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Critique de PhilippeCastellain


On ne s'attend pas à voir un clown faire des choses sérieuses. Mais même de Funès a joué dans ‘Le gentleman d'Epsom'. Si Charles Exbrayat est surtout connu pour ses innombrables romans policiers, notamment les hilarantes séries ‘Imogène' et ‘Roméo Tarchinini', pas si étonnant donc de découvrir qu'il a aussi fait quelques romans ‘'sérieux'', mais je ne m'attendais absolument pas à ça.

Nous sommes vers 1920, quelque part dans les contreforts de l'Auvergne. Il y a un village dans le fond de la vallée, Rustande. Plus haut, trois hameaux. A mi-pente, Lavillerie est peuplée de bûcherons. Plus haut, Beauzère et Verdagne abritent un petit peuple d'éleveurs et de chevriers. La vie est rude dans la montagne. L'eau, on va la chercher à la source. Pour faire les commissions ou aller à la messe, il faut une ou deux heures de marche par les sentiers. Pas de bistrot, et d'ailleurs on n'aurait pas le temps d'aller y boire avec les amis. Les loisirs et le confort sont des notions qui n'existent pas. Pourtant, à sa façon, la vie y est belle.

Et voila qu'une usine ouvre dans la vallée. Cinq francs par jour, repos le dimanche. Pour César, chef respecté de Lavillerie, c'est une évidence : il faut y aller. Tout le monde le suit. Les montagnards s'établissent dans la vallée, découvrent une vie infiniment plus facile que la leur. Il y a bien un peu des tensions avec les ouvriers Piémontais venus compléter la main-d'oeuvre, mais globalement tout se passe bien. Déserté, le village est peu à peu englouti par la forêt. L'herbe pousse dans la grand-rue, sur le pas des portes… Et sur les tombes des anciens. Mais une tombe justement, sacrifiée pour agrandir l'usine, va mettre le feu aux poudres. On ne dérange pas une tombe. Et pour venger cela, les bergers de Beauzère et Verdagne lancent une expédition punitive. Ils sont battus, mais un doute envahit soudain les anciens montagnards : qu'ont-ils abandonné, pour ce confort et ces cinq francs par jour ?

Entre une vie à la beauté austère et une grisaille confortable, peut-on vraiment choisir ? Les montagnes meurent, les anciens métiers sont oubliés. Parce que, quelque part, tout le monde préfère rester quelques heures de plus de dans le lit le matin, avoir une journée de repos par semaine, l'eau qui coule du robinet et pas mal au dos. On peut le déplorer, mais peut-on leur reprocher ? Oui, si l'on est resté fidèle à l'ancienne vie…

Une oeuvre inattendue, étonnamment grande et forte. Dessus plane, à peine évoquée, le spectre de la grande guerre : il n'y a plus d'hommes jeunes dans les villages...
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