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Critique de Carolina78


Clarisse Herrenschmidt est une chercheuse retraitée du CNRS - Laboratoire d'Anthropologie Sociale du Collège de France - spécialiste de l'Iran perse et élamite, ainsi que de la Grèce ancienne. Elle est linguiste et philologue de formation. Elle a étudié les langues anciennes, celles d'Iran – y compris l'élamite -, le grec, le sanskrit, et a des notions d'akkadien, d'hébreu et de sumérien.

Les trois écritures se limite à la Mésopotamie et l'Iran, la Méditerranée orientale et le monde grec, l'Europe et les États-Unis, sont exclus l'Égypte et la Rome antiques, l'Inde, la Chine avec ses expansions graphiques en Corée et au Japon, les glyphes mayas.

Il a été publié en 2007 et est basé sur plusieurs articles - les premiers sont parus en 1990, 1995 et 2000 – qui traitent de l'évolution de l'écriture, pendant 53 siècles, en trois étapes fondamentales :
- Naissance à de l'écriture à Uruk (Sumer, sud de l'Irak) et Suse (Élam, sud-ouest de l'Iran), vers 3300 av JC.
- Apparition de l'écriture monétaire arithmétique avec la monnaie frappée, à Éphèse (Ionie, Grèce antique, Turquie), vers 620 av JC.
- Développement de l'informatique, à partir de la machine de Turing (mathématicien cryptologue britannique) en 1936.
En simplifiant, on passe des calculi à la monnaie frappée, pour terminer avec le code binaire (0,1).

Clarisse Herrenshchmidt émet des hypothèses. Il ne s'agit pas d'un manuel figé mais d'un chantier ouvert, de nouvelles découvertes archéologiques peuvent nous réserver quelques surprises.

La démarche de l'autrice est anthropologique. Elle s'interroge sur la perception et restitution du « lien entre les choses du monde et les choses du langage », et sur comment « l'écriture a rendu visible ce qui était invisible », à travers les différentes époques.

Comme indiqué dans le titre, le livre s'articule en trois parties - langue, nombre, code - auxquelles correspondent selon Clarisse Herrenshchmidt, trois organes - la bouche, l'oeil et le cerveau -.

Dans la première partie « de l'écriture des langues », nous apprenons que l'écriture est née d'une nécessité comptable. Les éleveurs avaient besoin de vérifier les entrées et sorties de leurs troupeaux lors des transhumances. Ils utilisaient des calculi, petites pièces d'argile de différentes formes qu'ils mettaient à l'intérieur d'une boule d'argile. Cette dernière s'est transformée en tablette où les quantités étaient inscrites avec un roseau.

Je vous laisse découvrir les parties descriptives des diverses écritures (syllabiques, consonantiques, phoniques, avec affixes…) - couplées aux langues anciennes (cunéiforme, élamite, grec, perse, akkadien…) - ainsi que leurs incidences, selon qu'on se place du côté du locuteur ou du lecteur, sur les intentions des messages, sur leurs destinataires.

Vous trouverez aussi des développements très intéressants sur l'anthropologie religieuse de l'écriture.

Le chapitre sur « L'écriture monétaire arithmétique » traite de numismatique, de la suppression de l'étalon or en 1971, de mathématiques (Pythagore, Thalès, Aristote…), du passage des chiffres romains aux chiffres arabes, de la création de la comptabilité…

Le dernier volet, « L'écriture informatique et réticulaire » retrace la révolution virtuelle et nous explique sommairement le fonctionnement des ordinateurs et le codage. L'espace et le temps sont abolis. À la parole divine se substitue une voix anonyme et impersonnelle. Que devient l'écriture face à l'invasion des images ?

« Nous coulons presque dans un océan d'images, qui nous rend maladroits dans le raisonnement, quasi inaptes à l'argumentation et au débat, car dans l'image la négation est impossible – outil fondamental à toute affirmation. » p. 586

Personnellement, je me suis essentiellement focalisée sur les parties « langue » et « nombre », qui correspondent le mieux au domaine de compétences de l'écrivaine.

Les trois écritures est un ouvrage érudit qui ravira les connaisseurs et amoureux de l'histoire de l'écriture, qui sauront apprécier le nombre et la richesse des informations. Pour les néophytes comme moi, il est accessible, dans ses grandes lignes, avec une grande dose de patience et beaucoup de recherches parallèles. le langage est simple mais il pêche par des maladresses de forme, phrases peu claires, répétitions et manque de synthèse. Des illustrations auraient été bienvenues, je me suis aidée d'une vidéo sur YouTube qui présente des images, par exemple des calculi ou des monnaies anciennes, ainsi que des fiches récapitulatives.

Je tiens à remercier Babelio et Gallimard. J'ai été très heureuse d'avoir été sélectionnée pour le seul livre que j'avais choisi pour ma première masse critique.

Grâce à Les trois écritures, je me suis initiée et instruite à l'anthropologie de l'écriture. La lecture a été longue et ardue mais passionnante.
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