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Critique de kristolikid


Bagatelles pour un massacre conduit une charge d'une grande violence contre les juifs. le style accusatoire, agressif, elliptique qui forme l'oeuvre de Céline, donne ici à son antisémitisme une allure de réquisitoire implacable et d'appel au peuple à agir contre les juifs.

La logique de l'auteur est la suivante : le juif est par nature belliciste (« pousse-au-crime » et « mégalomani[aque] conquérant[] »). Ses desseins : anéantir le peuple chrétien (et/ou « aryen ») au moyen des deux complots ; le judéo-bolchévisme et le judéo-capitalisme (Marx contre Rothschild). de cet affrontement, selon Céline, une guerre mondiale éclatera et verra triompher les juifs contre les aryens, espèce déclinante. Il justifie la possibilité d'un tel complot par l'existence d'une élite mondiale (notamment franc-maçonne) travaillant à « l'impérialisme » et « l'hégémonie juive » (Protocoles des Sages de Sion). A ce titre Céline accuse les juifs d'être racistes.

Céline a beau s'excuser par avance : « J'ai rien de spécial contre les Juifs en tant que juifs, je veux dire simplement truands comme tout le monde, bipèdes à la quête de leur soupe... Ils me gênent pas du tout. (...) Mais c'est contre le racisme juif que je me révolte, que je suis méchant, que je bouille, ça jusqu'au tréfonds de mon benouze !... ». Ça ne tient pas à l'épreuve des pages.

Car au rebord de cette accusation de belliciste, une autre face de l'antisémitisme de Céline se dévoile ; une attaque viscérale, ontologique. le juif fossoyeur de la culture, le juif arrogants, dominateurs, despote, le juif dans le délire de persécution, de martyr, maître-chanteur qui « vaporise toute objection possible », le juif-envahisseur, juif-rôdeur « autour du pot-au-feu » de l'aryen, ou encore le juif laid, physiquement repoussant, le juif nègre, etc. L'attaque menée par Céline contre les juifs est multiple, profonde, totale.

On s'étonnera de voir Céline-géopoliticien ne faire aucune mention du diktat imposé à l'Allemagne, de la misère sociale du peuple allemand de 37, de la remilitarisation de la Rhénanie en 36 ou encore des velléités pangermanistes d'Hitler. Céline prédit une guerre des européens... sans les européens.

Bien péniblement, au milieu de ce galimatias, filtrent quelques épisodes qui rendent la lecture possible : l'écriture des ballets, les assemblées générales de la S.D.N., les hôpitaux en URSS, la critique littéraire et les écrivains contemporains, sa visite de Leningrad. Un épisode en particulier fait sourire : Céline attribue la crise du livre en France (les français sont ceux qui dépensent le moins pour les livres) aux records de consommation d'alcool en France (davantage que tous nos voisins). Céline fait ici un paralogisme sans conséquence, il agite sa marotte sur dix pages, et c'est divertissant de le suivre.

Dommage qu'il n'en soit pas resté à bricoler avec ses bouts de ficelles, et que son antisémitisme viscéral ait trouvé à se déverser lorsqu'il s'est penché sur les problèmes du monde, ou comment un homme farouchement opposé à la guerre a pu faire le lit d'un idéal de destruction humaine.
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