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Critique de Gabrielle_Dubois


Delphine Gay, épouse de Girardin, était une femme comme il n'en existe que très peu : à une époque où il y avait sans doute encore des muses, elles avaient dû se pencher sur son berceau !
Delphine était poète et aussi romancière ; elle excellait dans l'écriture de pièces de théâtre aux dialogues ciselés et aux intrigues inattendues ; elle était journaliste à l'esprit et l'humour mordants ; elle tenait un salon littéraire où les plus grandes plumes de son temps ne se faisaient pas prier pour venir causer, tant elle charmait par son esprit vif, ses réparties amusantes et justes, sa bonté et, ce qui ne gâchait rien, sa beauté.

Dans la première partie de Il ne faut pas jouer avec la douleur, on retrouve tout l'esprit d'analyse, de critique, d'humour, d'ironie et de bonté de Delphine Gay. L'auteur décrypte comme sous un microscope les machiavéliques mécanismes de séduction d'un grand séducteur. C'est retors, précis comme une horloge suisse, implacable comme les dents d'un requin.
Puis nous faisons ensuite connaissance avec une jeune veuve qui va devenir la proie de ce séducteur. C'est comme un chat qui joue avec une souris et qui sait exactement qu'elles vont être ses réactions à ses apparentes indifférentes, à ses coups de patte vifs et étudiés.
Cette jeune femme aimable et triste semble une proie bien trop facile, mais… mais c'est sans compter sur les immenses capacités des femmes à endurer, à rebondir, à réfléchir sur elles-mêmes et finalement à pardonner et à aimer, et la fin est émouvante à souhait.
Femmes, relevez le menton, ne vous abaissez pas à employer les méthodes des hommes pour survivre, et tournez votre regard vers les silencieux et les bons, et il y en a.
Delphine de Girardin a étudié l'Homme et la société et nous la rend avec un esprit merveilleux et plein d'humour dont voici quelques exemples :

« À Paris et partout, les effets de la mode sont les mêmes ; cela part comme une traînée de poudre, mais il faut y mettre le feu. Il y a des gens qui ont tout ce qu'il faut pour être à la mode : la poudre ne leur manque pas ; la traînée est faite, mais on n'y met point le feu, et ils restent ignorés toute leur vie. »

« Bien heureuses les femmes ridicules ; elles sont de tous les plaisirs. On ne peut se passer d'elles. Plus elles sont laides, sottes, désagréables, et plus elles sont indispensables dans une fête ; plus elles sont inconvenantes, et plus elles paraissent aimables. Leur niaiserie donne de l'esprit à tout le monde ; il faudrait être bien niais soi-même pour ne pas trouver à dire quelque bonne plaisanterie à propos d'elles. Leur tristesse est une joie universelle. On rit pendant des heures de la plainte qui leur est échappée, de l'accident qui leur est arrivé ; la moindre de leurs élégies est une source inépuisable de bouffonneries et de mystifications. Plus ces femmes sont malheureuses, et plus elles sont amusantes ; mais tout en se moquant de leurs peines, comme on sait bien les en consoler ! »

« Un sot qui parle avec assurance peut dire bien des bêtises impunément ; dans les conversations, dans les journaux, nous laissons passer les plus lourdes niaiseries sans les comprendre ; cela explique pourquoi nous avons osé nous proclamer le peuple* le plus spirituel de l'univers. »
* Nous, les Français ! Delphine Gay dit toujours la vérité, et chacun en prend pour son grade !

« Une femme peut cacher qu'elle souffre, qu'elle s'ennuie, qu'elle aime… mais elle ne peut cacher qu'elle attend. »

« Pour une femme qui aime ou qui croit aimer, ce qui est la même chose, si ce n'est davantage, il n'existe qu'un seul être sur la terre ; tout le reste de la race humaine est immédiatement supprimé ; l'homme adoré est seul chargé de supporter tous les événements qui arrivent. Quelqu'un a fait une chute de cheval… c'est lui ! — Un jeune homme s'est battu en duel… c'est lui ! — le tonnerre est tombé sur un voyageur… c'est lui ! — Hélas ! on a raison de craindre pour ce qu'on aime follement ; toute personne trop aimée est par cela même en danger ; l'idolâtrie porte malheur. »

« Mon Dieu ! qu'elle aurait voulu lire cette lettre ! Ah ! que souvent il est pénible d'être une femme bien élevée ! Une bonne éducation est un trésor qui, comme tous les trésors, est un grand sujet d'embarras pour celui qui le possède. Que de fois les gens bien élevés sont tentés de s'écrier, comme le Bourgeois gentilhomme, mais dans un sentiment tout opposé : « Mon père, ma mère, que je vous veux de mal, non pour m'avoir laissé ignorer les belles choses, mais au contraire pour me les avoir trop bien apprises, pour m'avoir enseigné à me priver toujours de ce qui me plairait tant ! »
Lien : https://www.gabrielle-dubois..
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