AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Ambages


« Il fait grand vent, Madame... » Quelle triste idée d'aimer un cormoran.

Mais quel plouc ce péquenot ! A chaque fois qu'on vient passer un mois de vacances l'été dans notre maison de famille avec mes parents, lui et sa ribambelle de frères et soeurs se moquent de nous les parisiens « têtes de chien ». Et mon prénom évidemment, avec les brillantes idées de maman, n'aide pas : George sans S ce qui devint pour les bretons du cru « George Sanzès ». « Nous nous étions toisés comme les représentants de deux espèces inconciliables. »

On a grandi. Comme ça, chacun derrière sa barrière. le temps est venu de penser au mariage. C'est sa soeur qui a choisi cette solution pour s'éloigner de la ferme et des frères, marins-pêcheurs. Elle voulait voir au long-cours. Elle m'a choisi comme demoiselle d'honneur. Je suis revenue au village pour la fête et vérifier si son frère avait changé. Je ne voulais pas le revoir sans savoir comment nous avions grandi après une baignade nocturne que nous avions partagée deux années plus tôt (en tout bien tout honneur à cette époque nous étions timorés).

A la fin de la fête nous nous sommes retrouvés seuls, dans une petite cabane et plus rien n'a compté. On ne se connaissaient pas. Seuls nos corps semblaient se connaître et se reconnaître « le corps sait ce qu'il veut au moins, il est imperméable aux raisonnements, il est implacable, le corps. » Et ça a commencé. Pour des années. Des années et même des décennies, de manière discontinue. On s'est vus peut-être quinze fois ...en trente ans. Une semaine en moyenne à chaque fois, autant dire que c'était des enfilades de retrouvailles et de déchirures. Vous y croyez à une histoire pareille ? Moi oui.

« Dites-moi que si je veux garder cet amour-là, il faut accepter de le perdre. » Je n'ai pas voulu l'épouser car je sentais que nos mondes étaient incompatibles et que je ne pourrais le supporter. « Celui qui parle le langage de la raison est celui qui aime le moins. Gauvain savait déjà cette vérité-là. » Que j'ai aimé le voir, voir son corps, faire l'amour avec lui. Même si « faire l'amour » est bien fade à côté de se que je vivais, « la recherche de ce frisson mystérieux qui ne se fonde sur rien que puissent traduire les mots humains. »

Dans ma tête la vielle duègne s'ingéniait à me dire que ce n'était qu'un plan cul. Oui forcément. Mais un plan cul qui ne faiblit pas malgré le temps et la distance qui nous séparaient, vous ne pensez pas que cela porte un autre nom ? Plus de trente ans à s'aimer sans que jamais les corps se lassent, j'ai bien une idée mais George tu ne vas pas l'aimer mon idée. Gauvain était plus honnête avec lui-même, il le disait « tu es un peu ma femme, après tout. »

« Ils ont leurs mots de passe tout de même ; ce stock d'allusions, de plaisanteries, de complicités, de souvenirs de jeunesse aussi, sans lesquels un amour n'est qu'une aventure sexuelle. »

Il va lui demander d'écrire leur histoire « il faut expliquer comment ça peut arriver, une histoire pareille. » Et elle de répondre « il n'y a rien de plus impossible à raconter qu'une histoire d'amour.» « Cette rage de comprendre le sexe comme on comprend les mathématiques ! le sexe n'a d'autres sens que lui-même. »

Alors je te le dis moi aussi « Même quand je te déteste, je t'aime. Tu comprends ça, toi ? » « Cette union que nous vivons, c'est aussi puissant qu'une communion mystique. C'est comme un décret de la nature qu'on accepterait. Et c'est rare de les entendre, les décrets de la nature. »
Commenter  J’apprécie          3917



Ont apprécié cette critique (29)voir plus




{* *}