AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Bookycooky


12 chaises en noyer aux pieds galbés signées Gambs, dont l'un des sièges recèle en son ventre rebondi , sous un beau tissu anglais à semis de fleurettes le trésor de Claudia Ivanovna Pethoukova 💎 ! Voilà la révélation que fait cette dernière à son gendre , avant de rendre son dernier souffle. Cela semble une mauvaise blague vu que l'Ivanovna n'avait aucune considération pour ce dernier et que les chaises en question de sa propriété, réquisitionnées à la révolution ont disparus de la circulation, éparpillées au quatre coins de la Russie !!!! Vorobianinov le gendre en question , pas des plus futés se lance à leur poursuite prenant en chemin comme associé Ostap le Magnifique , un escroc sophistiqué 😁de petit calibre. Mais un troisième larbin entre aussi en piste ! Sur son lit de mort la Ivanovna s'est confessée au prêtre , du coup ce dernier en mission sacrée 😁, se lance de même à la poursuite des pierres précieuses . Nous voici donc avec trois énergumènes chasseurs de diamants, déambulant à travers la Russie post- révolutionnaire à la recherche d'un trésor plus difficile à trouver qu'une aiguille dans une botte de foin, surtout que plus ils s'en approchent plus les chaises se disséminent dans tous les coins, comme des cafards.

A travers cette chasse au trésor le duo Ilf&Petrov nous passe le film à l'image peu reluisante d'une Russie communiste qui aspirait à une société équitable et à de meilleurs conditions de vie suite au régime tsariste. L'atmosphère sociale est totalement débridée , la censure sur la presse oppressante, la corruption de la bureaucratie et surtout la pauvreté du peuple ont atteint des mesures inimaginables, où posséder un sommier est déjà source d'estime ! Quand à la culture, elle ne sert à rien, les musées sont visités uniquement parce qu'ils sont situés dans des bâtiments luxueux, n'importe qui peu composer un poème , écrire une pièce de théâtre vu le public qui n'y pige rien !
Une satire féroce du régime soviétique , où l'intrigue n'est qu'un prétexte pour maintenir le fil rouge de l'histoire qui se noie dans les entrailles d'un pays chaotique. Un chaos aux descriptions savoureuses de personnages, « Ostap rayonnait . Il portait des chaussures neuves couleur framboise, à talons de caoutchouc crantés, des chaussettes à carreaux verts et noirs, une casquette crème et une écharpe de soie mélangée, de teinte roumaine »,
de lieux ,”Les gares de Moscou sont les portes de la ville. Elles accueillent et expédient chaque jour trente mille passagers. La gare Alexandre est celle par laquelle pénètrent à Moscou les étrangers à semelles caoutchoutées et costumes de golf. Par celle de Koursk arrive le Caucasien à bonnet de mouton muni de petits trous pour l'aération …”, d'événements racontés avec une ironie vaudevillesque, et de contes rocambolesques , comme le Comte qui se fait moine par désir de comprendre la vie, résiste à vingt-cinq ans de jeûne mais succombe à des sacrés punaises ,« il avait complètement cessé de penser au sens de la vie car, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, il passait son temps à la chasse aux punaises »😁!.

A sa publication en 1928 ce livre considéré culte qui connu un succès retentissant est facile d'accès car l'action est permanente, les références littéraires et historiques ne suffoquent presque jamais le texte , pourtant la plupart très subtils valent la peine de s'y arrêter pour enrichir la lecture d'un texte déjà très fournie d'une prose descriptive pleine d'humour . Après pourquoi culte , je n'en sais rien mais je suppose parce qu'il a échappé à la censure ( les censeurs étant probablement aveugles au trop évident 😁)et qu'il avait le mérite de bien traduire les désillusions de tout un peuple dans une langue facile et ironique, le personnage d'Ostap le Magnifique incarnant sublimement à petite échelle l'Escroc ou les Escrocs qui firent miroiter à tout un peuple des idéaux fausses pour arriver à leurs propres fins. Personnellement ses combines improvisées m'ont beaucoup fait rire.
Une lecture que je dois à bobfutur, merci. Lu chez Ginkgo édition 2020, traduction intégrale du texte originalement publié , mais épurée de nombreuses annotations et fragments d'histoires qui ralentissaient l'intrigue d'après note de l'éditeur.
Commenter  J’apprécie          8511



Ont apprécié cette critique (82)voir plus




{* *}