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Critique de Phil56


Outre mon souci de (re)découvrir des auteurs de mon pays wallon, à mes yeux, injustement oubliés et/ou méconnus (8 lecteurs recensés sur Babelio : quelle tristesse !), vous dire d'abord que Conrad Detrez a profondément marqué mon adolescence.
Je conserve, entre autres, un souvenir précis et rétrospectivement ému de ses interventions aussi vibrantes, enthousiastes que quotidiennes sur les ondes de la RTB (Radio Télévision Belge) en direct de ce lointain Portugal où tout semblait possible en ces années 1974-1975.
Concomitamment paraissent Ludo (1974), Les Plumes du coq (1975) et L'Herbe à brûler (Prix Renaudot 1978), trilogie sans doute la plus emblématique de sa personnalité complexe.
Vint ensuite le dragueur de Dieu (1980), le présent roman que je m'ambitionne de modestement chroniquer d'autant plus que personne ne s'y est risqué avant moi.
Le narrateur nous emmène sur les traces de son ami Victor, fils de boucher, enfant du Nord où "tous les anges se plaisent à pisser ensemble pour asperger les villages et les presbytères de ces pieuses contrées".
Victor, adolescent, fait la connaissance de l'ange Amour ...
Fantasme ou réalité ? Toujours est-il que notre héros poursuit, manifestement en vain, sa quête mystico-charnelle quittant ainsi le couvent où il s'était un temps réfugié en fuite de son milieu social et familial plutôt mortifère.
En effet, frustré de ne pas y revivre les affres délicieuses de sa rencontre initiale (initiatrice ?), il décide, désespéré, de rejoindre Paris où le narrateur, compagnon de noviciat, va tenter de le (et de se) sauver des multiples tentations de cette moderne Babylone.
Je ne vous en dévoilerai pas plus.
A vous de juger si vous souhaitez (ou pas) vous plonger dans l'univers si particulier et oh combien tourmenté de Conrad Detrez.
Son oeuvre (6 romans en 10 ans - de 1974 à 1985 : date de son décès du SIDA à l'âge de 47 ans) s'inscrit dans l'histoire spécifique de sa génération marquée par l'engagement politique, le dépassement des interdits de toute nature et témoigne d'une forme d'urgence à l'aune de son tragique destin personnel.
Cette "autobiographie" (certes non officiellement assumée mais je reste convaincu que tel est bien le cas) hallucinée empreinte de fièvre, transe, délires et fulgurances rapporte aussi une quête perpétuelle de "soi" (dont l'identité sexuelle) régulièrement contrecarrée par la faute, la culpabilité, le péché où l'amitié prend souvent la forme d'une chasse, d'une traque, ... d'une "drague" (d'où le titre) en la présence permanente d'une nature âpre mais toujours pleine de sensualité (goûts, odeurs, couleurs, textures,...).
Exercice littéraire quasi psychanalytique servi par une écriture sans affect redondant mais qui transpire, qui sent (au sens presque littéral du terme), ce roman m'a personnellement (ré)enchanté même si le recul du temps peut en rebuter d'aucun(e)s.
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