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Critique de Odlag


Odlag
12 décembre 2020
Vita Nostra est le premier volet d'une trilogie articulée autour de la thématique de la métamorphose. de quel genre de métamorphose(s) parlons-nous exactement ? Pour comprendre celles abordées dans Vita Nostra, il vaut mieux le découvrir soi-même. En fait, pour comprendre pleinement tout ce dont je parlerai dans ma chronique, lire le livre soi-même est la seule solution. Car ce roman met en avant des concepts vraiment très particuliers, mais fort intrigants. Personnellement, je ne suis pas sûre d'avoir bien tout assimilé. Cela ne m'a cependant pas empêchée d'apprécier ma lecture, bien que les débuts aient été quelque peu... périlleux. J'avoue m'être sérieusement demandée si je n'allais pas détester ou, pire, abandonner. Heureusement j'ai tenu bon, et je n'ai pas été déçue.

Bon, déjà, oubliez les comparaisons à Harry Potter, cela n'a strictement rien à voir. Je déteste quand les éditeurs sortent des comparaisons de ce genre, comme s'ils avaient besoin de ça pour vendre le livre. Alors oui, c'est un roman initiatique où il est question d'un apprentissage bien particulier, mais ça il y en a à la pelle, et les similitudes s'arrêtent là. Car dans le genre atypique, Vita nostra place la barre assez haut.
Tellement haut que j'ai bien cru que j'allais me casser la figure. Les débuts ont été pour moi assez difficiles, et ce pour un ensemble de raisons qui, prises séparément, ne sont pas forcément dérangeantes.
Tout d'abord, le rythme du roman est assez lent, il n'y a pas de scènes d'action à proprement parler, il n'y a pas de gros événements, pas de méchants à affronter, etc. Il est ici question d'apprentissage, mais d'un apprentissage bien particulier, enfin, plutôt de plusieurs apprentissages. Aussi le roman est-il centré sur la psychologie des personnages et sur leur rapport au monde. Sacha quitte le cocon familial pour vivre dans un internat, au milieu d'inconnus. Au départ, c'est un moyen pour elle de fuir Valentin, venu emménager chez elles, ce qu'elle perçoit comme une invasion au sein de son cocon, abîmant alors leur complicité mère/fille. Elle s'éloigne ainsi de sa mère, à qui elle est sans cesse obligée de mentir pour qu'elle ne découvre pas la vérité sur l'Institut, et apprend à devenir indépendante. Elle va vivre ses premières amours, ses premières peines de coeur, des déceptions et des joies, va nouer des liens plus ou moins forts avec ses camarades, apprendre à s'occuper de soi et des autres, etc. On aborde là le passage à l'âge adulte, et la peur que l'adolescent peut ressentir à l'idée de quitter le foyer familial, de prendre son envol.
Et la peur est le sentiment dominant du livre, décliné sous diverses formes : peur de mûrir, peur de l'amour, peur de la perte, peur de l'échec, etc. C'est un sentiment sur lequel jouent les enseignants pour pousser les élèves à obéir et, surtout, à étudier sérieusement. le problème est qu'il est assez compliqué d'apprendre quelque chose qu'on ne nous explique pas.

C'est ce point-là qui m'a le plus dérangée au début : ne pas savoir, ne pas comprendre. Comme les choses sont assez longues à se mettre en place, le fait que rien ne soit expliqué ne m'a guère aidée à avancer avec enthousiasme dans ma lecture. Heureusement une collègue qui l'avait déjà lu m'a expliqué qu'il fallait passer un certain cap dans le livre pour être gagné par son ambiance si particulière. Alors je me suis accrochée et, passé grosso modo le premier quart (voire le premier tiers) du roman, je suis enfin parvenue à entrer vraiment dans l'histoire. J'ai ainsi fini par m'attacher à cette jeune Sacha qui cherche sa place, à la fois dans sa famille (qui va connaître quelques changements) et dans le monde. Et, au fur et à mesure que les choses se sont éclaircies (même si le brouillard était toujours un peu présent), j'ai eu de plus en plus de plaisir à suivre ce récit si curieux.
Bon, du coup j'explique un peu l'inexpliqué/inexplicable (enfin, je vais essayer d'être compréhensible dans le minimum du possible). Dans cet Institut, les élèves étudient des matières générales (droit, histoire, sport, etc.) et des matières spéciales. En première année, il y a une matière spéciale, mais il n'est jamais précisé ce qu'est exactement cette matière. Les première année sont divisés en deux groupes en fonction de la personne qui les a recrutés : le groupe A (dont fait partie Sacha) sont ceux repérés par Farit Kojennikov, le groupe B sont les autres. Sacha, comme tous les première année, se demande ce qu'elle fait là, trouve les élèves des deuxième et troisième années très étranges (certains s'arrêtent d'un coup sans raison apparente, les yeux dans le vide, d'autres sont estropiés, etc.), et ne comprend pas cette fichue matière spéciale. En quoi consistent les cours et les devoirs ? Leur professeur leur fait lire des paragraphes illisibles et leur demande de les apprendre par coeur. Ensuite, lors de sessions individuelles, il vérifie s'ils ont bien travaillé ou non. Comment lire l'illisible ? Et pourquoi ? Que cela est-il censé apporter ? Sacha, habituellement bonne élève, va avoir beaucoup de mal à comprendre cette étrange matière. Comme tous les élèves. Mais, à force d'acharnement, un déclic se fera et la jeune fille va développer un véritable don pour ces matières spéciales. J'ai trouvé vraiment intéressant que Sacha ne comprenne et ne réussisse pas tout du premier coup : à chaque spécialité (elle en aura une supplémentaire en deuxième année), elle rencontre de grosses difficultés avant de parvenir à intégrer l'enseignement. En revanche, une fois que c'est fait, elle devient très douée et dépasse les attentes de ses professeurs (peut-être même trop).
Elle devient la meilleur élève, aussi les professeurs spéciaux lui donnent-ils souvent plus de devoirs que les autres. le problème est qu'elle est tellement douée qu'elle a tendance à se laisser emporter et en fait beaucoup plus que demandé. Vous me direz, quel mal y a-t-il à cela ? Simplement que ce ne sont pas là des exercices anodins, qu'ils peuvent avoir un impact plus ou moins important sur son corps, son esprit, et sur le monde qui l'entoure. du coup j'ai par moments trouvé Sacha un peu inconsciente : elle fait la bêtise une fois et en voit le résultat catastrophique, ses profs la préviennent qu'elle ne doit pas recommencer, mais elle recommence. Plusieurs fois. Bon, c'est souvent malgré elle, mais pas toujours. Il devient alors de plus en plus important pour elle de gagner en maturité, en maîtrise de soi.

[...]

En bref...
Vita nostra est le premier volet d'une trilogie dont chaque tome sera apparemment indépendant mais qui tournera autour d'une même thématique : la métamorphose. Certains préfèreront alors parler de triptyque, bien que ce soit un terme synonyme plutôt employé en peinture, mais je comprends le désir de différencier une série avec des tomes interdépendants d'une série dont les tomes sont indépendants les uns des autres. Pour ma part, je continuerai d'utiliser le terme de trilogie.
Vita nostra, donc, est un roman que je classerais dans le genre fantastique plutôt que fantasy, mais il s'agit là d'un point de vue purement personnel, car c'est ainsi que je l'ai perçu.
Marina et Sergueï Diatchenko ont travaillé de concert pour nous livrer un récit des plus curieux où sont développés des concepts particuliers et, surtout, particulièrement abstraits mais tout de même très intéressants. S'il peut être difficile d'accrocher au début du roman, en raison de certaines longueurs et quelques incompréhensions, il ne faut surtout pas se décourager, la suite valant largement la peine. La psychologie des personnages est bien travaillée, nous donnant ainsi à voir leurs questionnements et leur évolution de manière tout à fait crédible une fois que l'on a bien pris en compte que ce qu'ils vivent dans cet Institut des Technologies Spéciales n'a rien d'ordinaire et tout de très étrange. L'intrigue est menée avec brio, surtout si l'on considère le travail que cela a dû être de rendre compréhensif et captivant un récit abordant des concepts si abstraits. Ainsi il est question de métamorphose, autant physique que psychologique, à la fois littérale et métaphorique, mais également du pouvoir des mots et de la peur.
Un roman qui sort de l'ordinaire et qui mérite de prendre le risque d'y plonger.
Lien : https://escape-in-books.blog..
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