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Critique de KrisPy


Nième tome de la célèbre saga d’Anne et Serge Golon, Angélique et le Nouveau Monde se démarque largement de tous les autres tomes. Déjà, dans Angélique se révolte, on avait pu remarquer que l’Histoire derrière l’histoire était très présente, et nourrissait concrètement l’intrigue un peu basique de la quête de l’amour disparu.
Quinze ans ont passé depuis ce soir maudit où la jeune femme du Comte de Peyrac, Angélique de Sancé de Monteloup, s’effondrait en place de grève devant le bucher qui venait de bruler son mari.
Quinze années de lutte, de courses effrénées, d’espoirs et de déceptions… Quinze années pendant lesquelles Angélique a vu naitre, partir ou mourir ses enfants.
Et enfin, elle l’a retrouvé son amour perdu, son Comte défiguré au charisme puissant, sous le masque du Rescator, ce pirate de Méditerranée qu’elle avait déjà croisé. En prime, elle retrouve aussi ses fils, Cantor et Florimond qu’elle croyait morts.
Ayant quittés La Rochelle sous le feu des canons du Roi de France, avec à son bord des protestants fuyant les dragonnades (voir Angélique se révolte), le navire de Peyrac accoste après un voyage éprouvant, sur les rives de Gouldsboro, la colonie libre fondée par Peyrac et ses hommes sur les côtes du Maine. (Voir Angélique et son amour.)
Au début de l’été, un groupe d’une trentaine de personnes, dont Angélique, sa fille Honorine, ses fils, une famille de Huguenots, tous menés par Peyrac et ses hommes les plus surs, prennent le chemin de l’arrière-pays, pour rejoindre le fort de Katarunk, au cœur des Appalaches. Ils souhaitent trouver la paix et la tranquillité dans ce lieu retiré, et Peyrac compte y faire fructifier ses mines…
-Rappelons la situation historique de l’époque. Nous sommes aux alentours de 1680, les Anglais, protestants, ont déjà bien colonisé le Nord de l’Amérique. La région du Maine est déclaré province anglaise par le Roi d’Angleterre bien qu’en partie française ; le Canada est reconnu français, donc catholique. Nouvelle-France est son nom à cette époque.
Les guerres de religions se poursuivent loin du vieux Continent, les indiens y sont mêlés, chacun son camp ; avec environ six mille Canadiens Français catholiques au Nord, deux cent mille Anglais protestants au Sud, s’échelonnant le long des rivages et de l’embouchure des grands fleuves, avec à l’Ouest deux cent mille Iroquois pro-Anglais, et à peu près autant d’Abénakis, Algonquins, Hurons, à l’Est, pro-Français... (Les Hurons sont d’origine iroquoise « mais se sont séparés de leurs frères de la Vallée Sacrée en des temps lointains pour des raisons oubliées, et se considèrent depuis comme ennemis ancestraux ».)
Dans ces forêts du Maine, qui montent vers le Nord, on a des trappeurs appelés à l’époque les coureurs-de-bois, qui font trafique de peaux et boucanent de l’eau-de-vie qu’ils échangent contre de l’or ou d’autres peaux aux Indiens, ces Indiens de toutes tribus alliées avec les Français : les Sagamores, Abénakis, Patsuikets, Algonquins. Ces Indiens, tellement acquis à la cause catholique, qu’ils enlèvent des familles anglaises pour les amener aux français de Québec afin qu’ils soient baptisés en échange de nourriture, d’alcool, de babioles, d’une place au paradis…
Et il y a les Iroquois, peuples des Cinq Nations, dont l’emblème est la Tortue. Ils aiment capturer et torturer les jésuites qui s’avancent toujours plus loin pour tenter de les convertir, et font la guerre aux tribus qui s’allient aux blancs. Ils peuvent traiter avec l’anglais aussi bien que le français, ou les tuer, parce qu’ils leur déplaisent. Mais sont plutôt du côté des Anglais car ils détestent les Jésuites.
Les Jésuites, ces moines/prêtres catholiques intégristes proches de l’inquisition, qui vouent leur vie à faire des disciples, ont sur ce nouveau continent une puissance accrue. Ils sont la conscience chrétienne du Nouveau-monde… Ils font office de conseillers dans les salons de Québec. Et leur langue fielleuse et doucereuse encourage souvent à la guerre, à la vengeance, la destruction.
C’est dans ce climat que la troupe du Comte de Peyrac arrive au fort, pour le trouver occupé par des français de Québec… (Katarunk a été bati sur les rives du Kennebec, fleuve qui coule du Saint-Laurent au nord, et file vers le sud. C’est un lieu stratégique. Les rivières étant « les autoroutes » de l’époque).
Le Comte de Loménie-Chambord et quelques autres nobles du Saint-Laurent coureurs-de-bois, ont été dépêchés sur place pour « accueillir » Peyrac. Plusieurs tribus d’Indiens les accompagnent. La tension est palpable…
Peyrac va devoir traiter avec ces représentants de la Nouvelle-France, tout en diplomatie : il ne faut froisser personne, ne se mettre personne à dos, ni les Français, ses proches voisins qui gouvernent le Nord, ni les Anglais, qui tiennent le Sud et avec qui il a des accords, et ne pas s’aliéner les Iroquois. Ceux-ci auront droit de passage, en échange, ils ne s’attaqueront pas aux autres tribus installées sur les bords du fleuve. Les Français pourront ainsi aller et venir sans crainte de se faire occire à chaque passage.
Après une soirée de festin, l’accord enfin trouvé, les Français sont rassurés sur les intentions de Peyrac, et conquis par la beauté et l’intelligence d’Angélique. Ils repartent enfin, suivis de leur contingent d’Indiens.
Mais les Iroquois, furieux de voir que le Comte s’est allié aux Français, viennent lui demander des comptes. Ils ont entendu parler de Peyrac et de sa puissance : il fait éclater les montagnes et pleurer les étoiles… En effet, Peyrac est expert en explosifs et en feux d’artifices, et ils ne veulent pas qu’il s’allie avec d’autres qu’eux !
Grace à Angélique, une entrevue est possible. Un festin pour sceller l’accord est organisé. A l’aube suivant cette nuit d’agape à l’indienne (débauche de nourriture, d’alcool et de tabac), quatre chefs des Cinq Nations sont assassinés par un des Français revenu se venger d’avoir été enlevé enfant par les Iroquois et d’avoir vu sa famille massacrée…
Les tribus d’Iroquois rassemblées non loin de Katarunk sont prêtes à venger leurs chefs… Un seul est rescapé ; c’est lui qu’il faut convaincre, c’est à lui qu’il faut expliquer que Peyrac a été trahi également par les Français, sous son propre toit… Pour marquer son dégout envers les agissements des Français, et son respect envers les Iroquois, Peyrac devra bruler le fort de Katarunk avec une grande partie de ses biens (dont la nourriture).
N’ayant plus d’autre choix, la troupe de Peyrac continue son périple à travers les Appalaches en direction de Wapassou, petit fort que le Comte a fait construire pour exploiter ses mines d’or et d’argent. Plus de trente personnes vont ainsi débarquer dans ce minuscule abri.
Heureusement, l’été indien s’est installé, et la petite colonie va avoir le temps d’agrandir et de faire provisions pour tenir l’hiver qui s’annonce. Commence alors pour Angélique le temps de découvrir enfin l’homme qu’elle a retrouvé… Ils vont avoir un long hiver pour se réapprendre, pour se ré-apprivoiser. Peyrac avait laissé pour veuve une jeune femme inexpérimentée de la vie, il retrouve une femme mûre et accomplie, qui a fait sa vie loin de lui.
Les évènements de l’hiver ne feront que les rapprocher, eux les amants éternels, là où d’autres se seraient déchirés. Ils vont devoir encore affronter bien des aléas dans leur coin retiré du monde, car le monde sait où les trouver… En particulier ce Jésuite charismatique et inquiétant, le père d’Orgeval, qui s’est mis en tête qu’Angélique pouvait bien être « la Démone » annoncée par la vision d’une nonne québécoise très respectée.
Le fantôme de l’Inquisition venu du Vieux continent n’en finit pas de poursuivre les Peyrac.
Angélique et le Nouveau-Monde est mon épisode préféré de la saga. On est en totale immersion dans le monde des colons de cette époque, l’amour entre Peyrac et Angélique n’est pas là l’essentiel, loin s’en faut ! On découvre un univers réaliste, violent, dur, cruel, mais plein de vie et de force. Le style simple et cultivé d’Anne et Serge Golon font ici des merveilles pour la fluidité de l’histoire, on apprend des tas de choses sur l’Histoire du Nouveau-Monde et du Canada.
A suivre, La tentation d'Angélique - Angélique et la Démone.
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