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Critique de Sarindar


Un fils de roi qui attend son heure en rongeant son frein peut-il aimer son père qui n'entend pas lâcher une parcelle de son pouvoir ? Ce qui est arrivé au futur Charles V, lieutenant du roi puis régent, en l'absence de son père Jean II le Bon captif des Anglais, un père empêché qui n'entendait pas néanmoins que son fils qui avait pourtant à faire face à la révolte d'une bourgeoisie en colère fît cavalier seul, le futur Louis XI l'a connu plus encore face à son père Charles VII, mais dans des circonstances qui ne furent pas les mêmes. D'abord, grâce à l'intelligence politique de Charles VII, les Anglais avaient été mis hors du royaume de France sauf à Calais (Jeanne d'Arc n'ayant fait elle que les stopper sur la Loire), et notre pays retrouvait la paix. Ce retour à la normale ne plaisait cependant pas à tout le monde et de grands seigneurs qui avaient tenté de se soulever contre le roi et avaient cherché à embrigader dans leur rébellion appelée Praguerie le jeune Dauphin Louis, qui ne savait pas prendre son mal en patience et espérait jouer un rôle par tous les moyens, fatigué qu'il était d'attendre que son père voulût bien lui céder la place.
Dans les sept premiers chapitres de son portrait de Louis XI, Jean Favier analyse dans le détail cette situation et revisite les rapports entre le père et le fils.
Après la Praguerie, Charles VII, comprenant qu'il n'avait aucun intérêt à laisser l'impatient Louis croupir dans l'inaction, l'investit de missions de confiance assez importantes - notamment sur l'échiquier alsacien et suisse où le Dauphin apprit beaucoup de choses, notamment à voir combien on pouvait gagner à laisser se battre les autres - mais en veillant toutefois à ne pas laisser cet ambitieux marcher sur ses plates-bandes.
Plus décidé que jamais à montrer de quoi il était capable, Louis finit par se replier dans son Dauphiné en affichant son intention d'y gouverner seul avec des hommes dévoués à sa cause (et normalement cela aurait dû se passer ainsi puisque le Dauphiné était la terre du Dauphin et n'appartenait pas au roi). Mais Charles VII ne supporta pas ce mouvement d'indépendance et voyant que son fils n'entendait lui rendre aucun compte, il fit intervenir son armée pour punir le récalcitrant et lui confisquer la terre qui lui revenait. Louis fut obligé de demander refuge au duc de Bourgogne, Philippe le Bon, dont il devint un obligé. Notons que l'opposition entre le fils et le père fit une victime importante : Jacques Coeur l'argentier du roi Charles qui, apportant secrètement son aide au Dauphin (il ne fallait pas insulter l'avenir), fut démasqué et obligé de s'exiler sur une île méditérannéenne en laissant derrière lui une partie de sa fortune qui était considérable.
Louis attendit que son père, qui eut un long règne, trépassât, et sitôt ce dernier mort, il rentra en France avec la ferme volonté de prendre sa revanche : il écarta sans aucun ménagement et sans aucune délicatesse beaucoup des collaborateurs de son père, qui étaient restés fidèles à ce dernier, ne garda que ceux qui pouvaient encore lui servir et plaça un peu partout aux commandes des gens qui le suivaient depuis longtemps.
Il montra là un esprit plutôt étroit et ne sut même pas reconnaître tout ce qu'il devait à son père : des finances rétablies, une unité territoriale reconstituée, une prospérité économique en train de revenir.
Cependant, après son sacre à Reims, il fit dans Paris une entrée qui lui montra que l'influence du duc de Bourgogne y était plus présente et comptait davantage que l'arrivée d'un roi dans la capitale de son royaume. Il continuait de faire son apprentissage et cela lui désignait, d'entrée de jeu, ceux avec qui il allait avoir par la suite à se mesurer, notamment le comte de Charolais, fils de Philippe le Bon, celui que l'Histoire connaît sous le nom de Charles le Téméraire.
Jean Favier a fait là un travail remarquable, qui se poursuit sur sept cents pages, où tout le règne de Louis XI nous est décrit par le menu.


François Sarindar, auteur de Charles V le Sage, Dauphin, duc et régent (2019)
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