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Critique de pompimpon


" "Il retient rien dans ses mains !" disait-on, et il y avait une sorte de fatalisme dans le regard et les paroles des gens lorsqu'ils parlaient de toi, comme s'ils t'avaient condamné, en fait, à être le fils d'une morte et d'un alcoolique."

Greta se rend compte que le gamin du voisin est revenu, maintenant que son père se retrouve seul après le départ de sa compagne.
Trente ans, le gamin, maintenant.
Greta habite la maison d'à côté dans ce petit hameau, elle est aux premières loges depuis toujours pour ce qui se passe chez Augustin, pour décrypter la signification réelle des allées et venues de son fils Loïc au fil du temps, tournant et virant à proximité sans pour autant entrer ou passant à distance, disparaissant pendant des mois, balloté selon les évènements.

Ce petit Loïc qu'elle a vu naître, Greta lui raconte en lui parlant directement, tout ce qu'elle sait de sa vie depuis avant même sa venue au monde.

De l'autre côté de la haie, raconte-t-elle, il y avait une maison au bonheur fragile, avec Nadine, une jeune femme vive et lumineuse, Augustin, un "gentil garçon" qui avait évité jusque là les gadins de l'existence, et Loïc, leur bébé au visage rond avec des fossettes comme sa maman.
Greta les regardait vivre en voisine distraite, préoccupée par son travail et son propre quotidien perturbé par une violente allergie au soleil qui ne lui permet de sortir que dans un harnachement impossible en plein jour, ou plus tranquillement le soir.

La sortie de route était arrivée vite avec un premier séjour à l'hôpital pour Nadine, puis un second dont elle n'était pas revenue.

La petite étoile qui vibrait dans la maison voisine avait été soufflée.
"Maman est partie.
- Où ?
- Au ciel.
Tu ne le laisses pas s'en tirer comme ça, tu ripostes immédiatement :
-Et elle nous a pas emmenés ?
Là il accuse le coup, il secoue la tête :
- Ben non… Ben non…
Il se racle la gorge :
- Elle est partie en avion."

Premier des exils successifs qui ponctueront sa vie, le petit Loïc est envoyé chez ses grands-parents maternels.

Il va grandir entre le manque d'amour et l'alcoolisme, la maladresse et l'indifférence, pas mal de brutalité aussi, de sa famille et des gens du voisinage, sous le regard parfois très attentif, parfois très distancié de Greta.

J'ai cru que j'allais assister au flingage en règle d'une vie, marquée au coin du malheur, du rejet, de la misère saupoudrée d'atavisme, que Françoise Henry décrit avec une sorte de douceur et de tendresse pour ce destin fracassé dont on n'attendrait que la chute.

Mais ça n'est pas vraiment ça.
Ce petit gars s'accroche, qui semble pousser comme un pissenlit dans le bitume.
Il cherche la main secourable à même de l'aider à sortir de la voie toute tracée illettrisme-petits-boulots-chômage-et-bibine-du-lundi-matin-au-dimanche-soir que tous croient pouvoir lui prédire en se référant au parcours de ses ascendants.

Il y en a peu, de ces mains secourables, "les gens" qui ont tant de loisirs qu'ils peuvent passer des heures à parler de Loïc, de sa vie et de sa famille, sont toujours trop pris pour même penser qu'ils pourraient peut-être l'aider…

Il suffit pourtant d'une fois, d'un seul mouvement, pour nourrir l'espoir, amener un gamin à croire en lui, chaque geste étant comme un petit caillou pouvant l'aider à trouver son propre chemin.

J'ai compté les petits cailloux pour Loïc, y en aura-t-il assez pour sortir du tunnel ?
Y aura-t-il enfin la main tendue quand il poussera la porte après avoir dit "Je m'en vais" ?
J'espère…

Merci à #netgalleyFrance et aux éditions du Rocher pour cette découverte.
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