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Critique de Soleney


Six histoires pour brosser le portrait d'un puissant empire dont la légende perdurera à travers les siècles. Six histoires pour nous dévoiler les origines de ce soudain appétit d'expansion, l'âge d'or d'Asreth et de ses machines de guerre, et le déclin de cette civilisation pas comme les autres.
J'ai déjà lu Port d'Âmes, qui se passe dans le même univers, mais bien après. Port d'Âmes qui nous dépeint une société dont certaines légendes parlent d'un empire colossal, d'un livre saint, le Vayd Asrethia, dont certains mythes décrivent des Anges sans tête dispensant la justice divine. Quelle était la nature de ces Anges destructeurs ? Pourquoi l'empire s'est écroulé ? Comment ont-ils acquit tant de technologie alors que le reste du monde restait au niveau du Moyen-Âge ? Ce roman me permettait enfin de répondre à toutes ces questions.

On commence avec « La Route de la Conquête », qui se passe pendant l'âge d'or d'Asrethia. Stannir Korvosa est la généralissime de la Septième Légion – la meilleure, dit-on. Celle qui conquiert les peuples comme un paysan fauche son champ de blé. Cette femme d'une cinquantaine d'années a perdu toutes ses illusions quant à la cause qu'elle soutient, mais elle est plus disciplinée que le meilleur des robots. Jamais il ne lui viendrait à l'idée de trahir son camp. Et pourtant, la voilà arrivée au bout de l'Océan Vert. La mer l'attend, toute proche. Avant de l'atteindre, et de dominer toute Le Grand Sud, un dernier peuple : les Umsaïs. Des nomades qui ne comprennent pas les notions de possession, de cupidité, de domination et pour qui la mort est une fatalité, certes, mais une fatalité souhaitable puisque tout ce qui meurt permet de nourrir ce qui vit. Un peuple qui ne souhaite pas changer ses traditions et qui ne voit pas l'intérêt de faire partie du Saint Empire puisque l'Océan Vert pourvoit déjà à tous leurs besoins.
Comment convaincre un tel peuple ? Comment lui déclarer la guerre au nom de la paix alors qu'ils ne font qu'affirmer leur indépendance ? Pourquoi transformer leur culture, qui est pourtant une richesse ?

« Au-delà des murs » raconte la psychothérapie d'un soldat de l'empire après une bataille terrible. Cette bataille est évoquée dans le précédent récit comme étant la plus difficile de toute la Conquête. Car cette fois, l'empire s'est attaqué au Hiéral. Ce pays possède un corps d'élite, les guerriers-mémoire, dont la force, la rapidité et l'endurance rivalisent inexplicablement avec celle des armures. le protagoniste, dont on ne connaît pas le nom, s'efforce, avec l'aide de son psychagogue, de se rappeler de cette bataille. Et surtout, d'un acte terrible qu'il aurait commis là-bas. Par flashs, il retrace son parcours. Les morts, le sang, les guerriers-mémoire, tous ayant moins de la vingtaine. Et puis, la jeune fille aux fleurs venue les accueillir…
Comment séparer le vrai du faux ? le soldat commence à douter de tout. Les guerriers-mémoire manipulent les souvenirs ; auraient-ils pu changer les siens ? le décor dans lequel il se tient est-il vrai ? Son psychagogue fait sans doute partie du complot. À moins qu'il ne soit paranoïaque ? Peut-être qu'on le retient ici alors que la guerre n'est pas encore finie ? Que faire ? Simuler la rémission puis la guérison. Ne croire personne – surtout pas soi-même. La seule solution : s'enfuir pour mettre fin à l'illusion.
Qu'a-t-il fait, bon sang ? Et que voulait cette jeune fille aux fleurs sur un champ de bataille ?

« La Fin de l'histoire » raconte la Conquête du point de vue des conquis. Ou plutôt d'UN conquis : le peuple Isendrais. Après l'assimilation de leurs voisins des plaines, le Saint Empire tourne son regard bienveillant vers leurs forêts tropicales. Mais les Isendrais sont déterminés à ne pas se laisser faire, et tandis que les chars d'assaut et les fantassins tailladent profondément la forêt, ils se réunissent une dernière fois dans leur capitale. Afin de se raconter leurs histoires. Celles de leurs vies.
Car les Isendrais vouent un culte à l'histoire ; et lorsqu'ils se racontent, ils s'approprient les expériences d'autrui d'une façon quasi-fusionnelle. Leur principal problème avec Asrethia ? L'immobilisme qu'il veut imposer au monde et qui n'est pas du tout naturel. Quand aucune évolution n'est possible, c'est la mort de tout.
Et plutôt mourir que d'affronter cela.

« Bataille pour un souvenir » revient sur la guerre contre le Hiéral, mais cette fois du côté des Hiéraliens. le narrateur est le dernier guerrier-mémoire à avoir dépassé les trente ans. Comme tous les autres, il se prépare, dit adieu à sa femme et à son fils, promet de revenir. Mais comment retrouver le chemin de la maison quand on se bat jusqu'à tout oublier ? Qui est cet homme que le Général Erdani affronte ? le sait-il lui-même ? Pour quelle raison le général (pourtant d'origine hiéralienne) est si déterminé à mettre le Hiéral à genoux ? Pourquoi tient-il tant à mettre à mort dans un duel le dernier guerrier-mémoire ?
Une chose est sûre, ce texte ne peut pas fonctionner sans « Au-delà des murs ».

« le Guerrier au bord de la glace » est le récit qui vous expliquera tout, tout, tout sur les Anges des mythes d'Aniagrad. C'est la dernière grande bataille : une guerre civile qui prendra des proportions si grande qu'elle détruira l'empire. Les armures sont tellement perfectionnées qu'elles ont une Conscience et qu'elles peuvent voler. J'ai été sidérée de voir un dragon monumental se battre à leurs côtés. Cette espèce ne pouvait exister avant, on l'aurait su. Est-ce une créature de laboratoire ? Des extra-terrestres ? D'où viennent ces dragons ? Pourquoi les appelle-t-on « seigneurs » ? Quel statut ont-ils dans la société ? Qui sont-ils par rapport à Dame Mordranth, l'Oracle-Dragon ?

« Quelques grammes d'oubli sur la neige » (parce que la question de la mémoire et de l'oubli semble être prépondérante pour Lionel Davoust) parle d'un petit pays au passé incroyablement glorieux qui paye à présent le prix de leur gloire. Les Anomalies envahissent tout et menacent les hommes. L'hiver approche et les greniers sont déjà vides. Sans ressource, le roi Childe Karmon se décide à une tentative impie : accompagné de ses plus puissants prêtres, il part en quête de la sorcière Irij Wolfran, dont on dit qu'elle peut voir le passé et le futur. Peut-être saura-t-elle les raisons de la chute ? Peut-être trouvera-t-elle une solution pour lutter contre les Anomalies.
Les hommes ont oublié Dame Mordranth, qui n'est plus qu'une icône du péché, de ce temps ou « la femme frayait avec le dragon ». Désormais, ils vénèrent le dieu de Vérité, Wer, qui, dit-on, est venu purifier le monde de sa souillure et placer les Anomalies en punition. Un clergé rigide, hiérarchique, masculin, s'est instauré. C'est d'ailleurs un jeune prêtre affecté à la garde de la sorcière (tant pour surveiller ses moeurs que pour s'assurer qu'elle ne s'enfuie pas du château pour retourner dans ses marais) qui raconte le récit. Les mois passant, il réalise que la jeune femme semble être tout à fait normale. Serait-il possible que le culte weriste puisse être dans l'erreur ?

Un beau recueil, fascinant et complet.
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