Fille de Sparte
Il y a des périodes comme ça où le hasard nous fait accoster sur des rivages semblables : c'est mon cas, en ce moment, j'ai l'impression d'être irrésistiblement attirée vers ceux de la mythologie grecque ! Je reconnais que c'est un thème qui m'a toujours intéressée et il y a de plus en plus de romans qui mettent en avant des personnages qui en sont issus.
Cette fois, c'est l'histoire de
Clytemnestre qui est contée par
Costanza Casati.
Je l'avais totalement oubliée
Clytemnestre… Pourtant, quel destin !
Elle est née princesse de Sparte, fille de Tyndare et de Léda. Elle a deux frères, Castor et Pollux, et quatre soeurs, dont Hélène, que la légende dit être née du viol de Léda par Zeus lui-même. Lorsque sera venu le temps de convoler, Hélène, la belle Hélène, choisit Ménelas, tandis que
Clytemnestre épouse, par amour, Tantale, Roi de Méonie, dont elle aura un petit garçon.
Mais le bonheur de Clytemnestre n'est que de courte durée : Tantale est assassiné par Agamemnon, frère de Ménelas. Pour faire bonne mesure, il tue aussi le bébé, laissant Clytemnestre inconsolable. Pourtant, son père a scellé son destin et elle devra épouser Agamemnon et partir à Mycènes, royaume sur lequel elle va désormais régner et où son destin prendra une dimension tragique avec la guerre de Troie.
Les deux premières parties sont centrées sur l'enfance et l'adolescence des princesses de Sparte (elles étaient élevées pour combattre et pour être libres… sous certaines conditions toutefois !) et sur leurs mariages. C'est à partir de la troisième partie que la dramaturgie s'installe et que la tension monte inexorablement. La prophétie faite à Sparte par la prêtresse va se réaliser « Les filles de Léda se marieront une deuxième et une troisième fois et délaisseront leurs époux légitimes »… Hélène va s'enfuir à Troie avec Pâris, provoquant la guerre qu'on connaît. Et
Clytemnestre ?
Agamemnon, son deuxième mari, est le commandant suprême de la flotte grecque. A Aulis, tous les grecs attendent désespérément que les vents soient favorables pour embarquer vers Troie. Quoi de plus approprié qu'un sacrifice pour amadouer les Dieux et obtenir un vent favorable ? Agamemnon informe Clytemnestre qu'il vient de conclure le mariage de leur fille Iphigénie (l'aînée de leurs quatre enfants et la préférée de Clytemnestre) avec Achille. Les voici toutes deux à Aulis mais point de mariage pour Iphigénie : c'est elle qui sera sacrifiée, égorgée par son propre père… On ne peut qu'imaginer le chagrin incoercible de Clytemnestre et sa soif de vengeance inextinguible… Elle va attendre patiemment le retour de son mari de la guerre, pendant près de dix ans, au cours desquels un événement d'une importance capitale va se produire. A Mycènes, Egisthe, cousin d'Agamemnon, est de retour, lui le prince régicide (il avait tué Atrée le père d'Agamemnon et de Ménélas, un très sale type, les chiens ne font pas des chats…) le prince déchu, le prince exilé, avide lui aussi de vengeance, il sera l'instrument de Clytemnestre…
J'ai beaucoup aimé ce roman, et le personnage de
Clytemnestre, à la fois actrice de l'Histoire, et jouet des Dieux de l'Olympe, beaucoup moins connue que sa soeur Hélène.
Costanza Casati retrace magnifiquement cette femme exceptionnelle sans occulter ses failles et ses aspects les plus sombres.
Ce roman est violent, sanglant même, reflétant une période tragique. Les personnages masculins ne sont pas à leur avantage, c'est le moins qu'on puisse dire (à part Tantale) : les Atrées, cruels et sanguinaires, Ulysse rusé et perfide… Ce sont les femmes qui mènent la danse de ce monde antique à mi -chemin entre l'Histoire et le Mythe mais elles en paieront le prix fort.
Très belle découverte, passionnante et passionnée.