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Critique de maritaillandier


Orages pèlerinsFawaz Hussain / le serpent à plumes Décembre 2016

Ces « orages pèlerins » sont quatre, quatre kurdes emblèmes de la diaspora kurde, de la résistance d'un peuple épars, pillé, ils viennent des quatre plus importantes communautés kurdes : celles de Syrie, d'Iran, de Turquie et d'Irak. Tous les quatre ont décidé de tenter l'aventure de l'exil, tels des Rastignac de la mondialisation, ils rejouent en mode demandeurs d'asile le fameux « à nous deux, Paris ! ».
Le récit de leurs picaresques périples vers la France constitue la première partie du roman. On les suit chacun à leur tour jusqu'au lieu commun de rendez-vous avec leur passeur : Sino a « pris la décision de quitter la misère kurde, la violence de la Turquie » pour rejoindre une « Europe qui souriait aux entrepreneurs »; Dara, lui, abandonne ses montagnes d'Irak pour « réussir ce grand saut vers l'inconnu…réclamer sa part à la vie», pour lui, Paris est un portrait de femme, une photo/appât du passeur ; Shérko Shikaki, l'iranien, aspire lui « à vivre heureux non comme un poisson dans l'eau mais plutôt comme un toutou choyé dans un appartement somptueux » ; enfin Rustemé Zal, kurde de Syrie c'est à dire « étranger sur le sol où lui et ses ancêtres avaient vu le jour » poursuit son rêve d'un « monde juste ».
Ce qui est retenu, vécu ou rêvé, du parcours de chacun d'eux, illustre un imaginaire collectif des migrants où se mêlent espoirs et peurs, persécutions et projets, un espace mental où l'on choit, où l'on se noie et où, malgré tout, on poursuit le chemin.
L'arrivée à Paris, la vie qu'on tente de se bâtir en France, forment une deuxième partie dans laquelle les illusions viennent se cogner aux réalités triviales du quotidien, une poursuite de l'histoire où le réel agrippe sans ménagement les quatre héros et fait main basse sur leurs rêves. Eux aussi ont donc participé à ce « scénario séculaire », se déplaçant « dans la vie comme des pions sur l'échiquier noir et blanc de l'absurde » selon la formule finale de Fawaz Hussain.
Un personnage secondaire du livre, Ali Réza, tente de maîtriser la place de l'adjectif épithète dans la langue française, comme son ami Shérko tente de maîtriser sa place dans la société française mais voilà il n'y a pas de règle absolue et dans cette grammaire de la géopolitique, les Kurdes depuis si longtemps survivent, tenaces et admirables exceptions. N'est-ce pas là ce que nous disent ces pages alertes d'un auteur pèlerin en voyage permanent entre deux langues ?


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