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Critique de Krout


L'économie est un jeu d'enfant ... à tenir hors de portée des enfants. Encore faudrait-il bien en connaître les règles et avoir non seulement appris la théorie des jeux mais aussi en avoir acquis la pratique sur des cas bien concrets. Tim Harford, dans ce livre sérieux et facile à lire, se propose à tout le moins de démystifier cet important sujet qui nous concerne et nous impacte tous. Une bonne occasion de s'y intéresser d'autant que les deux disciplines micro & macro économies sont présentées avec pas mal d'exemples et d'explications sur des pratiques qui méritent d'être dévoilées. Un livre qui a donc pour ambition de nous rendre un peu moins naïf et peut, à condition d'en faire une lecture critique, nous aider à mieux comprendre le monde complexe dans lequel nous vivons.

Le livre se présente en deux parties bien distinctes : la première orientée sur la microéconomie à laquelle j'attribuerais une étoile (j'ai vraiment été à deux doigts d'arrêter) et la deuxième orientée sur la macroéconomie qui vaut à mon avis quatres étoiles pour sa clareté pédagogique et aussi pour son humilité (denrée rare donc précieuse). Au global je donnerai donc trois étoiles, ce qui montre que l'ensemble n'est pas forcémment égal à la moyenne des parties et montre aussi la difficulté d'agglomérer les données sur un indicateur qui est par ailleurs une des difficultés auxquelles se heurtent les économistes.

Ce que j'ai aimé dans la deuxième partie : le modèle hydraulique MONIAC de Bill Philipps, l'explication de la récession par la demande sur base de l'exemple de la Capitol Hill Babysitting Coopérative et celle de la récession par l'offre sur base de l'exemple de l'économie du camp de prisonniers de Robert A. Radford ainsi que la mise en évidence de leur interraction et de la difficulté d'identification de l'origine d'une récession, le rappel des trois rôles de la monnaie, le rôle de l'inflation et les éclaircissements sur le chômage structurel. Enfin la discussion sur les limites et difficultés des indicateurs tels les PIB, PNB et RNB a le grand mérite d'éveiller les consciences. Seul réel bémol la discussion sur le bonheur qui pour moi sort largement du cadre matérialiste de l'économie et pour laquelle je recommanderais de se référer de préférence au livre de Philippe Lenoir L'art du bonheur plus complet.

Ce qui m'a franchement irrité dans la première partie : Tout est bâtit sur cette illusion que chaque acteur sur le marché (vous, moi, ...) se comporte de façon parfaitement rationnelle et fait des choix économiques parfaitement rationnels dans son propre intérêt. le marché et rien que le marché parfait coulerait de source et résoudrait comme par la magie tous les problèmes. Ainsi donc, lorsque dans Zola le mineur de fond dépense en une soirée en beuverie sa paie de la semaine, il doit s'agir d'un comportement parfaitement rationnel dans son meilleur intérêt plutôt que d'acheter du pain, quelques légumes et un peu de lard pour une bonne soupe familiale. Autre vision étriquée : le manque d'éthique des dirigeants menant à une corruption généralisée expliqueraient à elle seule la pauvreté des pays africains comme le Cameroun. Cette thèse est purement scandaleuse : il existe bien d'autres facteurs dont les règles internationnales imposées par les pays riches aux pays pauvres passées ici sous silence. Sur ce sujet le remarquable livre, mais ô combien plus difficile d'accés, L'improbable équilibre de Guy Spitaels professeur d'économie à l'Université Libre de Bruxelles (ULB) est autrement plus fouillé et convaincant. Je pourrais aussi dénoncer des déductions hâtives p. 273 basées sur interprétation fautive d'une régression avec un très mauvais Rsquare et totalement biaisée par 2 pays, la Suisse et la Norvège, dont le poids dans l'agriculture mondial est tout sauf important.

Au total, malgré les défauts énoncés, un livre bien intéressant, pédagogique et d'un abord aisé mais, et c'est normal, qui demande une lecture critique. Et pourquoi pas un approfondissement avec une autre source, un fois votre intérêt aiguisé ? Je remercie Babélio et les éditions PUF pour en avoir pû prendre connaissance à travers une masse critique.
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