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Critique de Presence


Ce tome est le premier d'une série indépendante de toute autre. Il comprend les épisodes 1 à 6, initialement parus en 2018, écrits par Jody LeHeup, dessinés et encrés par Nathan Fox, avec une mise en couleurs réalisée par Dave Stewart. Il comprend également les couvertures originales et celle de la réimpression de l'épisode 2 réalisées par Nathan Fox, ainsi que les couvertures variantes réalisées par Marcos Martin (1 pour chacun des 6 épisodes), Dan Panosian, Andrew Robinson, Cliff Chiang, James Harren, Ryan Sook, Jerome Opeña.

Sur Mars en 2770, quelques années dans le passé, madame Morgan (une personne du troisième âge) est en train de contempler l'hologramme de son mari décédé. Elle est interrompue par Amanda Cross qui vient la chercher pour l'emmener dans un immense stade où a lieu une commémoration en l'honneur des milliards d'êtres humains morts lors de la destruction de la Terre. le lendemain, dans un studio de télévision, l'animatrice annonce la page météo animée par Nathan Bright. La page de publicité est lancée, et elle tempête sur le fait qu'il ne soit pas encore présent. le responsable de la chaîne l'appelle chez lui où il le réveille. Nathan Bright prend le temps de sa laver les dents, avant de bondir dans sa voiture avec son chien Sadie. Il arrive juste à temps et se lance dans son numéro fusant de réparties comiques pour présenter la météo. À proximité de Mars, un petit vaisseau spatial vient d'apparaître, avec pour seul équipage Marshal, Kade et White Light (Ema Oakley). Après l'émission, Nathan Bright se rend au bar d'à côté où il compte fleurette à Amanda la barista, peu impressionnée, mais qui accepte de l'accompagner pour un repas au restaurant. Après un moment de recueillement au mémorial, elle le raccompagne même jusque chez lui.

Alors qu'Amanda Cross caresse la tête de Sadie, la tête du chien explose sous l'effet d'une balle d'arme à feu. Cross réagit immédiatement en se jetant à terre, en prenant contact avec son chef Fitch pour lui demander du renfort, puis en empoignant Bright par le col de sa chemise pour sortir de là. Les 6 policiers en faction sur le toit sont neutralisés en quelques secondes par Marshal. White Light et Kade s'introduise dans l'appartement de Bright. Amanda Cross se révèle être une combattante impitoyable mais elle se fait attraper par Kade. Bright passe une épée au travers de ce dernier. À l'issue de cet affrontement destructeur, Nathan Bright a la surprise de voir Amanda Cross le tenir en joue avec une arme à feu et de l'accuser d'être Ian Black, le terroriste qui provoqué la destruction de la Terre le 14 avril 2763. Bright se retrouve transporté à bord d'un petit vaisseau spatial, détenu par une force spéciale de police, avec à sa tête Fitch, le supérieur hiérarchique de Cross. Commence alors un interrogatoire sans pitié sur sa personne pour lui faire avouer la vérité. Tout l'enjeu est de lui faire cracher le morceau sur Jenner, car tout semble indiquer que ce chef du groupe terroriste prépare une nouvelle destruction massive, peut-être l'anéantissement de Mars.

En découvrant cette nouvelle parmi la multitude de débuts de série publiés tous les mois par l'éditeur Image Comics, le lecteur ne sait pas trop si celle-ci est susceptible de l'intéresser. le scénariste n'a réalisé qu'une seule autre histoire : Shirtless Bear-Fighter Volume 1 (2017) avec Sebastian Girner, plutôt dans un registre comique et parodique. de même Nathan Fox n'a qu'une histoire à son actif : Captain Victory and the Galactic Rangers avec un scénario de Joe Casey. Enfin le texte sur la quatrième de couverture ne révèle pas grand-chose, même s'il est agrémenté de phrases élogieuses de Rick Remender, Garth Ennis et Frank Quitely. Il s'agit d'auteurs de comics e premier plan, comme les artistes ayant réalisé les couvertures variantes. le lecteur se lance donc l'histoire et il est vite surpris par la densité narrative. Il ne s'agit pas de textes ou de dialogues copieux, car les pages se tournent à un rythme normal, sans ressentir de pesanteur. C'est juste que le scénariste raconte une histoire consistante, et que le dessinateur réalise des planches copieuses, tout en restant lisibles. C'est d'autant plus flagrant si le lecteur compare un de ces épisodes, à un d'une série mensuelle de superhéros. Pour autant, LeHeup fait preuve d'une clarté impressionnante, ne noyant pas le poisson pour donner l'illusion d'un récit dense.

À la fin du premier épisode, la situation du très sympathique Miss(ter) Météo a complètement changé et l'enjeu du récit n'est rien de oins que d'éviter un génocide d'une ampleur planétaire. le scénariste inscrit donc son récit dans le registre de la science-fiction, Mars ayant été terraformée et peuplée, avec une civilisation humaine similaire à celle qui a pu exister sur Terre. Il ne semble pas y avoir d'extraterrestres, mais la technologie est futuriste et le voyage spatial existe dans une mesure non précisée. La dynamique du récit repose donc sur une forme de course-poursuite dont l'objet est de localiser le terroriste qui a élaboré la destruction de la Terre avant qu'il ne recommence, obligeant une agente spéciale (Amanda Cross) à protéger l'individu qui a perpétré la destruction de la Terre, qui est recherché par toute la population humaine. le lecteur se laisse prendre par cette dynamique, par le suspense qui s'installe Nathan Bright a-t-il vraiment été ce terroriste Ian Black ? Dans la mesure où ses souvenirs ont été effacés, s'agit-il toujours du même homme ? Peut-il échapper longtemps à la vindicte de toute une race ? Y a-t-il vraiment un nouvel attentat à l'échelle d'une planète ? En outre, le scénariste a plein de surprises dans sa manche, allant à des alliances inattendues à une capture inéluctable, en passant par des scènes d'action inventives.

Cette histoire ne se résume pas à une suit de scènes à grand spectacle dans un récit d'aventures. Jody LeHeup développe également ses personnages, auxquels le lecteur s'attache très rapidement. L'insolence et la confiance en lui de Nathan Bright le rend immédiatement sympathique, d'autant qu'il se fait tout de suite après chambrer par Amanda, montrant qu'il n'est pas si irrésistible que ça. Amanda Cross impressionne immédiatement par son assurance professionnelle, son efficacité, son courage, et un peu après par sa détermination farouche. le lecteur peut détecter dans son comportement une forme sous-jacente de désespoir la poussant à se battre en y jetant toutes ses forces et toutes ses compétences. Les autres personnages sont moins développés, avec souvent une fibre comique apparente, que ce soit Fitch et ses sarcasmes, Marshal et son cynisme, ou même Garren, l'ancien mari de Cross. le récit ne repose donc pas que sur l'intrigue, mais implique également le lecteur par ses personnages substantiels et faillibles. Les dessins contribuent également fortement à donner vie aux protagonistes. La vitalité et l'entrain de Nathan Bright en train de présenter la météo donnent immédiatement le sourire. le regard intense et les expressions de visage d'Amanda Cross attestent de l'intensité de son engagement. Les mimiques de Garren face à son ex-femme montre qu'il ne sait pas trop comment s'en sortir, jusqu'à quel point il doit la soutenir en souvenir du temps passé, mais aussi par rapport à son objectif. le lecteur sourit en voyant The Pearl animer une émission dans laquelle Ian Black est mis aux enchères au cours d'une spectacle avec des danseuses peu vêtues.

En effet, Nathan Fox ne se contente pas d'insuffler de la vie dans ses personnages, à travers leurs expressions de visage et leur langage corporel un peu appuyé dans certaines situations, soit pour un effet humoristique, soit pour un effet dramatique. Il investit également beaucoup d'efforts pour donner de la consistance aux décors, et à chaque scène. À l'opposé d'arrière-plans génériques en carton-pâte, chaque lieu dispose de caractéristiques le rendant très concret et unique. le lecteur peut ainsi se projeter aux côtés des personnages dans la foule pour la commémoration devant une structure sortant de l'ordinaire, détailler le désordre de l'appartement de Nathan Bright, se balader dans les rues de la capitale, marcher dans les coursives du vaisseau spatial de Fitch, reluquer les femmes en bikini sur le plateau de télé, voir défiler les rues et les avenues lors d'une course-poursuite en voiture. L'artiste se montre tout aussi en verve pour mettre en scène les séquences d'action spectaculaires, faisant ressentir la rapidité des mouvements, montrant le choc des coups portés, les techniques d'évitement, les conséquences des blessures, etc. Comme pour le scénario, le lecteur ressent la consistance de la narration visuelle, à l'opposé de la décompression ou de l'économie pour dessiner les pages plus vite.

Dans la production pléthorique d'Image Comics, rien ne permet de repérer cette série parmi toutes les autres. S'il cède à la curiosité, le lecteur découvre une histoire disposant d'une intrigue avec un bon suspense, un environnement de science-fiction bien utilisé, des personnages attachants, des rebondissements prenant par surprise, et des scènes d'action bien construites. Il bénéficie d'une narration visuelle tout aussi solide et tout aussi riche, avec une capacité impressionnante pour donner vie aux personnages. Que demander de plus ? La suite bien sûr.
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