AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Shaynning


Incontournable Novembre 2021

Ce petit carnet rigide contient la correspondance fictive d'Émilien, aubergiste français amateur de cuisine et de dessin, avec son épouse. Émilien qui,comme tant d'autres européens, doit aller sur le champ de bataille de la première Guerre Mondiale. Ce qui devait être une guerre expéditive terminée avant Noël va se prolonger durant quatre ans, sous les avancés et reculs entre les tranchées où régnaient des conditions insalubres et très difficiles, séparé par un No Man"s Land que se disputaient les diverses Nations en présence. Une guerre "absurde", comme l'écrit Émilien à sa femme Madeleine, qui tient son auberge en l'attendant et va devoir accoucher seule de leur second enfant. Émilien, à travers ses écrits, nous livre ses espoirs, ses constats, ses émotions et ses craintes, avec à l'appuie ses croquis.


En réalité, les divers dessins et peintures de ce carnet sont les oeuvres d'un artiste, Georges Bruyer, qui aura fait divers dessins de son passage sur les champs de bataille de la Première Guerre Mondiale. Il y retournera d'ailleurs. Il demande à participer "à la cinquième mission des artistes aux armées qui sont chargés par le ministère des Beaux-Arts de se rendre sur le front pour représenter la guerre" (p.88) Traits noirs, lignes dures, style épuré, légèrement minimaliste, il représente la guerre sans censure et sans omissions. Soldats, ruines, scène du quotidien, scène de batailles sont au lot des sujets. En couleurs, sans couleurs, dans les tons bleus froids ,croquis, estampes, aquarelles, on a une certaine diversité de médiums.


Étonnant comment de simples lettres peuvent à elles-seules dépeindre assez justement cet épisode sombre de notre Histoire. Émilien y livre des détails de son quotidien, du ressenti tant de lui-même que des autres soldats, les espoirs au début, l'incompréhension quand la guerre s'étire. Il nous informe aussi des petits cadeaux qu'ils reçoit de sa femme,ainsi que des nouvelles qu'elle lui a apporté ( on n'a que les lettres d'Émilien seul).


C'est décrit assez simplement, et pourtant on a aucun mal à imaginer. le style d'écriture se fond bien aux dessins: il est aussi épuré et sobre qu'eux. Une bonne formule de la part de l'autrice, surtout que la guerre est ce genre de sujet qui n'a nullement besoin d'être engraissé et dramatisé pour être percutant. Et on fait un tour d'horizon assez complet: les conditions de vie dans les tranchés, la difficulté de progression des soldats, ceux du ravitaillement, les espoirs partagés de part et d'autre des lignes à Noël, les menus miracles comme des énormes échecs, les moyens employés par les soldats pour tuer le temps ou se préserver du désespoir. C'est le genre de roman plutôt intéressant pour les jeunes qui ne connaissent pas encore ce pan d'Histoire. Disons que c'est une manière d'entrer dans le sujet, sans détails glauques ou de politique complexe. On suit simplement un soldat dans sa routine, ce qu'il voit, pense et perçoit.


En outre, j'aime le format choisi pour cet ouvrage, avec des textes aérés, des images en pleine page, quelques petits croquis ici-là. On dirait un document, plus qu'un roman, mais c'est visuellement agréable. On a aussi en fin de roman un texte sur l'illustrateur George Bruyer, mais aussi de la genèse du roman avec son autrice. Très intéressant. Vraiment bien!

À voir.

Pour un lectorat à partir du second cycle primaire ( 8-9 ans), mais sans doute plus pertinent pour le troisième cycle ( 10-12 ans), puisque le cursus primaire québecois met les grandes guerres dans ce cycle-là.
Commenter  J’apprécie          30



Ont apprécié cette critique (2)voir plus




{* *}