs en extraient l'essence » (re-sic) afin de livrer des « résumés clairs et didactiques » (re-re-sic) des « livres que vous devez avoir lus » (re-re-re-sic)*. La start-up s'adresse à un public d'étudiants, de chercheurs ou de personnes trop pressées pour lire auxquels elle permet de lire des livres de 500 pages en vingt minutes. Parmi les livres les plus lus du moment, on trouve un livre de Timothy Ferriss, La semaine de 4 heures. Travaillez moins, gagnez plus et vivez mieux ! Je ne sais pas ce que les lecteurs feront de toute cette économie de temps… peut-être liront-ils dans leur intégralité des livres de 500 pages ! Il y a même un Koob de « How to Read a Book » de Mortimer J. Adler et Charles van Doren !!!

Il y a aucune chance de trouver L'étranger d'Albert Camus sur le site de Koober. Les livres proposés appartiennent à des catégories comme marketing, développement personnel, management et leadership, économie ou performance. Les étudiants, les chercheurs ou les personnes trop pressées pour lire ne lisent certainement pas des romans - c'est un des tristes constats de François Dupuy dans Lost in management: Tome 2, La faillite de la pensée managériale lorsqu'il note que « Ce qui permet de prendre de la distance par rapport à soi-même, à ses sentiments partisans, à l'immédiateté, ce qui rend possible de prendre du recul, c'est la culture générale. Et celle-ci fait cruellement défaut à la population des cadres. »

Ce n'est pas bien grave car il existe nettement mieux et plus efficace que Koober. Ce service date de 1978 et les 191 pages de L'étranger sont résumées en 2'22. Ce résumé, c'est la chanson « Killing an Arab » (sur l'album « Starring at the beach ») de The Cure.

Voici donc le résumé :

« Standing on the beach

With a gun in my hand

Staring at the sea

Staring at the sand

Staring down the barrel

At the Arab on the ground

I can see his open mouth

But I hear no sound 

I'm alive

I'm dead

I'm the stranger

Killing an Arab
I can turn 

And walk away

Or I can fire the gun

Staring at the sky

Staring at the sun

Whichever I chose
It amounts to the same

Absolutely nothing

I'm alive

I'm dead

I'm the stranger

Killing an Arab

I feel the steel butt jump

Smooth in my hand

Staring at the sea

Staring at the sand

Staring at myself

Reflected in the eyes

Of the dead man on the beach

The dead man on the beach

I'm alive

I'm dead

I'm the stranger

Killing an Arab »

Cette chanson n'est pas vraiment un résumé du livre mais davantage les émotions de Robert Smith, le chanteur et leader du groupe, à la lecture du livre de Camus. À l'époque, The Cure envoyait à la presse un exemplaire de L'étranger pour expliquer que la chanson n'était pas raciste mais une libre interprétation de l'oeuvre du prix Nobel de littérature de 1957. Régulièrement - pendant la Guerre du Golfe par exemple -, cette chanson posera des problèmes à The Cure et Robert Smith la reniera même car elle sera perçue comme raciste. The Cure l'adaptera en « Kissing an Arab », « Killing another » ou même « Killing Kevin Keegan » quand le grand Nottingham Forest affronta le Hamburger Sport-Verein e.V. en finale de la Coupe des Clubs Champions de l'année 1980 dans laquelle l'anglais Kevin Keegan jouait.

Cette dernière version de la chanson de The Cure permet de revenir à Camus dont l'intérêt et la passion pour le football ne sont plus démontrer. Élèment du cycle de l'absurde avec l'essai, le Mythe de Sisyphe, et les pièces de théâtre, Calligula et Le malentendu, L'étranger est aujourd'hui le roman le plus connu de Camus. C'est un bon roman doublé d'un bon souvenir de lecture mais qui ne surpasse pas pour moi le Mythe de Sisyphe avec ce sommet dès la première phrase « Il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux : c'est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie. Le reste, si le monde a trois dimensions, si l'esprit a neuf ou douze catégories, vient ensuite. Ce sont des jeux ; il faut d'abord répondre. Et s'il est vrai, comme le veut Nietzsche, qu'un philosophe, pour être estimable, doive prêcher d'exemple, on saisit l'importance de cette réponse puisqu'elle va précéder le geste définitif. Ce sont là des évidences sensibles au coeur, mais qu'il faut approfondir pour les rendre claires à l'esprit ».

* Dans ce paragraphe, les parties en parenthèse proviennent du site de Koober.
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