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Critique de Alfaric


Dans la 1ère partie du double diptyque du cycle "Rigante" les héros celtes finissaient par l'emporter sur les légions romaines, mais 800 ans plus tard plus les choses changent et plus elles restent les même puisque impérialisme, colonialisme, acculturation et déculturation forcées font leur retour dans les Highlands avec la domination des Varlishes qui ont été jusqu'à s'approprier la légende de Connavar et Bane (de la même manière qu'IRL les descendants des Angles et des Saxons ont récupéré la légende d'un certain Dux Bellorum brittonique). Nous sommes donc toujours dans un univers parallèle pas très différent du notre, par bien des aspects dans une uchronie car on reconnaît immédiatement les Îles britanniques du XVIIe siècle divisées entre Anglais, Gallois, Écossais et Irlandais mais aussi entre Cavaliers partisans du Roi et Têtes-Rondes partisans du Parlement…


Nous parcourons donc de nouveau les cols enneigés aux forêts aux senteurs résinées, les vallées embrumées, les landes et les bruyères recouvertes par la rosée, et nous glissons très joliment d'un personnage à l'autre d'une magnifique comédie humaine : les jeunes Kaeling Ring et Gaise Macon en quête d'apprentissage, la vieille Caretha à la fois voyante et guérisseuse, Alterith Shaddler le professeur d'école sévère mais juste, Maev Ring la redoutable femme d'affaire rigante aux cheveux roux, Galiott la Frontière le policier varlish qui fait tout pour éviter les vagues, Banny le petit miséreux magicien des mathématiques, Mulgrave l'épéiste maître d'armes, Ramus l'apothicaire humaniste, Taybard Jaekel, l'adolescent métisse qui ne sait plus quelle est sa place, Chain Chara le boxeur varlish digne successeur de Mohammed Ali (il y avait le même dans "La Légende de Marche-Mort" ^^), Huntsekker le chasseur de primes qui se prend pour l'Ankou, Call Jace le chef des Rigante Noirs et ses enfants, le sanguin Bael et la fougueuse Chara (entre racket et vendetta on dirait un mafieux indépendantiste méditerranéen ^^)… Mais aussi un adolescent qui par concupiscence se laisse entraîner dans un acte sordide, un capitaine tourmenté par la méchanceté de sa mère et la bonté de celui que par carriérisme il a choisi de tuer, un jeune homme consumé par le désir de vengeance et qui en voulant creuser la tombe de celui qui le hante finit par creuser sa propre tombe, ainsi qu'un traître en puissance rongé à la fois par la honte, l'envie et la jalousie… Au final il n'y a ni véritables bons ni véritables méchants, et tout est peint en subtiles nuances de gris…
Cette narration est un héritage de la littérature anglaise, qu'on retrouve par exemple fréquemment chez Agatha Christie, mais personnellement je n'avais pas lu depuis quelque chose d'aussi fluide et d'aussi sophistiqué depuis mes passages chez James Clavell (je ne sais pas si le maître anglais de l'heroic fantasy a considérablement amélioré sa plume en épousant sa correctrice, ou si le traducteur Alain Névant qui laisse encore passer 9 fois du « maléfique » et « malfaisant » avait mangé du lion). C'est donc à travers les regards des uns et des autres nous découvrons les deux personnages principaux que sont Jaim Grymauch, le champion rigante aimé de tous, mais plein de failles et de tourments car il y a encore l'obscurité en lui, et le Moïdart, le gouverneur varlish détesté de tous, mais plein de failles et de tourments car il y a encore de la lumière en lui… Alors oui on retrouve avec Kaeling Ring un adolescent tourmenté fils d'un héros décédé, qui malgré ses doutes va retrouver confiance en lui et en l'humanité grâce à Jaim Graymauch son père de substitution, et avec Gaise Macon un adolescent tourmenté qui vit dans l'ombre de son père à la fois aimé, admiré, craint et haï, qui malgré ses doutes va retrouver confiance en lui et en l'humanité grâce à Mulgrave son père de substitution…. Peur, Colère, Haine, Souffrance : tous ont été tentés ou vont être tentés de passer du Côté Obscur de la Force, donc ne soyez pas surpris de retrouver les archétypes starwarsiens (donc de la Quête du Héros aux mille et un visages), et reconnaître ici ou là les ombres tutélaires d'Obi-Wan Kenobi, de Luke Skywalker, de Palpatine et de Dark Vador (associer Highlanders et Jedis, mais quelle idée géniale !^^)… Et si Jaim Grymauch est indiscutablement le héros de ce tome 3, préparez-vous à de sacrés twists dans le tome 4 avec Faucon du Saule !

Au final OMG David Gemmell réussit à lui tout seul tous les classiques du roman historique, car Sir Walter Scott leur père fondateur est en lui : "Waverley", "Guy Mannering", "Rob Roy", "Une légende de Montrose", "ivanhoé", "Les Aventures de Nigel", "Peveril du Pic", "Redgauntlet", "Woodstock", "Chroniques de la Canongate"… (récits régulièrement adaptés à la télé et à la radio au Royaume-Uni, mais qualifiés en France de récits jeunesse poussiéreux et sans intérêt par les prescripteurs d'opinion : les commissaires littéraires franco-français continue de battre les records du monde de la connerie élitiste ! FDM)

On rit, on pleurs, on tremble : nous au coeur du cape et épée et anglais et c'est le pied ! On retrouve donc le côté épique, le côté tragique, le côté romantique et la lutte des classes Sauf que le XIXe et le XXe siècle sont passés par là, et que David Gemmell à qui on a raconté les heures sombres du nazisme et qui a connu les sombres heures du thatchérisme va plus loin… La société ségrégationniste qu'il dépeint est bouleversée par un crime odieux qui va réveiller les consciences, et on découvre les varlishes pauvres, ou « Varlishes en kilts », relégués au même que les Rigantes considérés par l'autoproclamée bonne société comme une race inférieure. Mais pour que les mensonges suprématistes perdurent il ne faut pas qu'un « inférieur » puisse faire jamais aussi bien qu'un « supérieur », ou pire encore mieux qu'un « supérieur »… Quand la courageuse Maev est confrontée à l'avidité des petits crevards et l'ambition des grands crevards, on découvre un système manipulé et corrompu par le pouvoir et l'argent…


Le monde se divise définitivement en deux catégories : les êtres humains qui ont compris qu'ils devaient apprendre à vivre ensemble comme des frères pour ne par mourir tous ensemble comme des idiots, et les homines crevarices qui n'en finissent plus de diviser pour régner parce qu'ils en n'ont rien à secouer de l'humanité ! Donc votez bien !!!
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