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Critique de Merik


Merik
17 février 2019
Voilà un premier roman à la fois virtuose, étrange et lancinant comme un cauchemar. Ils sont quelques-uns et des milliers sûrement à se retrouver à Ouest, humains à coup sûr même si à la lisière de l'humanité et de la dépersonnalisation, parmi eux on suivra plus particulièrement Blesse, Percien, Vassili, Ouespe, l'Évanouie ou l'Employé, « C'était notre équipe » nous instruit le narrateur au nom inconnu. Une équipe parmi d'autres, formée par le hasard dans cet univers crayeux et pierreux, aride et méchamment onirique, dans lequel ils survivront sous les ordres d'un instructeur, accompagnés d'une bande sonore à la musique entêtante ou ce qui s'y apparente, à faire la gymnastique et l'exercice, creuser des trous, boire de la vodka ou prendre des amphétamines, activités au relent d'absurdité, on pense à Kafka et plein d'autres choses. Univers concentrationnaire (concentrionnaire même d'après la quatrième de couv'), sas d'asile ou simplement mauvais rêve ? Les trois peut-être bien, ou aucun. On se demande aussi ce que le narrateur est venu faire là, de son plein gré qui plus est apparemment après avoir rempli « tous les dossiers, passé une visite médicale, couru de bureau en bureau, à Zurich, avec d'interminables attentes, examens, entretiens. On m'avait finalement estimé apte et j'étais parti. ». Il évoque l'ambition de devenir policier par formation, et pouvoir ainsi lapider sans raison devant les visiteurs du parc. Il évoque aussi son passé sous forme de rêves qui se confondent à sa réalité sableuse et incertaine, parsemée de frelons ou de cloportes. Au final le flou domine sur le fonctionnement de cette société, composée justement de flous (sortes de spectres errants que l'on voit sans les voir vraiment), et de permanents aussi, ou de vifs. Les personnages n'y prennent pas d'épaisseur romanesque, juste quelques ébauches psychologiques pour les distinguer comme Blesse et sa violence supposée, ils perdent leur identité et le lecteur son empathie dans la foulée hésitante.
Un lecteur susceptible d'être subjugué par ce texte de haut vol, à l'apparence facile mais à la réalité d'une prose qui colle à la semelle, où on y est souvent pris à rebours, victime d'un croche-patte ou d'un enlisement ou d'un mauvais virage, obligé souvent de s'y recoller pour continuer à avancer. À l'image de l'univers qu'il dépeint donc.

« Il devint de plus en plus difficile de distinguer ce qui venait d'où ou de qui ou de quoi, et peu à peu tout se mêla, rejoignit la musique de la bande en une immense et continue variation des vibrations de l'air. »
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