C'est une autobiographie, l'auteur était ouvrier chez Michelin, maintenant retraité après 43 ans dans l'usine de Clermont-Ferrand. "Habillé de mes 17 ans et dévêtu de diplôme".
Il a commencé comme coursier, puis magasinier, manutentionnaire (poste très dur physiquement), phocomposition à l'imprimerie...
Certaines machines rappellent Chaplin ou Zola, les cadences, le bruit, les vapeurs, les audits chronométrés.
Certains postes etaient rémunérés "à la production", au nombre d'articles traités.
Les horaires en 3x8 à la production sont extrêmement fatiguant à cause du travail de nuit.
L'alcoolisme était un fléau, très rependu mais jamais évoqué et encore moins combattu.
Pas si bienveillante que ça la direction de Michelin, notamment sur les disparités sociales entre les cols blancs et les cols bleus et aussi la façon abjecte d'annoncer les licenciements en 1993. Lui même licencié le jeudi matin, avec comme argument qu'il ne valait rien. Michelin lui propose un autre poste dès le vendredi soir. Malgré ce rebondissement, cette cicatrice ne se refermera jamais. Seul le sport estompera la douleur.
A certains postes difficiles, il y avait une forte proportion d'ouvrier étrangers qui parlaient mal le français et qui parfois étaient méprisés par les contremaîtres.
Il rend aussi hommage aux collègues et chefs d'équipe qu'il a beaucoup aimé.
Il parle beaucoup des relations entre ouvriers et chefs de service, parfois conflictuelles, parfois cordiales, certains responsables méprisants d'autres bienveillants. Jean-Michel était un ouvrier compétant,exemplaire, qui savait aussi parler de belle manière à sa hiérarchie.
Un jour il est reçu par Édouard Michelin pour lui raconter son titre de champion du monde de marche athlétique dans la catégorie vétérans, à cette occasion il lui remet le maillot qu'il portait pour la médaille. Ce fut une rencontre très forte en émotions avec beaucoup de respect mutuel. Édouard Michelin disparaîtra dans un accident 4 ans plus tard.
Le récit se termine sur la fête organisée par ses collègues pour son départ en retraite. Un moment très émouvant. Jean-Michel reste un homme bien, honnête, ouvert d'esprit, bienveillant, courageux, sportif...
Ce livre n'est pas une complainte pour les ouvriers, ni un éloge de la manufacture Michelin.
C'est un ouvrage simple qui raconte la singularité de l'auteur, et de ce fait que tout ouvrier, toute personne, peut avoir de multiples talents.
Une belle lecture, parfois des tournures un peu forcées, mais on s'en fiche, l'écriture est très agréable.
J'ai aimé ce livre confidentiel.