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Critique de Plumeetencre




Figures iconiques de la culture nippone, les geishas incarnent l'élégance absolue. Nimbée d'une aura mystérieuse, leur existence suscite la curiosité, fascine et cristallise autant de fantasmes que de préjugés en Occident.

Éprouvant depuis l'adolescence une certaine admiration envers ces créatures à la beauté sublimée, il m'importait d'approcher l'univers voluptueux et évanescent dans lequel elles évoluent. 

Incursion rendue possible aujourd'hui grâce au témoignage intimiste de l'une d'entre elles - Mineko Iwasaki - qui a exercé ses talents au cours des années 70 - 80 et connu une incroyable renommée avant de prendre sa retraite à l'aube de la trentaine. 

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Benjamine d'une fratrie de onze enfants, Mineko (de son vrai nom Masako Tanaka) voit le jour en 1949 à Kyoto, ancienne capitale impériale du Japon. 

Pressentie pour succéder à la propriétaire de l'une des okiya les plus réputées de Gion-Kobu - quartier dédié aux plaisirs et aux divertissements - elle quitte le cocon familial à l'âge de 5 ans. 

Son destin est dès lors scellé, elle suivra les traces de ses soeurs, confiées jeunes aussi par leurs parents à l'okiya Iwasaki. Avoir été reconnue comme la prochaine atotori, titre très convoité, lui confèrera toutefois un statut privilégié. Elle sera traitée, et ce contrairement aux autres recrues, avec la même déférence que la directrice de l'établissement dont elle héritera ultérieurement du nom et de l'intégralité des biens. 

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S'il était d'usage avant la seconde guerre mondiale de façonner les futures geiko dès leur 6ème année, Mineko doit en 1954 patienter jusqu'à atteindre l'âge légal porté par le dispositif de protection de l'enfance à 15 ans. 

En attendant, parallèlement à sa scolarité, la petite fille apprivoise son nouvel environnement régi par des règles strictes ne laissant place à aucune digression. Elle est en outre initiée à la pratique de diverses activités telles que la calligraphie,  le chant, la musique (koto, shamisen notamment) ou encore la danse sans oublier les tâches domestiques. 

Une fois l'échéance arrivée, Mineko arrête ses études et fête en 1965 son omisedashi devenant ainsi la 64ème maiko de Gion-Kobu. Cet instant solennel marque le début de sa formation en tant que geiko. Elle est alors soumise à un programme extrêmement chargé, fait d'obligations et d'engagements divers, qui ne lui accordent au cours des années suivantes guère de répit. 

Mue par une force de travail incroyable et une détermination sans faille, elle gravit étape par étape tous les échelons qui l'élèveront en 1970 (21 ans) au rang honorifique de geiko.

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Dense, sensible, instructif, ce récit de vie offre une plongée saisissante dans le monde clos, ultra codifié et hiérarchisé des geishas. 

En nous permettant de découvrir les arcanes de leur profession, il vient contrecarrer nombre d'idées reçues. Parmi les plus répandues, figure incontestablement celle qui tend à les assimiler aux courtisanes. 

À la fois dame de compagnie auprès d'une clientèle aisée et artiste accomplie, les geishas mettent à profit leurs innombrables talents acquis  au terme d'un apprentissage  très exigeant. Elles sont gardiennes de traditions ancestrales qu'elles s'évertuent à perpétuer; tâche d'autant plus essentielle que leur effectif décroît inexorablement.

Derrière le faste des kimonos de soie, se cache une réalité infiniment plus complexe que celle imaginée…une vie de renoncement et de bienséance,  l'archaïsme d'un système figé,  les rivalités,  le sourire cachant les larmes. 

Un voyage édifiant et passionnant !


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Okiya : maison de geishas 
Atotori : héritière 
Geiko : autre nom donné aux Geishas
Maiko : apprentie geisha
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