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Critique de Alzie


Des brumes de Bournemouth à la lumineuse Corfou – villa fraise, villa jonquille et villa Blanche Neige, au rythme des lieux successifs auxquels s'attache la tribu Durell – ce livre ressemblerait presque à un éloge du déménagement pratiqué comme un art de vivre. "Gerry" Durell (1925-1995), benjamin d'une fratrie peu ordinaire et futur naturaliste de renom (il est aussi le créateur du zoo de Jersey), fut sans aucun doute un enfant des plus attachants. Il relate ici, avec une immense tendresse bordée d'un humour ravageur et un sens accompli du romanesque, les souvenirs parfumés d'un « apprentissage » précoce et sur le tas au métier de zoologiste, à Corfou juste avant guerre. Sa famille vient de fuir pour cinq ans le « maudit climat anglais ». Il a dix ans, une curiosité sans bornes et des talents d'observateur hors pair que moult précepteurs vont tenter de canaliser sur place. Les saisons, le hasard et bien entendu la ruse enfantine l'amènent, avec son fidèle chien Roger, à une exploration soigneuse et enchanteresse – qu'il sait admirablement faire partager – de la riche faune animalière corfiote, et à s'entourer d'amis bientôt nombreux et de plus en plus encombrants (tortues, scarabées, un couple de pies, crapauds, araignées, geckos, mantes, deux serpents et une bande de scorpions, pigeon et goéland géant, j'en passe ...).

L'amour tout à fait immodéré qu'il porte aux animaux le conduit à des découvertes multiples et variées provoquant une cohabitation animalière, très peu réglementée il faut bien dire, que toute la fantasque famille subit ou approuve à des degrés divers, et plus ou moins stoïquement – l'aîné Larry s'avérant être le plus hystérique de tous face à ce partage du territoire souhaité par Gerry. Un premier cercle d'intimes se compose de la bienveillante et très, vraiment très indulgente Mrs Durrell, elle-même portée sur la botanique, et de sa progéniture : l'écrivain Larry, à l'ironie mordante parfois suffisante (on lui doit le quatuor d'Alexandrie, 1957/1960), le sympathique Leslie, juste un peu fou de la gâchette et Margo, tellement obsédée, si ce n'est totalement désespérée par son acné, qu'elle n'a plus d'autre recours que s'en remettre à la divinité locale, Saint Spiridion ; un deuxième cercle, tout aussi réussi, constitué de Spiro, le guide interprète tout terrain, l'indispensable médiateur des spécificités douanières, l'ami indéfectible des premières aux dernières heures corfiotes, de la douloureuse Lugaretzia, du docteur « Po... po... po... », rare défenseur de la rationalité sur une île qui en paraît dépourvue, du professeur Théodore Stephanides et de quelques autres individus originaux fournis par les défilés incessants d'amis et de convives que Larry n'a de cesse d'inviter. Voilà pour les spécimens remarquables de ce premier volume haut en couleurs de la Trilogie de Corfou (rééditée récemment dans son intégralité), conçu comme un hymne délicieux et sans entraves à la diversité animalière et à la fantaisie humaine.
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