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Critique de leboncoinlecture


J'ai appris l'existence de ce livre, Immigrés de force : les travailleurs indochinois en France (1939-1952), grâce à la critique d'un Babelionaute sur la bande dessinée qui en a été inspirée, intitulée Mémoires de Viet-Kieu, traitant plus particulièrement des Indochinois ayant créé les rizières de Camargue dans les années 1940.
L'oeuvre de Pierre Daum traite plus largement de l'histoire de ces Indochinois à 95% réquisitionnés par la France pour "soutenir l'effort de guerre" en métropole (travailler au départ dans les industries de guerre, poudrerie etc., aux côtés des femmes, des quelques hommes qui n'étaient pas au front, et d'autres travailleurs immigrés venus des colonies, mais avec un statut moins annihilant que celui des Indochinois, qui étaient parqués dans des camps relativement insalubres, dont les rations alimentaires étaient volées par les officiers qui les revendaient au marché noir pour leur propre bénéfice, qui étaient payés littéralement une misère, j'en passe et des meilleures).
Pierre Daum se pose bien en journaliste et nous fait part de l'enquête qu'il a menée auprès de ces anciens travailleurs forcés et de leurs familles ainsi que des nombreuses recherches qu'il a effectuées, dans une suite de chapitres relativement courts, écrits dans un style clair et fluide (les faits évoqués étant illustrés par des extraits de témoignages), aux thèmes clairement identifiés dans les titres - j'ai eu le sentiment qu'il avait bien balayé tous les sujets en lien : évidemment la réquisition, le travail en France, la vie dans les camps, le retour au Vietnam ou au contraire l'établissement en France, l'organisation institutionnelle de ce dispositif, mais aussi le rapport à la population française, les relations amoureuses (beaucoup sont arrivés à peine âgés de 20 ans et la grande majorité n'était pas mariée), le point de vue des ces hommes arrachés à leur pays envahi par une puissance étrangère qu'ils voient luttant pour une part et collaborant d'autre part avec l'Allemagne nazie etc.
J'ai trouvé très intéressant et parfaitement ahurissant de voir à quel point ils ont été maltraités (considérés comme des indigènes par la très grande majorité des représentants de l'Institution, esprit colonial, quand tu nous tiens !) et transbahutés de ville en ville au gré des besoins mais aussi des sanctions dûes à leurs nombreuses actions de rébellions (souvent des grèves de la faim, pour réclamer une quantité de nourriture plus décente notamment), du temps passé privé de leurs droits les plus élémentaires et dans l'impossibilité de rentrer du fait de raisons géopolitiques diverses (ils ont passé en moyenne une dizaine d'années dans cette situation, qui s'est donc prolongée bien après la fin de la guerre !).
Encore une page peu glorieuse de notre histoire nationale que ce livre sort de l'ombre - à raison me semble-t-il.
La dernière partie de l'ouvrage rassemble la présentation de tous ces anciens travailleurs, précisant les conditions des rencontres avec le journaliste, rappelant les étapes principales de leur parcours de travailleurs forcés et ce qu'ils sont devenus ensuite, montrant une faculté de résilience époustouflante.
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