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Critique de Lamifranz


« le docteur mystérieux » et sa suite « La Fille du marquis » sont les deux parties d'un diptyque écrit vers 1863, mais publié seulement en 1872, soit deux ans après la mort de l'auteur. Ce diptyque aurait dû s'intituler « Création et rédemption », ce qui correspond bien à l'ensemble de l'ouvrage. C'est une des dernières grandes oeuvres écrites par Dumas, une des moins connues, mais une des plus intéressantes, car, comme on va le voir, l'auteur y reprend quelques grands thèmes de ses romans antérieurs, en y ajoutant ce que la sagesse et ses années d'expérience littéraire (et humaine) lui ont apporté.
Nous sommes en 1785. le docteur Jacques Mérey, empreint de l'esprit des Lumières, est un médecin des pauvres, actif et reconnu dans la population d'Argenton (Berry). Un jour il trouve chez un bûcheron une fillette muette et dans un état physique déplorable, abandonnée par ses parents. Il la recueille, la baptise Eve (la fille de la côte), l'élève et en fait une jeune fille d'une grande intelligence et d'une grande beauté. Puis le temps aidant, il en devient amoureux et c'est réciproque. le mariage se précise. Mais Eve veut savoir qui sont ses vrais parents. le docteur reprend l'enquête et identifie le père indigne : le marquis de Chazelay. Celui-ci, vient reprendre sa fille.
Racontée ainsi, vous vous dites, c'est une histoire à l'eau de rose, entre l'enfant sauvage, et les aventures de Lagardère (et son amour avec Aurore), vous n'aurez pas tort, sauf que c'est Dumas qui raconte : le roman va basculer dans le roman historique : les aventures de nos deux amoureux vont se dérouler dans le cadre grandiose et terrible de la Révolution : ils vont être mêlés de près aux grands évènements de cette période si riche en tragédies publiques et privées Jacques et Eve vont se chercher, se retrouver, se reperdre, se retrouver à nouveau, ils croiseront Marat et Danton, ainsi que Robespierre, puis plus tard Joséphine et Madame Tallien, ainsi que le citoyen Barras… Leur amour sera souvent menacé, à commencer par eux-mêmes, Jacques devient taciturne et renfermé (Darcy dans « Orgueil et préjugés »), Eve de son côté doit faire face à de multiples attaques… Mais Dumas ne serait pas Dumas s'il ne mélangeait pas tout ça dans sa grande marmite, avec ses ingrédients favoris, l'action et l'amour, la fantaisie, la description historique peut-être un peu écornée mais tellement vivante, et cette verve inimitable qui fait qu'on en redemande à chaque fois.
Quand Dumas raconte L Histoire, il descend les personnages historiques de leur piédestal et nous les montre « en robe de chambre » (c'est le titre de ses toutes premières chroniques historiques dans les années 30), c'est-à-dire, au naturel : le portrait de Danton, entre autres est stupéfiant de vérité.
On retrouve quelques éléments d'intrigue qui figuraient déjà dans les « Mémoires d'un médecin » (« Joseph Balsamo », « le Collier de la Reine », « Ange Pitou » et « La Comtesse de Charny ») et le portrait de Jacques Mérey quand il retrouve Eve ressemble un peu à celui du « Comte de Monte-Cristo », froid extérieurement et bouillant intérieurement, la raison et la volonté muselant les sentiments.
Deux histoires entrelacées donc dans ce très beau roman. Il en est souvent ainsi avec Dumas : mélanger la petite histoire avec la grande, c'est ce qu'il sait faire de mieux. Et c'est tant mieux pour nous !
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