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Critique de HordeDuContrevent


J'étais parée pour ce livre de hard science-fiction chinoise. Combinaison et lunettes spéciales SF afin d'ouvrir tous mes chakras, enfermée dans ma capsule en ce WE pluvieux. Je savais que ce tome 1 ne bénéficiait pas de critiques aussi bonnes que les tomes 2 et 3, voire qu'il pouvait franchement déplaire. J'avais conscience notamment que son côté scientifique pouvaient constituer un frein, surtout pour moi qui ne suis pas scientifique, que les différents noms et prénoms chinois pouvaient me perdre. Je savais tout cela. J'avais pris soin de ne pas lire la 4ème de couverture, et finalement je ne m'appuyais que sur le conseil dithyrambique (et précieux) de @christophe-bj (trilogie présente sur son île déserte), sur les critiques très bonnes de @paul-c et de @pdefreminville, critiques qui ont le mérite de ne rien dévoiler de l'intrigue. J'étais parée et bien parée sans savoir à quoi m'attendre. Je me suis juste laissé guider. Et l'ai lu presque d'une traite.

C'est l'histoire d'un feu que nous allumons puis que nous ne sommes plus en mesure de contrôler.

Un feu que nous allumons car nous n'avons plus foi en rien, plus foi en l'humanité : la révolution culturelle en Chine a été une source d'horreurs et de barbaries, tout comme les multiples guerres auxquelles se sont livrés ou se livrent encore les humains dans le monde entier, nos carences et contradictions sont sources de destructions : épuisement des ressources, absence d'harmonie avec la nature, notamment avec les autres espèces animales dont certaines ne cessent de disparaitre chaque année à cause de l'Homme : « La civilisation marche toujours sur le même sentier, celui de la destruction de toute vie sur Terre en dehors de la sienne ».

Un feu que nous allumons alors que nous vivons sur une planète extraordinaire, tempérée, sur laquelle les cycles réguliers sont éternels. Un feu que nous allumons car nous avons tendance à oublier la chance que nous avons, le paradis dans lequel nous vivons, toujours à rechercher un autre dieu, une main vengeresse. Un nouvel espoir.

Ne pas en dire plus mais vous dire plutôt ce que j'ai aimé dans cette lecture très inhabituelle pour moi :

- le scénario empli de mystères qui m'a tenu en haleine, je me réjouis par avance des tomes 2 et 3. Je trouve l'histoire originale, fluide, bien amenée et construite de façon passionnante. Il est vrai que je lis très peu de SF, je ne sais si cet enthousiasme est partagé par une personne férue de SF ayant l'habitude de scénarios proches. Personnellement je me suis régalée en sortant de mes sentiers battus et rebattus.

- La structure narrative basée, surtout au début du livre, sur l'alternance des points de vue entre Ye Wenjie, astrophysicienne brillante qui a subi, très jeune, les foudres de la révolution culturelle et Wang Mio, scientifique spécialisé dans les nanomatériaux. Ces alternances de point de vue permettent d'aborder le passé (la révolution culturelle chinoise par la voix de Ye Wenjie), le présent avec Wang Mia (qui est témoin de choses intrigantes et qui cherchent à comprendre) et le futur (avec les questions et les menaces qui pèsent désormais sur les humains) et permettant surtout aux différentes pièces du puzzle de s'imbriquer merveilleusement.

- La présence du jeu de réalité virtuelle des Trois corps qui donne des chapitres passionnants (j'ai beaucoup aimé le chapitre consacré à la constitution d'une carte-mère à l'aide d'une armée gigantesque de 36 kilomètres carrés) et de toute beauté notamment le paysage dévoilé à chaque fois que nous arrivons dans le jeu : « C'était toujours la même plaine baignée par la même aube mystérieuse et sur laquelle se dressait la même pyramide. Mais cette fois, le monument avait retrouvé une architecture plus orientale ».
Ce jeu permet même de dresser un panorama astucieux de l'histoire des sciences en convoquant des personnages comme Newton, Einstein, Aristote, Galilée, entre autres. Quelques allusions liées à l'histoire chinoise sont également subtilement insérées : « Lorsque le soleil se leva, les soldats se figèrent, comme un tapis géant composé de trente millions de soldats en terre cuite. Mais lorsqu'une nuée d'oiseaux ayant pris l'armée pour un véritable tapis vint voler à sa hauteur, les volatiles sentirent aussitôt la puissante odeur de mort qui se dégageait de sous leurs ailes. Saisis d'effroi, ils reprirent de la hauteur et tournoyèrent autour ».
Oui, j'ai vraiment aimé cette découverte d'une nouvelle culture par le biais d'un jeu de réalité virtuelle, moyen de propagation auprès de la population. C'est bien vu, superbement maîtrisé, et les différentes tentatives de résoudre l'énigme proposée sont passionnantes et très intrigantes.

- Les questions sociétales, environnementales, politiques voire philosophiques, multiples, qui émergent du scénario et que Liu Cixin amène avec beaucoup de pertinence. Place de l'humanité, rôle des religions, impact des actions humaines sur les autres espèces et sur la Terre, rôle, puissance et limites de la science, les extrémismes de tout bord côtoyant l'égoïsme, l'individualisme et le déni de l'intérêt général…


Bien entendu avoir des connaissances scientifiques est un plus pour cette lecture, mais ce livre ne nécessite cependant pas d'avoir des prérequis importants en matière de science pour savoir l'apprécier. Je n'ai pas tout compris dans les détails certaines explications mais je n'ai pas perdu le fil de cette histoire incroyable et les explications techniques ne m'ont jamais dérangée.
J'ai la sensation que ce tome 1 a posé brillamment les bases, telle une grande introduction, aux deux autres tomes. Deux autres tomes que je lirai avec un immense plaisir cet été. Comme pour le tome 1, il m'est d'avis qu'il faut les lire par bloc de 50 à 100 pages afin de ne pas être perdu par les noms chinois et la complexité des thèmes abordés.

Pour conclure cette critique, les derniers mots du livre lui-même : « À l'ouest, alors que les rayons du jour semblaient se fondre dans la mer argentée, le soleil fissura les nuages et sa clarté se répandit dans le ciel, l'illuminant d'une magnifique couleur rouge sang. — le crépuscule des hommes, murmura faiblement Ye Wenjie ».
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