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Critique de Lazlo23


Publié en 1973 par Georges Duby, « Guerriers et paysans (VIIè-XIIè Siècle) » raconte la lente naissance de ce qu'on pourrait appeler l'espace européen – un espace tout autant mental et religieux que physique ou économique.
À partir de sources très lacunaires, et qu'il faut sans cesse lire entre les lignes, Duby traque patiemment les premiers indices de cette construction de quelque 600 ans, qui donnera lieu à ce qu'il présente comme le « premier essor de l'économie européenne. » Pour ce faire, tous les savoirs sont convoqués, de la climatologie à l'histoire des mentalités, en passant par la démographie, l'archéologie ou l'étude des techniques agricoles.
Cette Europe « de rite latin » s'est très largement construite sur une exploitation croissante du milieu naturel, la part cultivée gagnant peu à peu sur la part sauvage et forestière du paysage européen.
Mais le phénomène auquel le grand médiéviste accorde le plus de place est la manière dont, tout au long de cette période, les grands (qu'ils soient laïcs ou religieux), se sont appliqués à détourner à leur profit les maigres fruits du travail paysan. Dans une Europe progressivement christianisée (et ce jusque sur ses marches les plus turbulentes que sont la Hongrie ou la Scandinavie), la guerre devient en effet une activité marginale, dont les produits raréfiés ne permettent bientôt plus à l'aristocratie de maintenir son fastueux train de vie. Dès lors, celle-ci n'a plus d'autre choix que de pressurer la foule famélique des esclaves, mais aussi les paysans libres, dont la condition finit, lentement mais sûrement, par se confondre avec celle de la population servile.
Paradoxalement, cette oppression n'aura pas que des inconvénients ; Duby y voit même la clé du décollage économique européen. Elle obligera en effet les paysans à perfectionner les techniques agricoles afin de produire davantage pour assurer leur propre survie ; elle relancera également le commerce et la circulation monétaire, qui avaient quasiment disparu à la suite de l'effondrement du monde romain.
Un livre dense, mais que j'ai lu avec plaisir, car il est très bien écrit et toujours porté par la volonté de rendre l'histoire accessible au plus grand nombre.
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