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Critique de Cannetille


Déjà couverte d'opprobre par le procès et l'emprisonnement de Victor, son fils embaumeur enrichi par un trafic d'organes, la Pâqueline se retrouve à la rue après l'incendie de sa maison, cette même année 1798. Elle investit alors la demeure bourgeoise de ce rejeton exécré, et, faute d'autre moyen de subsistance, s'emploie à son pillage méthodique. Emplie d'aigreur par le contraste entre l'opulence de son fils et sa propre indigence, elle est prise d'une irrépressible impulsion : jeter le drame de sa propre vie et le secret des origines de Victor à la figure de l'absent. Ce qu'elle entreprend en couvrant d'écritures les murs du riche appartement.


J'avais apprécié L'embaumeur au-delà du coup de coeur et ne pouvais donc que me précipiter sur cette suite, que l'on peut d'ailleurs lire indépendamment. Victor croupissant désormais dans les immondes profondeurs de son cachot, où seul le paiement d'une pension peut assurer un régime adouci, le voici plus que jamais dépendant de son épouvantable mère et des méchancetés dont elle l'a depuis toujours poursuivi. La narration quitte le point de vue du fils pour embrasser cette fois celui de la mère, dont on va peu à peu comprendre les raisons de sa rancoeur et de son aversion maternelle. L'odieuse figure de cette femme sans vergogne ni morale, qui souvent choquera le lecteur pris d'une répugnance horrifiée, laisse bientôt entrevoir une existence misérable, jalonnée d'épreuves, ainsi qu'une personnalité qui, aussi fruste et bestiale soit-elle, n'en finit pas moins par révéler des facettes humaines et attachantes.


Au travers de la Pâqueline se profilent les réalités de la vie quotidienne du petit peuple de Paris et des campagnes à la fin du XVIIIe siècle, en particulier celui des femmes les moins favorisées, prostituées, servantes ou orphelines. L'on retrouve avec plaisir l'érudition de l'auteur, qui sait distiller les menus détails de la vie de l'époque dans une restitution toujours surprenante, souvent choquante et repoussante, tant elle accumule de sordide et d'horrible dans l'ordinaire misérable qui prévaut alors dans les basses couches de la société. Nombreux sont les passages qui plissent le nez du lecteur de dégoût incrédule, notamment en ce qui concerne les ahurissantes utilisations de matières humaines, le terrifiant manque d'hygiène et les crasses ignorances médicales.


Dans la même veine que L'Embaumeur, La Pâqueline m'a sensiblement moins séduite. Peut-être parce que l'effet de surprise s'y est mué chez moi en une diffuse sensation de réchauffé, et surtout à cause des éléments beaucoup plus burlesques de ce second ouvrage qui donne parfois l'impression d'une surenchère au détail écoeurant. Cette suite n'en demeure pas moins un excellent roman, original et documenté, bien écrit et agréable à lire, dans un genre inclassable qui vaut le détour.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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