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Critique de Philios


Une femme âgée, Beatrix Adderley, vit seule dans son joli cottage en bord de mer, elle se sent menacée. Une nuit, un homme s'introduit chez elle. Elle sait qu'il vient pour la tuer et l'attend, sans rien tenter pour se défendre ni se sauver. Comme elle en avait l'intuition, Beatrix va être assassinée. C'est de cette manière saisissante que s'ouvre ce roman. Dès ses premières pages, le lecteur va être happé, jusqu'à son dénouement. le mystère autour de la mort de Beatrix va mettre en scène ses proches : neveu, nièce, un antiquaire véreux et son frère, le biographe du frère de la victime… Mais c'est à travers Charlotte, la nièce de Beatrix, jeune femme dont les questionnements et hésitations épousent ceux du lecteur, et fil conducteur du roman, que l'on va suivre l'évolution d'une enquête dont le noyau semble être le frère de la vieille dame assassinée : Tristram Abberley, un poète célèbre disparu lors de la guerre d'Espagne. L'auteur nous embarque dans une Angleterre déjà ancienne, déjà dépaysante, pour laquelle on peut éprouver une certaine nostalgie (le roman date de 1992), une époque sans addiction au portable ni aux réseaux sociaux. La famille Abberley évolue dans un milieu aisé, protégé, à Londres et dans ses environs, mais l'auteur nous entraîne à un moment, effet de contraste, dans les collines abruptes et sauvages du Pays de Galles. Bien que situé en Angleterre, il n'y a pas réellement dans le Monde des Abberley ce parfum têtu d'« Englishness » (comme on pourrait retrouver dans des romans anglais plus anciens, policiers ou non). C'est un univers moderne qui nous est décrit, international, un monde un peu froid, égoïste et très matérialiste. Sans poésie aucune, alors que l'énigme repose - paradoxe - sur l'oeuvre d'un poète et de valeurs qui n'ont rien à voir avec l'enrichissement matériel. Un univers aux antipodes de celui de Jane Austen ! L'auteur aurait pu, pour compenser cette froideur, nous proposer des personnages avec des personnalités plus originales, offrant des particularités ou particularismes attachants. Afin aussi de nous les rendre plus vivants, plus proches. Mais, après tout, sans doute a-t-il raison : nous sommes dans un monde devenu lissé où les goûts des gens sont devenus banals et ordinaires, peu importe la classe, les traits distincts liés à la culture et aux humanités ayant disparu. Les anniversaires mondains et impersonnels dans une villa au bord de la Tamise ont remplacé les soirées de lecture auprès d'une grande bibliothèque, comme celle de la vieille Beatrix (lesquelles bibliothèques auront définitivement disparu dans les années 2020). le personnage de Derek semble un peu falot et ordinaire pour inspirer davantage que de la sympathie. Hormis ces réserves, et un ton un peu impersonnel, ce roman est un formidable polar, avec une intrigue d'une réelle originalité. Il est aussi très bien écrit. Sa construction est d'une remarquable efficacité : l'auteur à l'art d'enchaîner les chapitres en suscitant à chaque fois un intérêt soutenu. On ne lâche plus ce page-turner de grande qualité. Un succès auprès d'un lectorat de plus en plus large amplement mérité.
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