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Critique de vibrelivre


Ces orages-là
Sandrine Collette
roman
JCLattès, 2021 , 280p


Ces orages-là sont de « larmes » et de « fureur ». D'abord il y a la sidération. Puis la joie surgit. C'est la libération, et définitive. le roman est ambigu (quoique le mot soit mal choisi, il n'est que de relire la quatrième de couverture qui parle d'un roman sur l'obsession, le tout est de savoir qui est obsédé, ou qui est le plus obsédé), vraiment très bien construit, dont on ne devine pas la fin, en tout cas moi, je ne l'ai pas devinée, je n'en ai même pas eu le soupçon. Déjà le livre est dédié à toutes les Clémence -le prénom a toute sa force de signification- et aux consolateurs, Gabriel peut-être qui a besoin d'être consolé et qui partage son prénom avec l'archange, ange gardien et défenseur. Une partie du nom de Gabriel signifie la force. Mais qui détient cette force ?
le prologue met en place le personnage de Clémence, la maigrichonne, la surdouée, qui veut être boulangère. Elle est une enfant de vieux, puis d'un divorce, puis d'une nouvelle vie à trois. Elle connaît tout à la fois violence et protection. C'est difficile, et ça pèse. Elle rencontre Thomas, d'apparence charmant, comme beaucoup de pervers semble-t-il, alors elle s'en va de la maison.
Thomas fait d'elle sa chose. Il l'a isolée totalement. Qui plus est, c'est un maniaque de la propreté. Et ce jeu stupido-érotique dans le bois, auquel il exige que Clémence joue, sous peine de mort ?Elle a ainsi appris à courir vite et longtemps, 13km/h tout de même. Sa très grande amie, Manon, qu'elle a réussi à garder, lui dessille les yeux sur ce qu'elle vit. Un jour, elle arrive à fuir. Elle trouve une maison (on verra que le choix du lieu a été mûrement pensé, même s'il n'est qu'à 13 km de l'immeuble de Thomas) laide, mais elle possède un jardin touffu avec un bassin contenant quatre poissons rouges et demi, demi parce que monstrueusement mutilé, mais qui fait encore la loi, une autre place de boulangère. Les collègues sont sympa. Mais elle ne se lie pas. Un peu plus cependant avec Flo qui lui propose en toute amitié de la protéger.
La scène du prologue est saisissante. Un personnage féminin, fille ou femme on ne sait, vêtue d'une seule culotte, fuit un prédateur qui la rattrape. La victime est sous son emprise. L'écriture rappelle le rythme de la chanson de Nougaro, A bout de souffle (Mais Clémence jamais ne l'est, à bout, bien qu'elle soit épuisée) et fait ressentir tout l'effroi de Clémence. Les phrases sont courtes, assez souvent elles ne se terminent pas, avec des mots parfois très familiers.
C'est l'histoire d'une reconstruction qui doit prendre du temps, et requiert de l'amour. Mais pas seulement. le lièvre, blessé par une voiture, n'a-t-il pas fallu le tuer pour qu'il arrête de souffrir ? On entre dans les pensées et les peurs de Clémence (le roman est introspectif et centré sur presque un seul personnage) qui fait des allers-retours dans sa vie avec Thomas, révélée ainsi par petits bouts. Car son voisin Gabriel, aussi maigre d'elle, et dévoré par un chagrin inconsolable, aide à sa reconstruction, et perçoit derrière sa très grande fragilité une force qui en paraît monstrueuse.
Quelques pages sont consacrées à la solitude des vieux, aux vies très routinières, il faut le dire, à la vacuité d'instants qui font voir la vraie vie, au portable envahisseur.
A la fin du roman, le rythme se ralentit. Une péripétie, comme un deus ex machina, se produit. Tout semble aller comme dans un rêve. du coup, l'attention du lecteur se relâche, et boum, l'inattendu est dévoilé.
C'est de l'art.
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