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Critique de Meps


La puissance du cinéma fait exister dans nos esprits des images représentatives d'histoires bien avant que nous ne connaissions les histoires elles-mêmes. Et j'avais en tête le poing tatoué du pasteur incarné par Robert Mitchum sur cette barrière bien avant de connaitre le récit de cette nuit du chasseur. J'avais du mal à cerner le personnage, l'habit de pasteur était plutôt rassurant mais l'équivoque des mots "Love" et "Hate" me plongeait malgré tout dans le trouble.

A la lecture du livre, le trouble est vite remplacé par une certitude, ce pasteur-chasseur n'a pas de bonnes intentions. Et nous partageons cette certitude avec le petit John, bien seul à percevoir toute la malignité se cachant derrière les belles paroles. Comme souvent dans les grands romans, c'est l'empathie et l'identification que l'auteur parvient à faire ressentir à son lecteur pour le héros qui facilite la plongée dans le récit. Nous avons tous été enfants, nous avons tous eu peur du méchant ultime, grand méchant loup ou croque-mitaine. Et quand il s'incarne sous nos yeux et que personne ne semble le voir, comment atteindre à une plus grande horreur !

Le livre est classé comme roman policier alors que l'enquête n'est pas le coeur du récit. C'est peut-être l'absence d'élément concrètement fantastique (une sorte d'oxymore) qui empêche de le classer en roman d'horreur (comme Psychose, classé lui aussi comme roman policier). En tout cas, on est pas très étonné de savoir que Davis Grubb, l'auteur, a excellé dans le genre de la nouvelle fantastique. On admire aussi son talent pour retranscrire toutes les scènes de suspense, l'adaptation en film n'a pas dû être si compliquée que ça puisqu'on imagine très bien soi-même à la lecture les différents plans. Par exemple, les différentes confrontations entre les enfants et le chasseur dans la maison familiale, particulièrement celle dans la cave, sont totalement cinématographiques.

J'ai été plus surpris par les évocations poétiques de la nature, des phénomènes météorologiques, des phases de la lune, qui troublent un peu le rythme du récit. C'est assez original dans une récit de ce genre, pas forcément raté mais troublant. Je l'indiquerais plutôt comme un point négatif même si le style n'est pas non plus trop ampoulé.

Ce qui finit par sauver totalement le récit est la résolution finale où l'auteur glisse savamment entre les lignes des critiques de la société américaine, de son hypocrisie religieuse mais également de son refus de voir en face la misère qu'elle produit dans sa recherche du bonheur purement matériel, déconnecté de l'humain. C'est très subtil, il n'y a pas d'attaque directe, mais on sent l'auteur bien désabusé par ses compatriotes, mettant en avant au final la bonté simple du personnage de Rachel, qui agit pour sauvegarder l'enfance poursuivie par ce chasseur cupide se parant des atours de la morale religieuse.
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