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Critique de gabb


gabb
28 novembre 2016
Quand en préambule d'un roman, on découvre la liste des personnages, on tourne la page en se disant qu'il sera toujours temps d'y revenir plus tard.
Mais quand cette liste compte plus de 70 noms, classés par époques sur plusieurs décennies, comme c'est le cas pour cette "brève (!) histoire de sept meurtres", on redouble d'attention et on se dit qu'il va falloir s'accrocher !
Alors on prend son courage à deux mains, on se cramponne fermement, et si l'on ne se laisse pas désarçonner par les premiers chapitres et le style pour le moins déroutant de Marlon James (qui fait même parler les morts !), on finit par dompter la bête !

Commence alors une chevauchée haletante au pays du grand Bob Marley, qui n'est jamais nommé par son patronyme et qui n'entre jamais en scène, mais qui constitue malgré tout le point d'ancrage d'un roman unique en son genre ! On y découvre une Jamaïque au bord du chaos, rongée par la drogue, la misère, les guerres de gangs et les complots politiques. Malheur au lecteur qui s'embarquerait dans cette aventure en dilettante : il risque de se perdre dans les méandres d'une intrigue dense et complexe, où les personnages sont nombreux et les fusillades plus encore !
L'histoire s'articule principalement autour de la soirée du 3 décembre 1976 au cours de laquelle "le Chanteur", qui préparait un concert historique pour la paix, est victime d'une tentative d'assassinat. Différents chefs de gangs, plus ou moins pilotés par les partis politiques rivaux de l'île, ou même par la CIA qui surveille de près la situation jamaïcaine, sont mêlés à cette opération qui tourne au fiasco.
S'ensuivront plusieurs réglements de compte, parfois un peu confus (mais toujours sanglants !), et la tension quasi-permanente qui émane de ce long roman choral tient le lecteur en haleine jusqu'au bout.
Entre Kingston et New-York, c'est une fresque pleine de puissance que nous propose l'auteur, et l'on sent à chaque page que Marlon James a véritablement son pays natal chevillé au corps. Pour lui, l'attentat contre Bob Marley n'est finalement qu'un prétexte pour dépeindre en détails l'effritement d'une nation, et les poudrières que constituent les ghettos livrés à eux-mêmes. Son roman, finalement bien loin du simple polar teinté d'espionnage, est manifestement le fruit d'un gros travail d'enquête sur la Jamaïque des années 70, et sur les collusions entre les responsables politiques locaux, cubains et américains, la presse, et les mafieux de l'époque.
Heureusement les personnages féminins ne sont pas en reste : chacun d'eux révèle une réelle profondeur et leurs personnalités tranchent radicalement avec celles des tueurs sanguinaires ou des complotistes, parfois un peu trop caricaturaux, qui les entourent.
Voilà au final un roman follement ambitieux, intense et éprouvant, mais diablement efficace !
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