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Critique de 1001histoires


La victoire des Républicains aux élections de 1879 a fait naître l'espoir pour les ouvriers. le monde minier entre en lutte. Janvier 1886, les mineurs de Dacazeville sont en grève, les salaires ont été baissés. La colère est immense, aucun dialogue pour l'apaiser. Les mineurs marchent sur Decazeville, occupent les bureaux de la Compagnie des Houillères & Fonderies de l'Aveyron. le sous-directeur Jules Watrin est molesté puis frappé avant d'être défenestré. le 26 janvier 1886 Jules Watrin a été tué.

C'est le point de départ du récit de Pascal Dessaint. Il a exploité des documents d'époque, notamment L'Illustration dont est extrait l'image de la couverture de son roman. Il a accompli un travail d'historien. Jour après jour il détaille les conséquences de la violence qui a tué Watrin. A l'origine il y avait une grève, elle se termine dans la confusion. de vagues promesses sont faites, le gouvernement est décidé à faire pression sur la Compagnie mais tarde à agir. Jules Watrin a été tué, il y a des arrestations. Des troupes sont envoyées à Decazeville, l'armée veille au calme. le versement de la paie de février relance la lutte, le 25 février une nouvelle grève commence.

Pascal Dessaint ne laisse pas de place au doute, il est avec les mineurs. Mais il explique pourquoi. Il approfondit pour savoir comment on en est arrivé là. Il appuie son propos d'extraits de discours, il cite des courriers, des dépêches télégraphiques, des comptes-rendus. C'est cela raconter l'Histoire. A l'époque les grévistes ont le soutien de Louise Michel. Celui de Clémenceau et Jaurès est beaucoup plus nuancé. Dans ce débat, j'ai découvert le député Basly qui soutient les revendications des mineurs en insistant sur le mépris dont ils font l'objet de la part de la Compagnie qui se réfugie derrière la crise, l'absence de versements de dividendes mais « elle se serait ruinée pour le bien être des ouvriers » déclare Gustave Petitjean, administrateur délégué. La presse se fait l'écho des débats, l'auteur cite le Cri du peuple et la réponse du Gaulois. L'Aveyron républicain publie Germinal en feuilleton. La censure sévit, le gouvernement menace mais la Compagnie reste inflexible. A Decazeville, c'est la grève générale. Plus de charbon, les hauts-fourneaux sont à l'arrêt. Deux milles soldats font face à mille cinq cents grévistes.

Pour relancer son récit historique Pascal Dessaint pose des questions. L'intérêt du lecteur est sans cesse relancé. Les réponses fusent, toujours puisées dans l'actualité de l'époque et toujours référencées par des documents pour exposer des faits. C'est cela raconter l'Histoire. L'auteur a choisi un style journalistique. C'est efficace et instructif.

Ce roman noir et social a un épilogue, la reprise du travail le 14 juin après cent huit jours de grève. Les familles avaient faim. le lendemain s'ouvre le procès de ceux qui sont accusés d'avoir tué Watrin. Pascal Dessaint entame un nouveau récit, six jours d'audiences. C'est une partie du roman très vivante avec beaucoup de dialogues pour bien faire ressortir l'âpreté des débats. La retranscription de télégrammes annonce le verdict. C'est un récit historique et journalistique. J'ai trouvé qu'il manquait un peu d'émotion, peut-être un personnage fictif qui aurait aimé et détesté, qui se serait trompé, aurait douté avant de repartir de l'avant. Ceci étant j'ai aimé ce roman fait de révélations et qui retranscrit très bien le contexte social et politique de la fin du XIXème siècle et où l'auteur ne manque pas de trouver quelques similitudes avec le présent. Je ne résiste pas à l'envi de rappeler le portrait du député Basly, personnalité humaniste et visionnaire en ce qui concerne l'action syndicale.

Pascal DESSAINT1886 L'affaire Jules Watrin . Parution mai 2023, Éditions Payot & Rivages, collection Littérature Rivages . ISBN 978-2-7436-5911-0 .
Lien : http://mille-et-une-feuilles..
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