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Critique de Wyoming


Ce très beau roman où la nature des côtes déchiquetées des Farallon Islands, cinquante kilomètres environ au large de San Francisco, sert magnifiquement un huis clos pathétique, violent, rarement tendre, ne sombrant jamais dans le mélo, avec des personnages hauts en couleurs, portant tous leurs mystères, quelques fois dévoilés peu à peu, d'autres fois dissimulés à jamais.

L'héroïne, Miranda, trentenaire célibataire, photographe aventurière, est venue passer une année avec un groupe de biologistes, année au cours de laquelle elle pourra photographier requins, baleines, éléphants de mer, phoques et une variété infinie d'oiseaux, dans ces îles hostiles où elle verra s'écouler saisons et événements qui impacteront irrémédiablement sa vie.

Dès les premières pages, on apprend que Miranda est orpheline de sa mère, tuée dans un accident de la circulation alors qu'elle-même était agée de seulement quatorze ans. Et depuis vingt ans, elle lui écrit quotidiennement, confiant ses lettres qui ne seront jamais lues au hasard des postes, glissées dans des murs, des arbres ou sous des pierres. Miranda est donc la narratrice de son aventure humaine, de sa jeune vie privée prématurément de l'amour maternel et de tout l'accompagnement d'une mère pour aborder l'existence. Ses lettres relatent essentiellement du factuel, les événements survenus sur les îles, mais aussi de nombreux retours sur sa vie passée qui mettent en évidence le manque de cette mère, manque devenant encore plus intense dans les suites de son vécu sur les îles.

Malgré ce manque flagrant, Miranda est une vraie héroïne, une combattante, attentive et curieuse, dévoilant quand même quelques secrets à ceux de ses compagnons qui lui paraissent développer les meilleures qualités d'écoute. Au fil ses lettres, elle analyse les personnalités de ses partenaires, deux femmes et quatre hommes, elle sent la haine à son égard s'installer chez l'une d'elles, Lucy, elle découvre les attentions désintéressées de l'un des hommes, Mick, la violence sexuelle d'un autre, Andrew, les qualités d'observation et de compréhension de Galen, sans doute le plus mystérieux qui partagera avec elle quelques-uns de ses secrets.

Ce huis clos se déroule dans un univers maritime grandiose avec l'approche des grands maîtres de la mer, requins, baleines, mais aussi phoques et goélands meurtriers. Les images des animaux, des tempêtes, des nuits pluvieuses, orageuses, venteuses, des ciels étoilés, du cycle de vie des animaux, leur reproduction, leurs destins et aussi ceux des humains, finalement assez proches, avec quelquefois plus de méchanceté et de volonté de détruire.

Miranda livre aussi de belles analyses sur la photographie, ces prises d'images instantanées au travers desquelles elle ne perçoit pas toujours la réalité de l'instant vécu. Elle sera d'ailleurs amenée à réaliser quelques photos volées d'amour humain, décrites avec délicatesse par Abby Geni.

Et toute cette délicatesse, celle de l'héroïne notamment, côtoie une violence qui par moments s'exacerbe, trouvant des points d'orgue saisissants, en une construction romanesque indéniablement très réussie qui fait de Farallon Islands un superbe roman de nature, d'amour et de mort.
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