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Critique de zenzibar


L'auteur est notamment connu pour son livre « les derniers jours de Hitler » qui a servi de base à un film en 2005 d'Oliver Hirschbiegel, « La chute » avec Bruno Ganz dans le rôle d'Hitler, et qui a connu un succès mérité. Il est un spécialiste de l'histoire du III Reich
Cet essai sur la résistance allemande à Hitler couvre la totalité de la période du régime nazi soit de 1933 à 1945.
La principale qualité de cette oeuvre est de rappeler qu'Hitler a fait l'objet de nombreux projets de coups d'état, assassinats tout au long de son règne, celui de 20 juillet 1944 étant le seul véritablement connu du grand public . Il est vrai qu'il fut le plus spectaculaire et surtout soluble à 100% dans une version très rassurante de cette période de l'histoire avec les bourreaux et les victimes clairement et définitivement identifiés. Selon cette version, les Allemands et tout particulièrement les officiers supérieurs ont soutenu leur führer et l'idéologie nazie et seule une minorité, alors que la défaite devenait inévitable aurait essayé, avec amateurisme d'éliminer le dictateur.
Oui, l'attitude de l'élite de l'armée allemande fut à plusieurs reprises inadmissible et in fine complice de la barbarie. L'idéologie dominante au sein de cette corporation d'officiers supérieurs constituait un terreau favorable aux dérives qui furent celles des nazis, en particulier par haine du traité de Versailles et par la diffusion du mythe de l'armée allemande trahie par un complot en 1918 (le coup de poignard dans le dos). Hitler leur offrait l'opportunité d'assouvir leur besoin de réhabilitation, de redorer un prestige mise à mal par la défaite de 1918. Ces officiers pensaient qu'une fois leur autorité restaurée ils contrôleraient le « petit caporal » qui n'était pas de leur monde. Cette posture les conduisit à accepter les humiliations infligées à des responsables militaires au plus haut niveau comme Blomberg et Fritsch et à avaliser les assassinats commis lors de la nuit des longs couteaux
Mais ce constat ne doit pas éclipser que parallèlement et ce, dès le début du régime, des projets d'opposition traversèrent les esprits d'un certain nombre d'officiers au plus haut niveau.
Il serait trop long de citer toutes les tentatives, celle du 20 juillet 1944 est naturellement présentée de façon très complète et permet de comprendre et aussi malheureusement de ne pas comprendre certaines erreurs des conjurés. Deux autres tentatives me paraissent mériter un bref rappel.
La première a pour contexte la dramatique crise Tchécoslovaque du mois de septembre 1938, provoquée par la revendication d'Hitler sur les territoires peuplés par une minorité allemande, les Sudètes. Rappelons que la Tchécoslovaquie et la France étaient liées par un traité d'alliance et que les territoires convoités constituaient un dispositif d'une grande valeur stratégique militaire. Rappelons également qu'en 1938 l'armée allemande était hors d'état d'affronter l'armée française avec ou sans l'assistance anglaise.
Dans ces conditions, l'opposition militaire allemande, convaincue que la France ne céderait pas et qu'un conflit se traduirait par une défaite rapide et totale, avait minutieusement préparé un coup d'état avec l'intervention de forces armées pour neutraliser les dirigeants nazis et les centres névralgiques. L'action interviendrait dès le refus de la France et de la Grande Bretagne aux demandes d'Hitler, ce qui entrainerait de facto un casus belli par lequel Hitler perdrait la face. Ce projet fut torpillé comme on le sait par la capitulation franco-anglaise. Cette affaire de Munich laissera d'autant plus un gout d'amertume devant l'histoire que les conjurés avaient sondé la Grande Bretagne dont les responsables, non seulement n'avaient pas tenu compte de cette résistance allemande et last but not least n'avaient pas informé la France. le gouvernement britannique en la personne de Chamberlain était partisan d'une politique d'appeasement, alors que l'Espagne, la Chine étaient en feu, l'Autriche conquise (Anschluss), que les violations du Traité de Versailles s'étaient multipliées. Il est vrai que par anticommunisme Chamberlain et le gouvernement de droite français post front populaire, espéraient que ces belliqueux germains régleraient leur sort aux soviétiques et dirigeraient leur expansion vers l'est et non pas vers l'ouest. Ils avaient en fait inconsciemment assimilé et admis le programme de Mein Kampf. Si la faiblesse des gouvernements français ne doit pas être oubliée, l‘attitude du foreign office de sa gracieuse majesté qui a régulièrement été approchée, informée des intentions belliqueuses d‘Hitler par des opposants au nazisme fut tout simplement lamentable voire criminelle.
La seconde tentative qui peut être rappelée concerne cette bombe placée dans un avion où avait pris place en 1943 Hitler de retour du front russe. La mise à feu fut bien enclenchée mais pour une raison encore véritablement indéterminée la bombe n'explosa pas. La chance du diable…
Au total, on ne peut que regretter que toutes ces tentatives ne soient pas vraiment connues et reconnues dans l'histoire « officielle » à destination du grand public ne serait-ce que pour rendre hommage au courage exceptionnel de ces hommes. Dans le contexte de ce régime de terreur absolue ces hommes résistèrent d'abord avec dignité au niveau spirituel et ensuite tentèrent de matérialiser cette résistance par des actions diverses.
Outre une noire malchance, ces différentes tentatives souffrirent principalement de l'absence d'un leader qui aurait pu fédérer les opposants et convaincre les indécis. Certaines hésitations dans les moments de vérité furent très dommageables, c'est un euphémisme
A cet égard, il est indubitable que les gênes de l'obéissance militaire prussienne furent un frein pour certains pour franchir le rubycon alors que ce régime et ses dirigeants heurtaient leur conscience au plus profond
Enfin, on regrettera que l'ouvrage de Fest soit presque totalement silencieux sur la résistance que la société civile a pu initier. Même si les actes furent sans doute minoritaires, un état des lieux aurait été très intéressant On pense par exemple à certains représentants des églises.
Malgré cette lacune un livre de synthèse complet très intéressant qui prend sa place aux côtés des ouvrages de référence sur le régime nazi
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