AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Fandol


Dix ans avant de publier Les putes voilées n'iront jamais au paradis, Chahdortt Djavann avait déjà confié beaucoup de choses à propos de son pays d'origine. Alors qu'elle utilise beaucoup le registre de l'imaginaire, elle nous plonge plus que jamais dans la dure réalité vécue par elle en posant la question : Comment peut-on être français ?

Bien sûr, elle s'appuie sur son expérience mais n'hésite pas à aller au-delà avec cette Roxane Khân, fille de Pacha Khân, ayant beaucoup de frères et de soeurs. Son père était un féodal, un ingénieur qui bâtissait dans tout le pays jusqu'à ce qu'un grave accident le plonge dans le coma et qu'il fume de l'opium ensuite.
Roxane est née dans les montagnes d'Azerbaïdjan, naissance prématurée à sept mois. Un siècle après l'assassinat de son grand-père, elle arrive à Paris, « Paris, son fantasme à elle. » Elle connaissait la ville dans les livres mais se retrouve dans une chambre de bonne tentant d'apprendre notre langue.
Elle explore les rues de la capitale, se rend dans des endroits célèbres comme le café de Flore : « Même dans ses rêves, elle n'avait jamais fait ça : boire un verre de vin rouge à la terrasse d'un café parisien. La réalité dépassait ses rêves. »
Au supermarché, elle ressent qu'elle vient vraiment d'un autre monde et elle tremble lorsqu'elle attend le renouvellement de sa carte de séjour. La conjugaison de nos verbes est un véritable cauchemar comme le genre des noms, ce sexe des mots, car en persan, l'article n'existe pas.
Les traumatismes de son enfance refont surface. Elle sympathise avec Kim, son voisin, coréen, fait les frites au McDo, garde Clara, la fille de Julie, journaliste, suit des cours à la Sorbonne et lit attentivement Les lettres persanes de Montesquieu. Elle n'en revient pas de la justesse des propos de l'écrivain, trouve une véritable complicité avec lui et… décide de lui écrire.
Ce sont alors dix-huit lettres, toutes retournées à l'envoyeur, qui lui permettent de confier ses états d'âme, ses pensées, ses émotions, ses espoirs, sa débauche d'efforts pour apprivoiser le français. Elle décrit aussi l'Iran d'aujourd'hui et insiste : « Pour ma part, je ne me suis jamais sentie à ma place, pas plus en Iran dans ma famille, que dans ma chambre à Paris. »
Il faut lire ce qu'elle raconte et ne pas l'oublier : « Sous le regard indifférent des gouvernements occidentaux, les autorités oppriment, condamnent, torturent, exécutent en toute impunité. Il n'est pas de l'honneur et de la dignité de l'Occident de s'allier avec des tyrans. Et pourtant il le fait, l'Occident, non seulement avec ceux de l'Iran, mais avec tous les tyrans. »
Plus loin, elle ajoute : « Que peut attendre ce peuple d'une religion qui l'humilie, le torture et ne lui laisse aucun esprit de vie ? » Elle ne rejette pas la responsabilité des Occidentaux dans la situation iranienne, souligne l'analphabétisme dans les pays musulmans et, suite à une arrestation malheureuse dans Paris et à l'attitude bornée de quelques policiers, revit le cauchemar atroce qui lui a fait fuir son pays.


Lien : http://notre-jardin-des-livr..
Commenter  J’apprécie          230



Ont apprécié cette critique (17)voir plus




{* *}