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Critique de Bellonzo


Un "collector"


Voici un album de B. D. qui m'a séduit. Duchazeau nous emmène sur les routes du Sud, du Sud américain, cette source si riche de ses racines musicales afro, gospel, blues jazz, cajun, zydeco, swamp, work song, country, etc. L'histoire est absolument authentique. 1933, dans un univers à la Steinbeck, à la Caldwell pour les lettres, à la Walker Evans pour la photo, John Lomax et son jeune fils de 18 ans, Alan, sillonnent les états méridionaux pour recueillir les témoignages musicaux des gens du cru et les enregistrer sur cylindres de cire. Il avait déjà 20 ans auparavant rassemblé des chansons de cowboys plutôt vers l'Ouest. "Lomax, collecteur de folk songs", tout de noir et blanc vêtu est un beau voyage au coeur du pays, avec un père et un fils tout à leur mission, la mémoire musicale de l'Amérique, Tin Pan Alley. Sans les Lomax et quelques autres ni Elvis, ni Bob, ni Jim, ni Bruce, ni personne...

Dans cette évocation du périple du père et du fils, dans un trou du Texas, la première page les voit bivouaquer et fumer autour du feu de camp, le pavillon de l'appareil recrache la voix d'Alan, pour la Washington Congress Library. Veuf, John Lomax croit beaucoup au patrimoine musical américain. Son regret est de n'avoir pas eu le temps d'enregistrer la voix de sa propre femme. C'est toute l'histoire de "Lomax, collecteur de folk songs", et cette BD avait évidemment tout pour me plaire, passionné de l'histoire des Etats-Unis à travers ses disques, ses livres et ses films.

Duchazeau, de ses traits assez neutres au niveau des visages, nous fait bien comprendre que dans ce Sud profond l'accueil n'est pas toujours à bras ouverts devant ces curieux qui veulent mettre en boîtes des bluesmen inconnus et illettrés, des joueurs de boogie peu sociables, des vieilles chanteuses de gospel méfiantes. Incrédules devant ces rouleaux de cire ils finissent par se livrer peu à peu, le bourbon n'y étant pas étranger. le plus étonnant est que certains avaient même fait des disques sans le savoir et plus encore sans aucun droit d'auteur. le plus célèbre, Leadbelly, était au Louisiana State Penitentiary et pas pour un vol de bicyclette. C'est que les bluesmen et les folkeux des années trente n'étaient pas des parangons de vertu.

J'ai particulièrement aimé les scènes de groupes:travailleurs aux champs ou poseurs de rails, offices religieux plutôt swing, pianos-bastringues et rues des grandes villes du Sud. Un univers frémissant est là, de pauvres bougres usés et sonnés, miséreux et naïfs, victimes et meurtriers. Ces gens-là ont fait Tin Pan Alley et de Memphis à Baton Rouge, de Clarksdale à Chattanooga, le coeur de l'Amérique n'a cessé de battre au Sud puis dans tout le pays et le monde entier. C'est sûrement pour ça que je me suis toujours senti curieux de ces riffs et de ces mots.
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