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Critique de Alfaric


Avec des couvertures souvent dans la lignée des manhwa 1ère génération, et des graphismes pas spécialement engageants, c'est à reculons que j'ai débuté cette série sans doute en passe de devenir culte. Au final j'aime beaucoup, même si…
Nous sommes dans un univers à la fois post-apocalyptique et dystopique* où les titans ont pris le pouvoir sur terre, et où l'humanité survie en se réfugiant derrière les nouvelles murailles de Chine que sont les Murs Maria, Rose et Sina… Enfin, ça c'est que nous disent les personnages qui croient sur parole la propagande gouvernementale ! Je gage que la réalité doit être tout autre… ^^
Au fil des pages on comprend très vite qu'ont puise joliment dans les belles traditions du récit catastrophe à la sauce Kaiju Ega et des récits survivalistes à la sauce George Romero. Car après tout, ces titans anthropophages insensibles à la douleur et avec lesquels on ne peut communiquer ressemblent fortement à des zombis géants… ^^
Au final, on se retrouve avec une espèce d'"Evangelion" steampunk mâtiné d'une bonne dose de "Claymore" car on retrouve des éléments clés des oeuvres Hideaki Anno et de Norihiro Yagi (le détournement des codes du film de guerre par exemple).

A un moment j'ai aussi pensé à l'anime "Big-O", où toute une civilisation se réveillait amnésique. le spectateur ne pouvait que se demander comment une population qui a fait table rase du passé pouvait aussi rapidement rétablir des inégalités sociales aussi fortes… Et bien, avec des masses ignorantes desdits inégalités et une élite manipulatrice bien au courant desdites inégalités et de leur monde de fonctionnement : c'est la sempiternelle lutte des classes…
De la même manière je me suis demandé comment les personnages de ce manga pouvaient être aussi passifs :
- dans le cadre d'une guerre totale, 1/3 des effectifs sont cantonnés au flicage de la population intra-muros
- les contestataires sont systématiquement envoyés dans le bataillon d'exploration, dont les membres sont systématiquement envoyés en mission suicide (l'auteur joue même sur les répétitions, le même schéma revenant plusieurs fois : espoir de la population devant une nouvelle expédition du bataillon d'exploration, le bataillon d'exploration se fait décimer et la majorité de ses membres meurent dans le ventre des titans, désespoir de la population qui ne sait plus à quels saints de se vouer…)
- la recherche scientifique est sciemment sabotée quand elle n'est pas interdite
- personne ne sait quand et comment les murs ont été construits (c'est l'oeuvre de Dieu disent les dévots…)
- personne ne sait ce qu'il y a au-delà des murs… pire, personne ne sait ce qu'il y avait avant les murs…
Ça fait déjà beaucoup : je parie sur un lavage de cerveau collectif de la population, maintenu sous tutelle la peur permanent des titans croquemitaine que personne n'avait jamais vu avant l'attaque du Mur Maria par le titan colossal…
L'auteur joue donc avec les théories à la con des néo-cons (théorie du choc, et plus particulièrement cette vaste fumisterie du choc des civilisations), utilisées pour faire faire peur aux peuples du monde entier et les obliger à trimer pour une élite qui possédera bientôt 80% des richesses mondiales alors que cela fait déjà longtemps qu'elle ne sait plus quoi faire de son pognon…
On sent bien également dans plusieurs passages que les titans ne sont qu'une variable d'ajustement de la population et de son contrôle, un peu à la manière des révolutions dans l'arrière du train du "Snowpiercer".
Le naming presque intégralement germanique ne doit pas nous faire oublier une famille royale complètement coupée du reste de la société, des conflits entre juntes militaires qui oscillent entre pacifisme et extrémisme, entre conservatisme et réformisme sur fond de population complètement embrigadée… Toute coïncidence avec l'Empire japonais de l'entre-deux-guerres n'est absolument pas fortuite. le manga a sans doute voulu brouiller les pistes pour ne pas subir le même sort que son confrère "Zipang" qualifié de révisionniste par certains, et d'antipatriotique par d'autres…

Les titans se régénèrent à l'infini sans avoir besoin de manger, de boire ou de respirer, c'est-à-dire au défi des lois de la conservation de la matière… Est-ce qu'on pioche dans le folklore horrifique asiatique ou est-ce le résultat d'une surenchère horrifique accélérée par la saga "Resident Evil" et ses émules ? Dans les deux cas les titans en tant que concept son abusés : ils ne sont là que pour s'empiffrer d'humains alors qu'il nul besoin de nourriture, se contentant de régurgiter les restes de leurs victimes une fois atteint le clapet anti-retour.
Sont-ils une allégorie de la revanche des forces de la nature, des goules néo-libérales qui broyent les populations pour satisfaire leurs egos insatiables, des immigrés tiers-mondistes venus dévorer la prospérité occidentale, d'une arme biologique raté (ou réussie ^^), d'une expérience sur l'immortalité ratée (ou réussie ^^) ?
Si j'en crois les déclarations de l'auteur, j'ai presque atteint la moitié de la saga et je suis encore bien dans le schwartz :
- Qui sont les titans ? D'où vient-il ? Que veulent-ils ?
- Qui sont les hybrides ? D'où viennent-ils ? Que veulent-ils ?
- Quel est le gouvernement de la cité ? D'où vient-il ? Que veut-il ?
ON N'EN SAIT TOUJOURS FICHTRE RIEN AU BOUT DE 10 TOMES !!! (Je sais bien qu'Hajime Isayama nous fait découvrir son univers en même temps que ses personnages, mais ses personnages connaissent cet univers puisqu'ils ont nés dedans, de plus les lecteurs japonais repèrent bien plus vite que nous les références à leur propre histoire)
J'ai déjà vécu cela avec "X-Files", "Evangelion", "Lost", "Darker Than Black", "Fringe"… On met en scène les intrigues et les affrontements de plusieurs factions sans savoir quelles sont les factions en question ! On apporte donc fatalement plus de questions que de réponses, du coup la résolution de l'ensemble des mystères peut vite s'emmêler les pieds !
Et alors qu'on commence enfin à appréhender les contours du schmilblick, malgré le brouillard dans lequel l'auteur nous laisse sciemment, paf il nous balance le titan bestial qui vient foutre la merde à toutes les théories qui tiennent la route (à moins qu'il ne soit qu'un gros clin d'oeil au Docteur Gori de la série "Spectreman" ? ^^)


Dans le tome 1, cela fait un siècle que plus personne n'a vu un titan. C'est alors qu'une nouvelle sorte de titan, le titan colossal, réalise une brèche dans le Mur Maria. le jeune Eren Jäger voit ainsi sa mère se faire dévorer sous ses yeux. Jäger signifie chasseur en allemand… C'est donc plein de haine et rempli de la détermination à exterminer tous les titans, mais aussi de cauchemars récurrents au sujet de sa mère décédée et de son père porté disparu (ainsi qu'une grosse seringue… ^^), qu'on le retrouve 7 ans plus tard à l'académie militaire. (Non, on ne m'enlèvera pas de l'idée qu'Eren est un Shinji bis donc une fabuleuse tête à claque ^^)
Nous faisons la connaissance des recrues de la 104e brigade d'entraînement : Mikasa Ackerman, redoutable guerrière et soeur adoptive d'Eren, Armin Arlelt, intelligent stratège et ami d'enfance d'Eren, les motivés Conny Springer et Jean Kirschten, les réservés Bertholt Hoover et Marco Bott, Reiner Braun le fort en gueule, la dure Annie Leonhart, la douce Christa Lenz, la délurée Sasha Braus… En alternant les tranches de vies des uns et des autres, on nous apprend l'organisation concentrique des murs, la tripartition des forces armées entre garnison, bataillon d'exploration et brigades spéciales, le manoeuvre de harnais tridimensionnel (un jetpack steampunk qui permet de jouer les "Spiderman" virevoltant)… C'est alors que le titan colossal refait son apparition pour réaliser une brèche dans le Mur Rose avec l'aide du titan cuirassé. Les différents personnages luttent pour la survie de l'humanité, et c'est une longue suite de dévorations en gros plan et au ralenti…



Les dessins semi-réalistes sont maladroits et inaboutis, voire carrément brouillons (la palme revenant à un tome 3 mal dessiné comportant un nombre conséquent de cases moches). Ce qui est un peu normal pour la première oeuvre d'un mangaka. Mais ce qui me gêne c'est qu'ils sont inégaux. Certains décors sont réussis, alors que d'autres sont basiques et affreusement répétitifs donnant un aspect artificiel au monde, et un aspect figé aux scènes. Si on sent assez bien les différences d'échelles, un paquet de titans ne ressemblent à rien du tout. Et il faut rester concentré pour bien discerner les personnages dont le charadesign fluctue d'un tome à l'autre voire d'une planche à l'autre. le talent de l'auteur s'exprime très bien dans les scènes d'action, mais le reste du temps le découpage est particulièrement froid. Sans parler des bonus de fin que j'ai trouvé de moyen goût...
Et c'est un peu douteux que le personnage de loin le mieux dessiné de la série présente des airs de Gally (et plus on avance et plus cela se voit !)… Sans doute un gros clin d'oeil à l'univers du "Gunnm" de Yukito Kishiro, où les personnages s'échinaient à quitter l'enfer dystopique de Kuzutetsu pour rejoindre le paradis dystopique de Zalem…
Au fil des tomes, les graphismes s'homogénéisent même si le charadesign reste fluctuant, et les assistants se démènent pour offrir plus de profondeur et de réalisme aux arrières plans. Mais tout cela ne doit pas faire oublier que la grande force du manga, c'est le d'offrir un relationship drama aussi travaillé que celui d'un "The Walking Dead".


* Cela ne fait flipper personne que la dystopie soit devenu un trope incontournable de la culture populaire mondiale ? « le monde est pourri, noir c'est noir, il n'y a plus d'espoir »… C'est ça l'horizon des populations du monde entier ? Je voue donc aux gémonies tous les gros cons qui ont relayée la propagande unique mondialisée des courtiers du chaos et des rentiers du néant depuis plus de 30 ans !!!
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