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Critique de Pol-Art-Noir


Dick Lapelouse est un tueur à gages pas comme les autres : disponible, accessible même, puisqu'il pratique cette activité en version hard discount. Son credo rédempteur, après quinze années de bons et loyaux services à exercer ses talents auprès de la mafia marseillaise : offrir aux plus démunis la possibilité d'obtenir les mêmes prestations que celles réservées habituellement aux plus riches. Un marché potentiel inépuisable…
Après tout, qui n'a jamais eu une envie de tuer, même passagère ?
Les affaires tournent si bien que Dick peine à répondre à la demande tout en assurant le côté administratif de son entreprise, par ailleurs légalement enregistrée. Aussi se résout-il à embaucher une secrétaire ; ce sera Camille.

Je l'ai choisie pour son poids — quatre-vingt-six kilos sur ma Roberval mentale —, sa taille — un mètre soixante-deux selon ma toise visuelle —, son âge — cinquante-cinq ans à vue de pif — et son goût immodéré pour les assemblages vestimentaires douteux (…)

Une employée qui sera bien vite mutualisée avec son voisin de palier, le docteur Braun, psychiatre de son état, avec qui il s'est lié d'amitié et qui a fini par le prendre en analyse.
Tout en poursuivant son business, Dick est en pleine introspection. Il s'interroge. On assiste donc à une alternance entre ses assassinats commandités divers et variés et les séances chez son voisin psy. Dick est surmené, il frise le burn-out, est sujet à des hallucinations durant lesquelles une femme lui apparaît, qu'il appelle Dionne et qui pourrait bien être sa propre conscience (qu'il a choisie plutôt canon).
Arrive alors dans son bureau le cas de Carlos Llanos et de son père Ramon Suner, l'ordure suprême. Franquiste, raciste, antisémite, acoquiné avec les nazis, membre de la division Charlemagne, passé entre les mailles du filet à la libération, marié à une femme juive qu'il a réduite en esclavage et qui a fini par se suicider, père de deux enfants qu'il a martyrisés avant de les abandonner.
Il va falloir « tuer le père »…

Il ne faut pas confondre « con » et « connard », ce serait faire fi de la notion de volonté, dixit Dick Lapelouse, tueur à gages philosophe.
Sébastien Gendron reprend ici le personnage central du Tri Sélectif des Ordures, paru initialement sous la forme d'un feuilleton accompagnant la newsletter de la librairie spécialisée de Christophe Dupuis, Entre-deux-Noirs, avant d'être édité chez Bernard Pascuito en 2008, de retrouver son format à épisodes en 2013 et de connaître enfin une édition poche complète et augmentée en 2014. On peut parler de succès…

D'une manière ou d'une autre, j'aime à penser que chaque fois que je terrasse un salopard qui faisait souffrir un être démuni, c'est comme si je venais mettre des fleurs sur la tombe d'une des victimes de ma précédente vie.

On s'en doute, et c'est un peu la marque de fabrique de Sébastien Gendron, on est la frontière entre la réalité et l'absurde. Tout en menant sa barque avec un sérieux de tous les instants, le contrepied est permanent.
Pour autant, en remettant le couvert avec la même recette, ce qui avait la saveur de la nouveauté prend ici un goût de réchauffé. Certes, les ingrédients n'ont pas changé, mais le « chef » est moins inspiré, il répète sa partition, parfois jusqu'à l'écoeurement, comme avec ce final confus et précipité qui oublie de refermer certaines « portes » qu'on aurait cru essentielles tout au long du récit.
Mais où est donc passé Dionne ?
Bien sûr, sous le vernis de la franche déconnade, sont aussi présentes quelques réflexions bienvenues lorsque Dick s'épanche et s'interroge sur le divan de son pote psychiatre, mais elles ne viennent pas effacer cette impression d'une construction brouillonne.

Je pense à ces romans où vous ingérez cinq cents pages de rebondissements outrageux pour l'intelligence et où, quand vous sentez arriver le dénouement, vous vous rendez compte qu'il ne reste que trois pages. Trois pages pour expliquer les cinq cents autres. (…) Au bout, la solution ou tout au moins la fin. Il me tardait d'en finir.

Prémonition ou intuition ?
Lien : https://polartnoir.fr/livre...
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