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Critique de pilyen



Dans son nouvel essai, Caroline Fourest, vigie sensible et indispensable, se penche avec ferveur sur un concept très français : la laïcité. Nous sommes l'un des rares pays au monde à avoir séparé l'église de l'état, avec la fameuse loi de 1905, renvoyant le religieux dans la sphère privée. C'est le socle sur lequel, depuis plus d'un siècle, repose notre République. Ce modèle original, source de bien d'incompréhensions de part des autres peuples qui nous observent comme des bêtes curieuses, n'arrivant pas à imaginer un état sans la participation de quelque dieu, continue de résister malgré les incessantes attaques venues de partout ( médias, politiques comme religieux) et les nombreuses interprétations que l'on nous sert insidieusement depuis la vague d'attentats ( creuset du racisme, de l'intolérance, de la haine, responsable de la radicalisation de quelques uns). L'essayiste va démonter tout cela point par point, clairement, sans haine, sans hargne, avec juste un esprit clairvoyant qui rassure.
Dès la première partie, on plonge tout de suite dans le vif du sujet : régler leur sort à tous les faux procès divers et variés, venus de toutes parts (et même de journaux du soir !), de propagandes hallucinantes, parfois expédiées par les pays spécialisés dans la fabrication de djihadistes mais aussi d'un peu partout dans le monde. En multipliant les exemples, en décryptant les discours biaisés ou simplistes, en prenant appui sur les systèmes alentours où le religieux passe avant l'état, avec pour résultat un racisme encore plus prégnant que chez nous ( cf les USA), elle démontre qu'en aucune façon la laïcité ne favorise le radicalisme pas plus qu'elle ne fait de la France un pays raciste. Elle règle son compte à tous ces "spécialistes divers" qui ont leur place attitrée dans nos médias et qui habillent le mot " laïcité" d'intentions fausses, avec un verbiage prompt à semer la confusion plutôt qu'à éclairer les esprits ( et avec une volonté prosélyte évidente).
Ensuite, Caroline Fourest se penche sur les différents modèles de société ou comment on mêle ou sépare (rarement) le religieux et du politique. Tableau édifiant pour moi si français et si bien pétri de laïcité, et même inquiétant quand on perçoit, comme en ce moment, la reconfessionnalisation des esprits, qui va étrangement de pair avec la montée des droites extrêmes et des régimes fascisants. Après une quantité d'exemples, il apparaît que le concept de notre République laïque ( l'état libre de toute emprise de la religion) souffre d'être trop abstrait et surtout plus exigeant en matière de culture générale que celui, plus lisible, des pays démocrates où les églises sont libres de toute emprise étatique. D'où pour Caroline Fourest une urgence d'expliquer cette spécificité française qui nous protège bien plus qu'on ne le pense.
L'effort pédagogique qui devra être lancé, ne peut faire l'impasse sur l'histoire de cette laïcité, terreau indispensable pour une bonne compréhension. Depuis Henri IV s'enchaîne la longue succession de guerres à la barbarie insoutenable que les religieux ont imposé à la France durant des centaines d'années. ( C'est fou ce qu'à cause des religieux on a ou a eu comme guerres ou conflits.). le siècle des lumières et la révolution française ( avec Condorcet notamment) vont commencer à poser les premières pierres d'un édifice qui s'érigera finalement durant la IIIème République où des hommes politiques à fortes statures ont réussi, dans une adversité que l'on a un peu oubliée, à imposer leurs convictions fortes et modernes. ( Aujourd'hui, nos hommes politiques pourraient prendre modèle sur les fortes personnalités qu'étaient Jaurés, Ferry, Buisson ( Ferdinand, pas l'autre bien sûr !), Combes, Briand, qui n'ont pas eu peur de se battre pour des idées pas toujours populaires). Caroline Fourest rappelle la violence des débats, aussi bien à l'Assemblée Nationale que dans la presse, qui a précédé le vote de la loi de 1905. Depuis, en cent ans, la laïcité a subi quelques assauts ( Loi Debré, accords Lang-Cloupet, ...), quelques étrangetés ( le concordat Alsace-Lorraine) et un rajout, la loi égalitaire de 2004 concernant les signes religieux à l'Ecole Publique qui fut hélas le début d'un terrain de jeu polémique, révélant une fracture profonde de notre société et des débats sur lesquels la dernière partie de cet essai va se pencher. Fourmillant de détails, on voit apparaître le dangereux positionnement de certains journaux, des têtes pensantes universitaires bien moins ou franchement pas laïques malgré leur intitulé de chaire, qui fragilisent un peu plus chaque jour notre modèle. On essaie de nous promouvoir une laïcité plus ouverte, plus incluante.
La fin sur le blog
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