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Critique de mercutio


Le traité des devoirs est le dernier ouvrage écrit par Cicéron en 44-43 (César est mort en 44).
L'auteur justifie l'importance du sujet:
"Des nombreux sujets philosophiques importants et utiles, qui ont été, de la part des philosophes, l'objet de discussions attentives et abondantes, celui qui paraît avoir la portée la plus vaste est dans l'enseignement et les préceptes qu'ils donnent sur les devoirs. Qu'il s'agisse des affaires publiques ou privées, des affaires de forum ou de celles de la maison, dans la discussion avec nous-mêmes ou dans nos rapport avec autrui, il n'est aucune partie de notre vie qui soit soustraite au devoir; c'est à s'en acquitter que consiste la beauté de la vie, et à la négliger, la laideur."
On appréciera, en passant, l'évolution des préoccupations de nos penseurs en rapprochant -un peu arbitrairement, j'en conviens- cette déclaration de celle que 2000 ans plus tard, Camus commet dans le Mythe de Sisyphe « Il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux : c'est le suicide. »
O tempora, o mores!

Cicéron expose comment, selon la doctrine stoïcienne pour qui l'homme doit vivre en conformité avec la nature et le souverain bien est la vertu, l'homme de bien doit se comporter dans la société de ses semblables et sous le regard bienveillant des dieux.
Constitué de trois livres, il s'inspire pour les deux premiers d'un ouvrage aujourd'hui perdu de Panétius (stoïcisme moyen) mais fait oeuvre totalement originale pour le troisième, suppléant en cela à ce qu'on suppose être la décision de Panétius de laisser son ouvrage inachevé.
Sont ainsi successivement discutées l'honnêteté, l'utilité et la résolution des conflits (apparents ou réels) entre ces deux critères que la vie sociale pousse à souvent devoir arbitrer.

L'honnêteté ou la convenance est une vaste notion agglomérant recherche de la vérité et sagacité, sens de l'intérêt général et justice, courage et grandeur d'âme, ordre et mesure.
L'utilité est, très généralement, ce qui permet aux hommes de pourvoir à leurs besoins et d'améliorer leur vie.
La thèse soutenue par Cicéron est que l'utile est nécessairement honnête: "Ils disent que ce qui est très avantageux devient honorable; non, il ne le devient pas, il l'est; car il n'est rien d'utile qui ne soit honnête, non pas honnête parce que utile, mais utile parce que honnête."
Cicéron soutient sa "démonstration" par de nombreuses références puisées dans l'histoire grecque ou romaine et relevant de multiples domaines (vie publique ou privée, politique, commerce, juridique, éducation,...). L'exemple de conflit, le plus marquant du débat et le plus attentivement analysé, est celui de Régulus, consul romain, captif d'Hamilcar, envoyé à Rome sous serment pour négocier la libération des prisonniers carthaginois, et qui déconseille cette libération au Sénat (alors qu'il pouvait ne pas émettre d'avis) puis retourne à Carthage en connaissant le sort qui l'attend. L'utilité (ou les avantages) de cette conduite mises en avant par Cicéron concernent d'une part la République "Ce qui est nuisible à la république peut-il donc être utile à un citoyen?" et la patrie "Il était du devoir de Régulus de ne pas ébranler par un parjure les conventions et les pactes qui existent dans la guerre entre les ennemis" ; d'autre part Régulus lui-même qui trouve avantage à avoir respecté son serment "y a-t-il un mal plus grand que la honte?". Diablement stoïcien!

Ces cas de conscience sont devenus au fil des siècles des lieux communs de réflexions éthiques et morales, mais j'ai trouvé utile et agréable de les rafraîchir, en puisant directement à la source.
Par bonheur, le style de cet ouvrage est clair et direct, le rythme alerte; on échappe aux incrustations rhétoriques qu'on peut trouver dans d'autres oeuvres de Cicéron. le fil directeur du traité manque quelquefois, dans le détail, de continuité mais le propos est toujours intéressant et la volonté de rigueur, marque de fabrique de l'auteur me semble-t-il, indéniable et appréciable.

Je devais cette reconnaissance au cher Marcus Tullius que j'avais un peu maltraité dans une autre critique.
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